Maggie De Block conspuée par les militants syndicaux à Jurbise

Maggie De Block se souviendra sans doute longtemps, et pas en bien, de son expédition à Jurbise, lundi soir. Elle y était conviée par l’ex-ministre Galant, redevenue bourgmestre de la (riche) commune du nord de Mons, pour une causerie sur les défis des soins de santé. La ministre Open VLD était toutefois attendue de pied ferme par plus d’une centaine de manifestants du SETCa et de la CNE, protestant bruyamment contre les économies édictées dans la santé.

La Fédération MR de l'arrondissement de Mons a semble-t-il l’habitude d’inviter dans son fief différents hommes et femmes politiques pour des conférences thématiques ouvertes à tous. Ce lundi soir, à Jurbise, la salle culturelle Jacques Galant – du nom du père de l’actuelle bourgmestre Jacqueline Galant – était comble. Comble, et dominée de rouge et de vert, couleurs des syndicats venus témoigner leur hostilité à la récente ponction imposée dans les soins de santé. Le ton a été vite donné: Maggie De Block a pénétré dans la salle hérissée de calicots sous les huées et les sifflets. Au point que la ministre démissionnaire de la Mobilité a dû lancer un appel au calme et au respect. Les échanges sont demeurés tendus toute la soirée.

Durant une demi-heure, avant de passer à un questions/réponses, Maggie De Block s’est efforcée de dépeindre pourquoi des efforts étaient nécessaires, et tout de suite, dans le secteur de la santé, confronté au vieillissement démographique et à des coûts liés à l’innovation médicamenteuse et technologique. Elle a insisté sur sa volonté de mettre de l’ordre dans certains désordres, pour récupérer des moyens à affecter ailleurs. Ses économies sont ciblées, a-t-elle insisté et servent à rembourser les nouveautés. Le trajet de réinsertion des malades de longue durée va épargner ceux qui sont réellement dans l’incapacité de retravailler, dit-elle. Vieux refrain qu’on lui connait: les économies sont EBM, aussi. Et si certains conditionnements ne sont plus remboursés – par exemple dans les IPP –, c’est pour lutter contre une surconsommation délétère des patients. Elle n’a pas manqué d’énumérer les décisions qu’elle a impulsées, de remboursements divers, d’accélération de procédures, d’élimination de suppléments abusifs, de pactes conclus avec l’industrie pharma ou des pays voisins, de facilitation d’accès comme le tiers payant obligatoire chez les BIM – quasi la seule allusion à la médecine générale durant la soirée. Elle a, sans surprise toujours, évoqué les perspectives de l’e-santé.

A-t-elle consolé, en soulignant que son budget était le seul à connaître une croissance («500 millions cette année encore, quand tous les autres budgets rétrécissent»)? A-t-elle convaincu, en répétant que la soutenabilité du système de santé justifiait les durcissements actuels? Pas les syndicalistes du SETCa et de la CNE, en lutte ouverte contre sa «politique de destruction de nos soins de santé». Pour eux, les réformes et les rationalisations prévues par Maggie De Block dans le secteur des hôpitaux par exemple seront nécessairement accompagnées de casse sociale, de durcissement de conditions de travail déjà pénibles, au détriment des professionnels des soins. D’après eux, difficile d’encore oser parler de qualité du système de soins belges dans ce contexte de restrictions touchant directement ou indirectement le patient.

Maggie De Block, manifestement étonnée et heurtée de la tension ambiante, a renvoyé les manifestants syndicaux à leurs propres représentants, en affirmant que son cabinet était toujours ouvert à la concertation avec ces derniers. Elle-même préfère négocier quand il est possible de terminer une phrase. «Mais quand on demande des propositions avant les conclaves, ça ne vient pas, alors on doit décider nous-mêmes…»

Qu’on admire son effort de faire face à une (partie de) salle idéologiquement hostile, bien chambrée, dans une langue qui n’est pas la sienne, ou qu’on s’exaspère de l’entendre continuer à parler d’économies ciblées quand elles atteignent quasi le milliard, on sort de la soirée en se disant que l’étoile de la championne ès popularité pâlit, son style de gouvernance irrite, et que le préavis dans le non-marchand, en front commun, le 24 novembre, devrait avoir son petit succès. A Jurbise et à Mons-Borinage, en tout cas, les pancartes «Médecine de qualité accessible à tous» et «Maggie tu dé-bloques» sont déjà prêtes. 

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