Bernard Antoine signe, avec « Aquam », son deuxième roman quelques années après « Pur et nu » (2018) qui reçut le prix Saga Café et le prix des bibliothèques de Bruxelles. Ce roman entrecroisait déjà les liens de l’Histoire et de la fiction (les Brigades rouges).
Dans cet ambitieux nouveau roman , « Aquam », l’auteur, sans le déclarer, rend aussi hommage à cette immense littérature américaine qui, à travers quelques personnages, prend en charge l’époque, les lieux, le temps, les générations et l’espace où courent les hommes en tous sens. L’infini de l’espace et l’infini besoin des hommes de se projeter hors de la limite de leur histoire personnelle font la matière de cet ambitieux roman où le panoramique accueille les gros plans.
« Aquam » est un roman cardiaque, ses pulsations intimes ont besoin de grands espaces pour aspirer l’air de l’Histoire et l’écriture de l’auteur, féroce, sensible, marquée par les machinations des visions des personnages, produit une énergie romanesque de haut vol.
En 1914, dans la vallée mosane, Jean-Baptiste, un jeune garçon de quatorze ans assiste au massacre de sa famille et regarde yeux dans les yeux l’officier allemand responsable de cette horreur. Par la suite, la population se venge et massacre elle aussi les responsables mais l’officier responsable échappe à la revanche et on le verra réapparaître, bien plus tard, dans son cercueil démembré, alors que les eaux se déchaînent en 2027 dans cette même vallée.
L’architecture romanesque de « Aquam » nous mène dans des alternances de chapitres d’une période (guerres de 1914-18 et 1939-45) à une époque à peine futuriste (2025- 2027) dans la vallée Mosane où eurent lieu les épisodes tragiques qui inaugurent le roman.
Dans la période « post » d’un futur si proche qu’il échappe à un trop grand effet d’étrangeté, on retrouve des demi-folles illuminées, des mystiques, des complotistes, des manipulateurs et tout ce que cette période de dérégulation accouche comme monstres de la lucidité verrouillée. Une gigantesque inondation (Aquam) va remettre en scène, dans cette Histoire funeste et grotesque, les questions d’un monde obsédé par sa fin.
Le déclin est au cœur de ce roman celui qui annonça le nazisme, celui qui tourmente notre époque post moderne, mais aussi le déclin d’une humanité dans l’incapacité à renoncer aux vengeances qui font l’Histoire.
Un grand livre porté par un souffle et une vitalité romanesque hors du commun !
Editions Murmure des soirs,
466 pages
ISBN 978-2-930657-82-0
22 €