A la lecture des résultats de l’enquête sur l’adoption de l’intelligence artificielle dans les hôpitaux en Belgique,
Mathieu Michel, secrétaire d’Etat à la Digitalisation, chargé de la Simplification administrative, de la Protection de la vie privée, et Giovanni Briganti, co-directeur d’AI4Health (AI4Belgium), sont revenus sur l’urgence d’agir en la matière.
Mathieu Michel: «La Belgique va devenir une Smart Nation. L’intelligence artificielle est une priorité. Le défi du digital, ce n’est pas dans 10 ans que l’on doit le réussir, c’est maintenant. Le digital va influencer le temps et la proximité. Pour moi, l’intelligence artificielle dans le domaine de la santé est une immense opportunité. Cela donnera au médecin la capacité, à un moment donné, de récupérer du temps pour des tâches essentielles qui permettront d’améliorer la qualité des soins au patient.»
Vous y voyez un autre aspect essentiel?
M.M.: «Le développement d’un modèle économique dans les hôpitaux sera nécessaire. Cette réflexion doit amener des aides à une meilleure gestion des hôpitaux. Évidemment, l’éthique ne peut être oubliée. L’intelligence artificielle n’est pas une fin en soi. Elle doit avoir un but qui doit être identifié de façon prioritaire au regard d’un besoin qui l’est tout autant. Le mot ‘agir’ est essentiel. On doit mener des actions concrètes.»
Est-ce vraiment le bon moment pour agir?
Giovanni Briganti: «Tout à fait! En IA, aujourd’hui, on a des solutions qui sont développées. Il faut innover en rapprochant l’entreprise de l’hôpital. Les logiciels doivent être développés en cocréation avec l’hôpital et avec le milieu académique. On va devoir aussi mener des études cliniques qui vont mesurer l’impact sur le bien-être du patient, sur la santé, sur la sécurité. Le secteur public va aussi jouer son rôle dans ce développement.»
Le monde politique est-il prêt?
M.M.: «Le politique passe parfois trop de temps sur les stratégies. On sait aujourd’hui ce qu’il faut faire. Les médecins, les hôpitaux et les acteurs de terrain de la santé ont identifié des priorités comme par exemple dans l’imagerie médicale… Le politique doit donc arriver très rapidement sur l’identification des projets structurants. Mon objectif, ma mission est d’interconnecter les acteurs qui ne se parlent peut-être pas assez aujourd’hui. Je veux briser des silos et favoriser le rapprochement des compétences. Ma priorité, c’est la connexion entre le besoin d’un médecin, d’un hôpital et la recherche. Au milieu de cela, le pouvoir public doit jouer son rôle de régulateur. On ne peut pas tout laisser au secteur privé.»
Le médecin sera-t-il au cœur de l’innovation?
G.B.: «Le médecin va se trouver au milieu d’une stratégie d’innovation qui va viser à améliorer son travail et sa qualité de vie au travail qui sera moins administrative. Il pourra se centrer sur le patient. Son processus de décision va également être changé. A l’avenir, une partie des tâches du médecin va être confiée à l’intelligence artificielle. Le médecin restera toutefois le maître de l’activité médicale dans le secteur où il y a un vrai contact entre le médecin et le patient. La priorité est donc d’identifier des projets, comme le volet administratif de la pratique médicale, qui peuvent rapidement impacter positivement l’activité de tous les médecins. À partir de là, les directions d’hôpitaux, les médecins et les patients percevront la
valeur ajoutée de l’intelligence artificielle.»
L’IA va-t-elle vraiment permettre de diminuer la charge administrative des médecins notamment?
M.M: «Un médecin n’a pas fait des études de médecine pour entrer des formulaires. J’entends notamment pouvoir être un aiguillon en matière de simplification. Cela devra se faire en totale concertation avec le SPF Santé publique évidemment. Je veux pouvoir aider le médecin à se recentrer sur le métier qu’il veut faire et pas celui qu’il ne veut pas faire.»
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