Pedro Facon tend la main aux anesthésistes

Lors du congrès des anesthésistes, samedi dernier, l’administrateur général adjoint de l’INAMI, Pedro Facon, a plaidé en faveur d’un système de santé réformé, plus efficace et guidé par les données, avec une rémunération transparente et équitable pour les prestataires de soins. Il a toutefois insisté pour que les médecins s’organisent afin que des interlocuteurs clairs puissent participer aux négociations avec les autorités.

En introduction, le haut responsable de l’INAMI a tenu à partager ce qu’il a lui-même qualifié de « frustration » quant à la gestion du dossier actuel des téléconsultations. « La priorité est de rétablir l’équilibre budgétaire, sinon nous serons confrontés à d’énormes problèmes (sociétaux) », a-t-il affirmé. « L’apport des professions de santé est crucial à cet égard : elles doivent utiliser la nomenclature de manière adéquate. »

L’INAMI joue certes un rôle important dans la gestion et la répartition des moyens, mais il ne prend pas seul les décisions. Il est essentiel que tous les acteurs assument leurs responsabilités.

Budget d’accréditation

Pedro Facon n’a pas hésité à inviter les médecins à réfléchir à une utilisation plus efficace des budgets, en posant certaines questions fondamentales : « La plupart des anesthésistes sont conventionnés et accrédités. J’aimerais ouvrir un débat sur les vies sauvées ou les bénéfices en santé réellement obtenus grâce aux 500 millions d’euros consacrés aux primes d’accréditation. Ne pourrait-on pas utiliser ces moyens de façon plus judicieuse ? »

Concernant les réformes de la nomenclature et des honoraires, celles-ci doivent aboutir à un système plus transparent et cohérent, davantage en phase avec l’activité médicale réelle. L’effort de clarification entre honoraires et frais de pratique doit enfin progresser, dans le cadre de cette réforme complexe qui doit être finalisée au cours de cette législature. Cette réforme ne se fera sans doute pas sans heurts, « mais un consensus au sein de la communauté médicale est indispensable. »

Néanmoins, Pedro Facon a rappelé avec fermeté : « Jo De Cock m’a toujours dit que cela fait 30 ans qu’on parle de la réforme de la nomenclature. En ce qui me concerne, cela ne prendra pas 30 ans. » Le contrat de gouvernement stipule clairement que le paiement à l’acte restera la base du système.

La pondération de la partie professionnelle de la nomenclature selon la complexité, la durée et le risque est un point de discussion spécifique aux anesthésistes (voir aussi le plan en cinq étapes ci-dessous, étape 2). Mais Pedro Facon souligne la nécessité d’une méthodologie cohérente entre toutes les spécialités. Si aucun consensus n’émerge au sein de la médico-mut, le gouvernement prendra une décision.Pedro Facon attend donc avec intérêt de voir si la médico-mut parviendra à dépasser ses clivages.

Algologues : une ouverture

Le rôle des infirmiers spécialisés, qui pourraient à terme soutenir certaines activités, ne doit pas être tabou, a-t-il ajouté. « Les postes vacants pour les infirmiers sont très nombreux, mais les formations ne suivent pas, alors que selon les classements de l’OCDE, la Belgique figure parmi les trois meilleurs pays en matière de rémunération des infirmiers hospitaliers. » Se focaliser uniquement sur les quotas et les rémunérations ne résoudra donc pas automatiquement les pénuries.

Pedro Facon a reconnu les investissements importants dans l’infrastructure numérique, « mais la valeur ajoutée reste encore trop faible à ce jour. » Il a également plaidé pour une réduction de la charge d’enregistrement pour les prestataires, via une meilleure exploitation des données hospitalières.

Le dossier des algologues fait également l’objet de négociations intenses, mais celles-ci étaient jusqu’à récemment dans l’impasse. Pourtant, Pedro Facon a qualifié leur position de prioritaire, en raison de leur part dans le budget et de la nécessité de garantir compétences et qualité. Il a ouvert la porte à une relance du dossier, ce qui a été bien accueilli dans la salle par plusieurs représentants de la profession.

Le Pr Jan Van Zundert, qui défend ce dossier depuis des années, s’est réjoui de cette main tendue : « Nous l’acceptons volontiers pour relancer le processus de reconnaissance de l’algologie. C’est un peu paradoxal : cela fait cinq ans que je venais ici pour parler des avancées, alors qu’il n’y en avait aucune. Cette année, je pensais ne plus aborder le sujet… et voilà que vous arrivez avec cette proposition rafraîchissante. J’espère que je pourrai vraiment présenter des progrès l’année prochaine. »

Le Dr Stef Carlier a abondé dans le même sens. Il a souligné que la proposition des anesthésistes tient déjà compte de la durée, de la complexité et du risque, et introduit un principe d’exactitude. Il a exprimé une certaine incompréhension face aux incohérences de certaines propositions antérieures (par exemple, des honoraires différents pour des actes identiques selon la position ou le niveau de risque).

Pedro Facon a promis de réexaminer la lettre contenant la proposition des anesthésistes, avec « un accent mis sur les résultats. »

Plan de réforme de la nomenclature en cinq étapes

  • Élaboration d’un plan de base avec de nouveaux codes de nomenclature
  • Pondération de la partie professionnelle de ces nouveaux codes selon leur complexité
  • Calcul des frais de pratique
  • Application pilote des nouveaux codes sans impact financier, pour connaître les volumes
  • Détermination des honoraires définitifs et mise en œuvre

Lire aussi : Les victoires de l’Apsar-Bsar

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Derniers commentaires

  • Jacques De Toeuf

    24 mars 2025

    Deux remarques.
    La nomenclature des actes médicaux stipule ques les actes d'anesthésiologie ne couvrent aucun frais ni de personnel /de fonctionnement ni d'investissement (donc pas l'immobilier ni les machines). Les frais sont repris dans le centre de frais quartier opératoire et le B2, donc par le le Budget des moyens financiers de l'hôpital, et dans les catégories 1-7 et les trois catégories de clinique de la douleur faisant l'objet de la convention INAMI entre hôpitaux et organismes assureurs. Donc les honoraires d'anesthésiologie sont "purs". Les prélèvements faits par les gestionnaires, depuis toujours, sont donc hors-la-loi. Il en va de même des actes en soins intensifs.
    Dans la nmenclature chirurgicale en révision, un même acte est démultiplié en autant de n°s code qu'il y a de voies d'abord et/ou selon la pathologie. Pourquoi n'en serait-il pas de même pour des anesthésies où, p ex, la position du patient sur la table opératoire peut entraîner des risques différents?