Health Data Agency: gendarme des données de santé ou passe-plat?

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Ce 17 janvier, l’Agence fédérale des Données de Santé a eu droit à une séance inaugurale officielle avec le ministre Frank Vandenbroucke. Comment fonctionnera-t-elle? Selon quelles modalités, quels objectifs? Qu’en en attendre en 2024?

Entérinée par une loi voici déjà près d’un an, l’Agence fédérale des Données de Santé (ADS) vise à “faciliter l’accès et la réutilisation secondaire des données de santé”. Une utilisation plus systématique, bien que strictement encadrée, qui est sensée favoriser une amélioration et objectivation du système de santé, contribuer à l’innovation, à la recherche, au développement de produits et à la formulation des politiques.

Alors que ce principe d’“utilisation secondaire” des données de santé, au-delà donc de l’objectif premier des soins, s’impose de plus en plus, où les acteurs et finalités se multiplient, où des encadrements (européens notamment) se précisent, quel sera le rôle de l’ADS est? Quelles seront les garanties d’usage(s) pertinent(s)?

Et, tout d’abord, de quelles données parle-t-on? Données hospitalières, péri-médicales, générées par le patient…? Les types de données concernés sont potentiellement divers et variés. Les membres-fondateurs de l’ADS (Sciensano, INAMI, SPF Santé publique, KCE, AFPMS) ont en effet défini un “modèle permettant de cartographier les grands ensembles de données visées : santé, pathologies, équipements et produits médicaux, déterminants de la santé, activités liées, etc.”

Nicolas Dubois, Program Manager à l’ADS, précise : “Les données stockées et directement partagées par l’ADS sont par nature ouvertes, publiques ou complètement agrégées et anonymisées. L’objectif est de pouvoir faciliter l’échange de données de n’importe quel acteur du secteur de la santé qui détiendrait des données demandées par une personne légitime à disposer de ces données.”

A la fois pour justifier son rôle de “faciliitateur d’accès et d’échanges” de données de santé et apaiser les réticences, voire les levées de boucliers, que sa création a suscité dans les rangs des professionnels de santé, l’ADS met en exergue différents mécanismes et ressources mis en oeuvre. “L’Agence ne disposera physiquement d’aucune donnée qui nécessite une sécurisation spécifique. L’architecture technique actuelle est assez simple. Essentiellement, un catalogue de données et une plateforme permettant le partage de fichiers, pour autant qu’ils répondent aux critères légaux imposés. 

Le contenu de ce catalogue se veut par nature aussi conforme que possible aux standards européens en cours de développement, par exemple DCAT-AP [format de métadonnées pour ensembles de données ouvertes] facilitant l’interopérabilité des données et les échanges machine-to-machine.”

Autres “outils” et leviers de “facilitation” de l’ADS : gestion des impacts juridiques, “support actif des demandes d’accès aux données par une équipe dédiée qui analysera les demandes, les décomposera et aidera à la mise en relation entre détenteurs et utilisateurs de données” et une Académie ADS, “plateforme et organe de partage de contenus, de connaissances et de formations”. On y trouvera “des contenus éducatifs sur divers sujets: aspects juridiques, introduction à l’ADS et ses services, méthodes et bonnes pratiques dans la data, interopérabilité et fairness, etc). La plateforme se veut un catalyseur de contenus, même hébergés ou créés par d’autres entités. Nous ne voulons pas réinventer la roue sur tous les sujets. Il faut aider les experts à se connecter entre eux et répandre leurs idées.”

Gendarme ou passe-plat?

La pertinence et légalité des utilisations visées sont évidemment essentielles. L’ADS jouera-t-elle le rôle de “gendarme” ou “contrôleur” des identités des demandeurs et de la destination des usages ? “Dans beaucoup de cas, la demande ou le besoin ne sont en effet pas suffisamment clairs. Une procédure d’analyse des demandes sera donc mise en oeuvre, commençant obligatoirement par une identification claire du demandeur, du contexte et de la portée de sa demande, ainsi que de sa finalité.

Le processus d’acceptation et de conformité avec les règles juridiques applicables est intégré dans les procédures de l’agence. En clair, l’Autorité de Protection des Données jouera son rôle là où il est exigé et ne s’y substitue pas. Nous évaluons néanmoins la possibilité d’accélérer ou de faciliter le traitement des dossiers qui nécessitent une telle intervention.”

Pour apaiser les craintes et réticences suscitées par la création de l’ADS, l’agence insiste sur le fait qu’elle s’alignera scrupuleusement sur “le cadre, les règles et les avancées poussées au niveau européen (European Heath Data Spaces…)”.

Le comité des utilisateurs (réunissant des représentants du secteur de la santé) aura également un rôle à jouer. Des groupes de travail, constitués en son sein, seront chargés de “missions particulières, auxquelles participeront des experts nommés par les membres [de l’ADS]”.

Au programme de 2024

Que peut-on attendre de l’ADS en 2024 ? De premières réunions des organes de gouvernance (comités de gestion et d’utilisateurs), création des premiers groupes de travail, ouverture du service de support, sélection de la plateforme opérant comme “catalogue”, accueil de nouveaux détenteurs de données, étoffement des contenus (catalogue, HDA Academy).

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