Durant les 30 derniers jours, 284 médicaments étaient indisponibles en Belgique. Au quotidien, cette indisponibilité pose problème aux médecins et aux pharmaciens. Pour Olivier Delaere, CEO de Febelco, le plus grand grossiste-répartiteur belge de médicaments, il est grand temps de trouver des solutions à ces pénuries qui compliquent le travail des médecins et des pharmaciens.
« Il faut distinguer deux types de pénuries de médicaments : celles qui sont globales et celles qui sont locales », commente Olivier Delaere. « Les pénuries mondiales sont liées à une augmentation de la demande, aux économies importantes réalisées par l’industrie pharmaceutique pour réduire ses coûts en limitant les stocks et les sites de production, et aux difficultés pour trouver certaines matières premières. »
Le CEO de Febelco soutient que 80 % des médicaments en pénurie dans un pays sont disponibles lorsqu’on passe la frontière. « L’origine des pénuries locales est multifactorielle. Le prix du médicament joue un rôle déterminant pour les firmes pharmaceutiques lorsqu’elles choisissent les marchés où elles vont distribuer leurs produits. Les initiatives prises par les autorités pour faire respecter la législation jouent également un rôle. »
Le contingentement pour raisons commerciales perturbe fortement le travail des pharmaciens. « Cela devrait être un combat quotidien de l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS), parce que ce n’est plus la demande, en fonction des besoins des patients, qui crée l’offre, mais des considérations financières qui font que les stocks de médicaments sont livrés ou ne le sont pas. »
« Tous les pharmaciens passent plusieurs heures par semaine à chercher des médicaments parce que certains ne sont pas disponibles. Ils peuvent, dans des cas bien précis, substituer. Généralement, ils doivent rappeler les médecins pour qu’ils changent leur prescription. Ce qui complexifie encore le travail du corps médical », remarque Olivier Delaere.
Plus de transparence
Via Pharmastatut, les pharmaciens, les grossistes-répartiteurs et les firmes pharmaceutiques peuvent communiquer des informations sur l’indisponibilité et la commercialisation des médicaments en Belgique. Olivier Delaere estime que cette application doit être mieux alimentée et qu’il faut être véritablement transparent sur le nombre de médicaments indisponibles. « Il faut dire la vérité. Dans le cas contraire, on ne va pas essayer de résoudre cette problématique. »
« Actuellement, 8 % des 10 000 médicaments vendus en Belgique sont officiellement indisponibles. En tant que grossiste-répartiteur, notre perception est que cette pénurie s’élève plutôt entre 10 et 12 %. Nous constatons des refus de livraison qui atteignent ces taux. »
Impact financier
Olivier Delaere est convaincu qu’il n’y a pas de solution miracle à la problématique de l’indisponibilité. « Il faut prendre plusieurs initiatives à la fois. La réindustrialisation de l’Europe est une solution macro pour réduire cette problématique. Créer une meilleure coordination entre les États membres sur les transferts des produits et les prix des médicaments sont également des pistes », avance le grossiste-répartiteur.
« Au niveau local, plusieurs mesures pourraient aider les pharmaciens et les médecins. Premièrement, il faut améliorer le fonctionnement de Pharmastatut. Deuxièmement, l’industrie pharmaceutique doit être plus transparente pour que l’AFMPS puisse anticiper les pénuries et rechercher des alternatives. Cela permettra aussi à la concurrence de s’adapter. Aujourd’hui, le seul acteur qui est vraiment transparent sur ses stocks et la livraison, c’est le grossiste-répartiteur. Tous les mois, nous fournissons nos stocks et nos ventes par catégories d’allocations (officines, hôpitaux, exportation, etc.). Il faut également faire respecter les réglementations sur la livraison, dont celles sur les délais et les stocks. Troisièmement, il faut également être plus transparent sur les prix des médicaments, notamment ceux qui font l’objet de contrats secrets. Quatrièmement, et je prêche pour ma chapelle, les autorités doivent soutenir le grossiste-répartiteur, qui est l’acteur ayant le plus gros stock de médicaments en Belgique et les distribuant. Nous avons une mission de service public qui n’est pas reconnue. En dix ans, le nombre de grossistes est passé de 13 à 3, parce que nos marges ont été fortement réduites. Cinquièmement, ne faudrait-il pas donner plus de liberté aux pharmaciens pour qu’ils puissent délivrer un médicament à la place d’un autre lorsqu’il n’est pas disponible ? L’import parallèle est également une piste à explorer. »