Les partis de la Vivaldi n'ont pas dévié de l'objectif de consensus sur une révision de la loi sur l'avortement que leur assigne l'accord de gouvernement. En commission de la Chambre, ils ont salué la qualité du rapport du comité d'experts multidisciplinaire présenté mardi aux députés.
Le parlement avait échoué à voter une proposition de loi du PS, co-signée par sept partis, avant la formation du gouvernement. Le CD&V, la N-VA et le Vlaams Belang avaient formé un front contre ce texte et usé de tous les moyens parlementaires pour empêcher qu'il soit approuvé. Afin de déminer le sujet, l'accord Vivaldi a imposé en octobre 2020 de trouver une soluti on consensuelle après la rédaction d'un rapport d'experts universitaires.
Lundi, le CD&V a retenu l'attention en annonçant son ouverture à certaines modifications de la loi dans le sens recommandé par les experts, notamment sur la contraception de longue durée, l'intégration de l'avortement dans l'aide médicale urgente, la confidentialité, le consentement des mineurs et le maintien de sanctions pénales pour les prestataires de soins qui ne respecteraient pas la loi.
"Nous ne voulons pas classer verticalement ce rapport. Au contraire, il y a plusieurs recommandations que l'on peut soutenir immédiatement", a expliqué la députée Els Van Hoof.
À propos du délai dans lequel un avortement peut être pratiqué, les chrétiens démocrates ne veulent pas aller aussi loin que les recommandations des experts et préconisent de passer de douze à quatorze semaines en raison de la douleur que pourrait ressentir le foetus -un sujet toujours discuté et auquel les experts ont répondu de manière approfondie- et des méthodes utilisées. Pour ce qui est du délai de réflexion, actuellement de 6 jours, ils ne souhaitent pas le supprimer mais le réduire à 48 heures.
"Votre travail a déjà pesé. Par ce travail remarquable, vous avez eu une influence. Des partis qui ne bougeaient pas d'un iota depuis des années ont connu une évolution", a fait remarquer Patrick Prévot (PS).
"Grâce à votre travail, nous avons une opportunité d'avancer ensemble", a souligné Séverine de Laveleye (Ecolo-Groen).
La Vivaldi devra tenter de s'accorder dans ce dossier sensible, une tâche qui pourrait s'avérer compliquée tant, malgré le dégel du CD&V, les positions restent éloignées sur certains points. "La recherche d'un consensus reste souhaitable et est un des défis de la majorité Vivaldi", a souligné Daniel Bacquelaine (MR).
Avec des accents divers, les six autres partis, co-signataires de la proposition socialiste ont rappelé leur position qu'ils estiment entièrement confortée par le rapport des experts. Les écologistes voient ainsi les 25 recommandations comme un ensemble. "Ce n'est pas une shopping list", a fait remarquer Mme de Laveleye.
Dans l'opposition, la cheffe de groupe PTB, Sofie Merckx, s'est dite prête à rallier une majorité de rechange pour soutenir la proposition de loi socialiste, co-signée par des libéraux, des écologistes, le PTB et DéFI. "La science valide ce texte que nous avons porté à huit partis", a affirmé Sophie Rohonyi (DéFI). Les Engagés voient d'un bon œil le rapport qu'ils jugent "important". La cheffe de groupe Catherine Fonck soutient un certain nombre de points même si l'extension à 18 semaines, telle que préconisée, demeure "délicate" et suscite toujours des questions à ses yeux.
Dans les rangs flamands, la N-VA n'a pas voulu se prononcer à ce stade de la discussion même si la députée Valerie Van Peel s'est montrée pour le moins critique sur certains aspects du rapport. "Nous sommes à un point de départ et non à une conclusion". Le Vlaams Belang n'a pas caché qu'il demeurait hostile à toute extension de délai.
Les experts n'entendent pas dicter leur position aux responsables politiques. "Notre mission, c'est de vous remettre un maximum d'outils pour former une décision éclairée. La légitimité citoyenne est chez vous. Il faut faire la part des choses entre la parole des experts et la légitimité politique", a dit l'ancien recteur de l'ULB et gynécologue, Yvon Englert, co-président du comité d'experts aux côtés de l'obstétricienne et cheffe de clinique de l'UZ Gent, Kristien Roelens.
Le comité a présenté en mars ses conclusions. Il préconise notamment de prolonger à 18 semaines post-conception le délai dans lequel une IVG peut être réalisée. Il recommande aussi de supprimer le délai de réflexion, de prévoir des dispositions permettant aux mineurs de donner leur consentement de façon autonome ou encore de renforcer l'accès à la contraception. Il préconise aussi d'inscrire l'avortement dans une loi de santé, qui préserverait toutefois des sanctions pour les praticiens qui ne la respecteraient pas, et non plus dans une loi pénale.