Je suis interpellé par la Une du dernier numéro de Medor de ce 04/09/18 «ces médecins qui trinquent» , où on décrit une surconsommation d’alcool chez 18% de médecins contre 10% dans la population générale. Les raisons potentielles liées au métier y sont décrites (stress , responsabilités, pression émotionnelle,etc.) et je ne peux qu’y souscrire. Sans jugement de valeur sur le statut de cette surconsommation chez les médecins, je me pose néanmoins la question de son inscription dans une tendance beaucoup plus sociétale et surtout des modalités de prévention et d’action que nous pouvons mettre en place face à de telles addictions.
Etre addict , c’est tendance ? Le terme addiction est si répandu aujourd’hui, qu’il en devient presque banal. Le rapport aux produits est toujours plus diversifié et l’on fait preuve de beaucoup d’inventivité dans le domaine : drogues dures et alcool bien sûr, mais on parle aussi maintenant d’écrans, de smartphone, de sexe, des jeux en ligne et de hasard, du sucre même ! Depuis plusieurs années, les comportements de consommation évoluent et les pratiques commerciales, toujours plus agressives et ciblées, banalisent certains usages. Toutes les couches de la population sont concernées, jeunes ados ou seniors, hommes, femmes, employés, chômeurs, médecins à l’occasion, on l’a vu... Et cela alors même que, paradoxalement, les messages de prévention n’ont jamais été aussi visibles et semblent prêcher dans le désert (« l’abus d’alcool nuit à la santé », « fumer tue ! »).
Cette thématique des addictions est centrale dans notre société contemporaine poussée par une recherche constante de plaisir, d’immédiateté et de performances. Elle témoigne des difficultés à faire face à l’abondance de l’offre que ce soit en matière d’alimentation, de drogues, d’objets connectés ou d’une tentative de réponse au stress ambiant. Cette confrontation appelle à la réflexion, car ce problème de santé publique dispose de possibilités d’intervention. C’est en abordant la question de façon globale et ouverte, à la fois sur le plan de la santé, de la prévention et en matière de réflexion sociétale avec l’ensemble des participants à la société elle-même, que l’on peut envisager de travailler à différents niveaux.
Bref, je pense qu’il y a une nécessité urgente de concertation et de prise de responsabilités autour de ces phénomènes via la prévention, l’information, la législation et le traitement actif. Pourquoi pas réunir autour de la table des philosophes, des sociologues, des enseignants, des psychiatres, des médecins et des soignants de tous bords qui s’interrogent sur cette évolution. Le résultat ? La création d’un forum d’échanges , ouvert à tous : le professionnel de la santé à la recherche de nouvelles pistes de traitement tout autant que les parents démunis d’un enfant en décrochage ou encore l’usager lui-même, en effet, quel meilleur expert que celui qui vit la dépendance de l’intérieur ?
C’est pourquoi, j’ai lancé l ‘idée organiser un forum « addiction et société » . c’est un pari qui est rapidement apparu pour beaucoup comme une évidence. L’objectif est de créer des ponts pour aboutir à l’élaboration de réponses adaptées en lien avec le contexte social, culturel, politique et économique dans lequel ces comportements s’inscrivent.
Offrir,enfin, un lieu de rencontres et de débats pour arrêter de seulement dénoncer mais aussi passer à l’action. Une initiative d’actualité dans un monde qui doit ré-inventer de nouveaux repères ?
Le forum « addiction et société »aura lieu à Bruxelles, le 16 et 17 octobre prochain.
> Informations et inscription : www.addictionetsociete.com