Le premier baromètre de la santé des enfants, publié par les Mutualités Libres, révèle une prescription élevée d’antibiotiques chez les enfants de 0 à 2 ans.
Selon le Kidoscope - une étude basée sur les données santé des enfants qui sont membres de la Mutualité libre (303.727 enfants de 0 à 18 ans) - 1 bébé sur 2 (47%) consomme au moins une fois dans l’année un antibiotique. «En moyenne, un bébé reçoit 3 boîtes d’antibiotiques par an, et ce alors que les campagnes visant à réduire l’utilisation d’antibiotiques n’ont jamais été aussi nombreuses. Une tendance particulièrement préoccupante que l’on constate également chez les 3 à 6 ans. Ce n’est qu’après l’âge de 6 ans que le recours aux antibiotiques diminue: il concerne alors 25% des 6-18 ans, ce qui reste toujours élevé», commente la Mutalité libre. Elle considère que «la prescription d’antibiotiques est donc trop automatique, ces médicaments étant parfois utilisés à mauvais escient pour traiter des infections virales saisonnières.»
Suivre les directives
L’organisme assureur estime essentiel de «poursuivre - et même d’intensifier - les efforts en vue de réduire la consommation globale d’antibiotiques dans notre pays. En Belgique, on utilise en effet près de 3 fois plus d’antibiotiques qu’aux Pays-Bas et 2 fois plus qu’en Allemagne.» Il recommande d’adopter des directives d'utilisation des antibiotiques pour des maladies infantiles courantes et renvoie à un récent rapport de l’Inami sur l’usage rationnel des antibiotiques prescrits en ambulatoire à l’intention des professionnels de la santé.
Par ailleurs, le Kidoscope indique que 4 bébés sur 10 (38 %) reçoivent des médicaments bronchodilatateurs (aérosols…), et ce pendant une durée moyenne de 31 jours. «La première année de vie est une période à risque élevé de problèmes respiratoires, concède l’organisme assureur. Mais il est utile de rappeler à ce propos que ces médicaments prescrits de manière importante chez les bébés ne sont pas indiqués dans les formes simples de bronchiolite aiguë du nourrisson. Infection virale saisonnière et souvent bénigne, la bronchiolite aiguë ne nécessite généralement rien de plus que des soins du nez.»
L'analyse des données fournies par la Mutualité libre révèle que la prescription d'antibiotiques aux enfants est plus le fait des généralistes que des pédiatres. C'est particulièrement remarquable dans les tranches des enfants de 3 à 6 ans et de 7 à 12 ans (voir tableau ci dessous).
Qualification du precripteur d'antibiotiques | 0-2 ans | 3-6 ans | 7-12 ans | 13-18 ans | 0-18 ans |
Généraliste | 53,7% | 68,5% | 76,3% | 65,2% | 66,1% |
Pédiatre | 41,5% | 25,3% | 15,9% | 8,3% | 22,0% |
ORL | 2,3% | 3,3% | 2,8% | 1,8% | 2,6% |
Autres spécialités | 2,5% | 2,9% | 5,0% | 24,7% | 9,3% |
Total | 100% | 100% | 100% | 100% | 100% |
* dont 11,9% par un dermatologue
** dont 3,5% par un dermatologue
Shopping médical
"Les mutuelles sont bien placées pour suivre ce genre de réalités mais les chiffres publiés, s'ils amènent à réfléchir, doivent être placés dans le contexte réel de terrain: quelles étaient les situations cliniques, quels étaient les facteurs de risque ...?", commente un de nos lecteurs, le Dr Bernard Basseleer, expert en qualité des soins. "On trouve autant en pédiatrie qu'en gériatrie des articles qui vont dans les deux sens: surmédicalisation ou sous médicalisation. Le sujet est très intéressant. Mais les contextes médico-sociaux sont-ils toujours les mêmes, les médecins ont-ils les mêmes cultures médicales, les disponibilités de médicaments sont-elles les mêmes, etc. ? La surmédicalisation provient parfois aussi du "shopping médical" que font les patients: le nombre de prescripteurs pour la même maladie peut aussi être utile à connaître."