L’Agence Fédérale des Médicaments et des Produits de Santé (AFMPS) a récemment fait état de l’augmentation de l’usage des Programmes de Soutien aux Patients (PSP), en Belgique, ces dernières années.(I)
Les PSP visent à offrir aux patients une assistance qui se veut spécifique au traitement prescrit. Ils sont aujourd’hui développés par les firmes pharmaceutiques et mis en place grâce aux professionnels de la santé (médecin prescripteur, pharmacien, infirmière à domicile). En termes de pathologies, les PSP peuvent être utilisés dans divers domaines (tels que cancer, fibrose pulmonaire, polyarthrite rhumatoïde, insuffisance rénale) en vue de faciliter l'accès, la familiarisation et l’adhérence du patient au traitement qui lui est prescrit.
Bien qu’ils soient déjà proposés aux patients par certains professionnels de la santé, et aujourd’hui financés quasi exclusivement par l’industrie pharmaceutique, ces programmes ne font l’objet d’aucune législation particulière en Belgique. Toutefois, une initiative législative est attendue prochainement.
La situation actuelle (Belgique et Union Européenne)
Il n’existe pas, au niveau européen, de définition commune des PSP qui mettrait l’accent sur l'accès, la familiarisation et l’adhérence des patients à leur traitement. L’agence européenne des médicaments (EMA) considère les PSP uniquement sous l’angle de la pharmacovigilance et de la collection de l’information relative à l’usage des produits. Il n’est donc pas question, à ce stade, d’initiative européenne visant à mettre en place une base commune pour la règlementation des PSP au-delà de la question de la sécurité des produits après leur commercialisation.
Or, les PSP touchent à de nombreuses questions autres que la pharmacovigilance, telles que, notamment, celle de l’information et de la publicité (qui, rappelons-le, est interdite à l’égard du public pour les médicaments soumis à prescription), les programmes de minimisation des risques, la liberté thérapeutique du médecin (et l’interdiction d’influencer son comportement de prescription) et les droits du patient.
À l’heure actuelle, c’est donc notamment à cheval entre ces différentes thématiques juridiques qu’évoluent les PSP en Belgique, en l’absence d’un cadre règlementaire spécifique. pharma.be précise utilement qu’un PSP peut consister en toute une série d'activités clairement définies, telles que la formation du patient, l'administration d'un médicament, les soins à domicile, l'assistance thérapeutique, la promotion de l’adhérence au traitement et/ou l'utilisation appropriée.
L’évolution législative attendue
Un groupe de travail a été mis sur pied au niveau de la Commission des Médicaments à usage Humain (CMH) de l’AFMPS. Il est attendu qu’il se penche sur les critères d’acceptation des PSP, la question des bénéfices qu’ils présentent à l’égard des patients, la comparaison avec les systèmes existant ailleurs en Europe et, bien entendu, la définition de ce qu’il faut entendre par un "PSP" et les services qui y sont relatifs.(II)
Des représentants des professionnels de la santé seront amenés à être impliqués dans ce type de programme (notamment les médecins et les pharmaciens) et des associations de patients devraient notamment composer ce groupe de travail.
Parmi les questions à trancher, il sera intéressant de connaître l’étendue des pouvoirs qui seront attribués à l’AFMPS afin de contrôler la mise en place des PSP sur le marché belge et si, à l’instar de ce que suggère l’association de l’industrie pharmaceutique au Royaume-Uni (ABPI), un PSP requerra un contact direct ou une interaction directe entre le patient et son professionnel de la santé (excluant, par exemple, le télé-monitoring ou autres contacts à distance au moyen d’applications mobiles). Un PSP pourrait en effet être soutenu par divers moyens didactiques, allant de l’usage de la technologie (smartphone, sites internet, chat, tablette numérique) aux brochures et "flyers" plus classiques.
Le rôle des professionnels de la santé
Il faut s’attendre à ce que les PSP se limitent, du moins dans un premier temps, à certains médicaments sur prescription. Ils devraient toutefois, selon l’AFMPS pouvoir être offerts à tous les patients éligibles, sur recommandation du médecin prescripteur qui serait en charge d’évaluer si le patient répond aux conditions pour bénéficier du programme.
L’implication des pharmaciens sera également essentielle au bon fonctionnement du système des PSP, puisque ces derniers sont le dernier maillon de la chaîne et délivrent la spécialité pharmaceutique au patient avec les conseils relatifs à son usage. Ils devraient donc être en mesure d’alerter un patient sur l’existence d’un PSP lors de la délivrance du produit, notamment sur la base des informations dont ils disposent grâce au dossier de santé électronique.
Dans la mesure où les firmes fabriquant ou distribuant les médicaments ne seront probablement pas en mesure d’entrer en contact avec les patients (et ne pourront en aucun cas influencer l’usage des PSP ou la prescription/délivrance des médicaments vis-à-vis des médecins/pharmaciens), l’intervention d’une partie tierce jouant le rôle d’un intermédiaire prend tout son sens. Il faut s’attendre à ce que ces tiers indépendants organisent les aspects pratiques des PSP et prennent en charge la formation des prestataires à leurs spécificités, à l’information du patient et à la pharmacovigilance. Les responsabilités de ces tiers, leur statut, leur formation et les garanties éthiques qu’ils devront pouvoir démontrer seront des aspects clés à la réussite de l’encadrement des PSP et à leur mise en place en synergie avec les professionnels de la santé.
[i] Environ 40 PSP ont été dénombrés sur le marché belge en 2015, contre environ 80 PSP en 2016.
[ii] Hugues Malonne, Sarah De Clercq ,"Patient Support Program: Where are we now?", BRAS Presentation, 24 October 2017, 40–41.