Environ 10 % de mortalité en plus après une opération un vendredi

Le taux de complications et de mortalité est-il plus élevé pour les patients opérés un vendredi par rapport à ceux opérés un lundi, en raison de l'effet week-end ? Selon une étude américaine publiée récemment dans le JAMA et basée sur une analyse de cohorte canadienne, la réponse semble être affirmative.

Les patients opérés juste avant le week-end ( ou un jour férié ) présentent un risque accru de décès dans les semaines et mois suivants par rapport à ceux opérés juste après le week-end. D’après les données d’une analyse américaine, la différence de mortalité atteint environ 10 %.

Les patients hospitalisés durant le week-end bénéficient souvent d’une qualité de soins moindre, en raison d’une réduction des effectifs et du report de certaines interventions à la semaine suivante. De nombreuses études ont déjà mis en évidence cet effet week-end, qui impacte négativement les résultats des patients nécessitant un traitement en fin de semaine. En chirurgie, c’est principalement la prise en charge postopératoire qui est affectée, bien que les données valides sur ce phénomène restent limitées, selon une équipe de chirurgiens dirigée par le Dr Sanjana Ranganathan du Houston Methodist Hospital, aux États-Unis.

Un risque accru selon une analyse canadienne

Sur la base d’une analyse des registres de santé canadiens, ces chercheurs ont conclu qu’il existait une différence significative entre une intervention réalisée un vendredi, suivie d’un séjour hospitalier pendant le week-end, et une intervention pratiquée un lundi. L’étude de cohorte portait sur 429 691 patients ayant subi 25 interventions chirurgicales courantes en Ontario, au Canada. Après une opération un vendredi, le taux de mortalité à moyen et long terme était environ 10 % plus élevé qu’après une opération un lundi.

Toutefois, il n’est pas clairement établi si cette surmortalité est due à une prise en charge de moindre qualité durant le week-end ou au fait que les chirurgiens opérant le lundi sont plus reposés qu’après une semaine de travail chargée.

Un taux de complications en hausse de 5 % après une opération un vendredi

L’équipe du Dr Ranganathan a réparti les patients en deux groupes : environ 47 % ont été opérés juste avant le week-end, généralement un vendredi, tandis que les autres ont été opérés juste après, majoritairement un lundi.

Les patients opérés avaient en moyenne 59 ans, et 63 % d’entre eux étaient des femmes. L’âge moyen des chirurgiens était de 49 ans, avec une majorité écrasante d’hommes (86 %). Un tiers des interventions concernait la chirurgie orthopédique, suivie de la chirurgie générale non spécifiée (32 %) et de la chirurgie gynécologique (14 %). Il n’y avait pas de différences majeures entre les opérations du vendredi et celles du lundi en ce qui concerne ces paramètres, bien que les chirurgiens du vendredi aient, en moyenne, trois ans d’expérience de moins (14 ans contre 17 ans).

L’objectif principal de l’étude était d’analyser la mortalité, les complications et les réhospitalisations sur différentes périodes de suivi. Ces événements sont survenus dans 8,5 % des cas après une intervention un vendredi, contre 8,1 % après une opération un lundi. Cela correspond à une augmentation relative de 5 %, principalement due à une hausse des complications et des réhospitalisations, chacun représentant environ 4,3 % des cas. De plus, les patients opérés un vendredi restaient en moyenne plus longtemps à l’hôpital (3,5 jours contre 3,3 jours pour ceux opérés un lundi).

Une mortalité significativement plus élevée après une opération un vendredi

Dans le premier mois suivant l’intervention, 0,16 % des patients opérés un vendredi sont décédés, contre 0,15 % des patients opérés un lundi. Bien que la différence absolue soit minime, elle correspond à une augmentation significative de 9 % de la mortalité après une chirurgie effectuée juste avant le week-end.

Des différences similaires ont été observées après 90 jours et après un an. Au bout d’un an, 1,44 % des patients opérés un vendredi étaient décédés, contre 1,30 % pour ceux opérés un lundi, soit une différence relative de 12 %, après prise en compte des facteurs confondants. À 90 jours, la mortalité était 10 % plus élevée pour ceux opérés un vendredi. Concernant l’objectif principal de l’étude, les différences relatives entre les groupes atteignaient environ 6 % et 5 % en faveur des opérations du lundi après 90 jours et un an, respectivement.

Des causes systémiques en question

Les auteurs soulignent que ces résultats s’expliquent probablement par des facteurs systémiques. Parmi les éléments en cause figurent la réduction des effectifs, la moindre disponibilité des spécialistes expérimentés et un accès limité aux examens diagnostiques ou aux interventions durant le week-end. Ils appellent ainsi les établissements de santé à repenser leurs structures de soins périopératoires afin d’assurer une qualité de prise en charge homogène, quelle que soit la journée d’intervention.

Un problème qui mérite également d’être étudié dans le contexte belge, même si les chiffres ne sont pas directement transposables. Toutefois, la pression croissante sur les effectifs hospitaliers en Belgique suggère que le risque accru de mortalité lié à l’effet week-end est une réalité à prendre en compte.

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