Test-Achats vient de livrer les résultats de son enquête sur les services d’urgences de 33 hôpitaux en Wallonie et à Bruxelles. Mais que faut-il penser de ce genre de classement? Le Spécialiste reprend le tableau des résultats et les réactions de responsables d’Unessa, de l’ABDH et de Santhea.
Test-Achat vient de dévoiler une enquête à laquelle ont pris part plus de 5.200 Belges sur leur expérience avec les services des urgences. Il en revient que le temps d'attente moyen est de 3 heures, qu’un patient sur trois a d’abord consulté un généraliste pour son problème avant de se rendre à l’hôpital. «Ceux qui se sont rendus directement aux urgences l’ont fait parce que l’hôpital est mieux équipé (32%), parce que le généraliste n’avait pas de consultations à ce moment (20%), parce que le personnel hospitalier a plus d’expérience avec les cas difficiles (17%) ou parce que l’hôpital est plus proche géographiquement (15%)», constate Test-Achat. Selon l’étude, ce que les gens apprécient le moins, c’est le délai avant d’être reçu par un médecin, ou avant de passer des examens complémentaires. Les patients associent souvent l’urgence à la douleur, alors qu’il ne s’agit pas nécessairement d’une véritable urgence. Sur dix patients qui se présentent aux urgences, neuf font état de «douleur» mais la moitié d’entre eux n’ont pas pris le moindre antidouleur. Parce qu’ils sont «contre» les médicaments analgésiques ou parce qu’ils ont peur de polluer le diagnostic.
Enfin, sur base de six critères, l’association de défense des consommateurs a établi un classement de 33 centres hospitaliers wallons et bruxellois (voir tableau).
«De manière générale, la satisfaction au sujet des services d’urgences est plutôt grande, bien qu’il y ait de petites différences entre hôpitaux en Wallonie et à Bruxelles», commente Test-Achats. Les deux services des urgences les plus appréciés sont ceux du Centre Hospitalier Universitaire de Dinant-Godinne-Yvoir et de l’Universitair Ziekenhuis Bruxelles-Jette. «Les patients s’y réjouissent des temps d’attente pas trop longs, ainsi que de la compétence des personnels soignants et administratifs.»
A l’autre bout du classement, on trouve le Centre Hospitalier EpiCURA à Ath et le Centre Hospitalier de Wallonie picarde à Tournai. «Nos répondants y ont particulièrement regretté la longueur des temps d’attente et l’insuffisance de l’information médicale», note Test-Achats. Malgré ces différences, les résultats sont relativement proches les uns des autres. «Si un hôpital se situe en bas du tableau, ça ne signifie pas pour autant qu’on n’y est pas bien pris en charge», conclut l’association de défense des consommateurs. Il précise aussi que si un hôpital ne se trouve pas dans la liste , c'est que les informations à son sujet n'étaient pas assez nombreuses pour être significatives.
Ne pas céder à une mode
Pour David Lefèbvre, directeur général adjoint d’Unessa, ce type de classement a le vent en poupe: «L’opinion publique, surtout via les médias sociaux, est friande de ce type de communication. Il faut toutefois s’interroger sur son objectif final et les conditions dans lesquelles ces classements sont réalisés. Même si Test-Achats est certainement digne de confiance dans son approche, quid de l’utilisation de critères d’évaluation standardisés et reconnus? Attention à ne pas tomber dans un Trip Advisor des hôpitaux». Il rappelle que beaucoup d’hôpitaux belges se sont lancés dans des programmes d’accréditation. «Ils couvrent tous les aspects du fonctionnement d’un hôpital: les soins, l’hôtellerie, la gestion des déchets, l’accueil des patients, la ventilation, les procédures d’évacuation… En outre, dans le cadre du contrat P4P (Pay for performance), l’objectif est de standardiser d’ici 2021 la mesure de l’expérience patients et de rendre publics les résultats. Des échelles validées comme les PREM et le PROM seront à terme introduites.» Enfin, il souligne également le rôle de la PAQS, dans l’amélioration continue de la qualité dans les soins de santé. «Nous croyions donc nettement plus dans toutes ces initiatives et ne sommes pas favorables à ce type de hit parade.»
La méthodologie
De son côté, Paul d’Otreppe, président de l’association belge des directeurs d’hôpitaux, trouve cela bien même s’il reconnaît que c’est aléatoire: «Cela n’a évidemment pas la qualité d’une profonde analyse scientifique mais je trouve cela sain».
Par contre, dans un article paru dans La Libre Belgique, Denis Herbaux, directeur étude et qualité pour Santhea, se veut plus nuancé: «Même si l’on savait parfaitement mesurer les choses et comparer les hôpitaux entre eux, rien ne dit que les indicateurs ou les données utilisés seraient suffisamment objectifs». Le débat est loin d’être clos.