Les universités francophones tirent la sonnette d’alarme face au risque d’effondrement

Les principales universités de la Fédération Wallonie-Bruxelles expriment leur profonde inquiétude au moment où les principaux ministres du gouvernement de la Fédération entament ce week-end un conclave budgétaire pour définir la trajectoire de l’année prochaine. Dans une carte blanche qui devrait être publiée dans Le Soir, elles alertent sur un « avenir sombre » pour l’enseignement supérieur francophone.

Selon les signataires – des professeurs éminents de l’ULiège, l’ULB, l’UCLouvain, l’UNamur et l’UMons –, la combinaison de plusieurs réformes et évolutions menace directement l’efficacité et l’attractivité des universités : diminution progressive des moyens par étudiant, remise en cause du soutien à la recherche, et réforme des pensions qui pourrait entraîner une baisse de 30 à 40 % des montants perçus.

Un moteur économique fragilisé

Les auteurs rappellent l'importance stratégique des universités pour le développement économique d’une région, en citant le Prix Nobel Paul Romer : « Une région prospère est une région qui forme du capital humain de haut niveau et qui est capable d’intégrer la science et l’innovation dans son économie. » Sans universités fortes, avertissent-ils, la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) risque un décrochage durable, tant sur le plan économique que scientifique.

Un écart grandissant avec la Flandre

Ils insistent également sur la concurrence internationale exacerbée pour attirer les meilleurs talents scientifiques. Faute de conditions de travail attractives, les universités francophones peinent à recruter les chercheurs de haut niveau, alors que, de l’autre côté de la frontière linguistique, les universités flamandes bénéficient de moyens nettement supérieurs. Les crédits d’installation pour les nouveaux professeurs atteignent ainsi 100 000 euros en Flandre, contre à peine 2 500 euros en Fédération Wallonie-Bruxelles.

La comparaison est tout aussi frappante au niveau des investissements publics en recherche. La Communauté flamande consacre aujourd'hui environ 1 598 millions d’euros par an à la recherche universitaire, soit 0,88 % de son PIB, tandis que la Fédération Wallonie-Bruxelles n'y consacre que 655 millions d’euros, soit 0,55 % du PIB. Cet écart de financement se traduit par des infrastructures plus modernes, des projets de recherche mieux dotés, et une capacité renforcée à attirer les talents internationaux en Flandre.

Des menaces sur la recherche francophone

Par ailleurs, la survie du Walloon Excellence Research Institute (WELRI), créé en 2019 pour soutenir la recherche stratégique en nouvelles technologies et biotechnologies, est également menacée. Son financement annuel de 24,75 millions d’euros pourrait être drastiquement réduit, alors qu’il avait précisément été instauré pour tenter de combler le retard par rapport aux investissements flamands, estimés à 200 millions d’euros annuels dans les secteurs stratégiques dès 2019.

Les craintes exprimées portent aussi sur des réformes fédérales en cours, notamment la modification du régime de dispense de précompte pour les chercheurs, qui pourrait entraîner de graves conséquences financières pour les universités, le F.R.S.-FNRS et les hôpitaux universitaires francophones. Le risque de « faillite » est explicitement évoqué.

Un coup fatal sur les pensions

Enfin, la réforme des pensions est qualifiée de « coup fatal » pour les universités francophones. Elle frapperait de plein fouet les académiques, qui, du fait d’entrées tardives dans la carrière, verraient leurs pensions s'effondrer, sans qu'un second pilier de retraite soit sérieusement envisagé du côté francophone, contrairement à la Flandre où un dispositif complémentaire est prévu pour amortir les effets de la réforme.

Un appel à éviter un effondrement irréversible

Les professeurs estiment que ces réformes, cumulées, entraîneront un effondrement rapide et irréversible de la qualité de l’enseignement et de la recherche universitaire en FWB, compromettant gravement l’avenir économique de la région.

Ils appellent les responsables politiques de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de la Région wallonne à prendre la pleine mesure du désastre annoncé et à faire preuve du courage nécessaire pour sauver les universités francophones, « condition sine qua non d’un avenir prospère pour notre région ».

> Lire l'intégralité de la carte blanche

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