Catherine Fonck : « La concertation Médicomut devient de plus en plus une concertation de façade »

Alors que la Dr Catherine Fonck aborde sa dernière année politique, elle entend encore peser chaque jour sur les politiques de santé. Députée fédérale, Présidente du groupe « Les Engagés » à la Chambre, elle fait sa rentrée et est très inquiète quant aux forces de travail médicales insuffisantes pour les 20 prochaines années.

« La situation sera plus grave du côté francophone. Il suffit de lire sérieusement le rapport sur la planification des spécialisations pour le comprendre. En Communauté française, d’ici 2041, seules 8 spécialisations sur 30  seront dans le vert et en Communauté flamande, 14 spécialisations sur 30. Toutes les autres seront en pénurie»

Pour elle, il est donc « urgent de modifier le système des quotas Inami et d’assurer une grande qualité de formation pour tous les jeunes médecins.  De bonnes conditions de stages sont donc importantes. Sans oublier d’offrir aux maîtres de stages le temps de bien encadrer les assistants. »

Vous êtes aussi préoccupée à propos de la médicomut ? Le ministre ne concerte plus selon vous ?

« J’appelle le ministre à un véritable respect de la concertation médico mut. Elle devient de plus en plus une concertation de façade. Dans la réalité, le ministre fait ses choix y compris budgétaires en amont, de manière unilatérale avec le gouvernement, ce qui restreint fortement l’espace de négociations en Médicomut. Cela pose un vrai souci. Cette démarche n’est pas bonne si l’on veut garder en Belgique une coconstruction  de la santé publique par les différents acteurs. »

Les réformes avancent bien selon vous ?

« Le ministre a lancé différents groupes de travail sur la nomenclature ou sur le financement des hôpitaux ...mais il a décidé maintenant de ne plus respecter ce processus en imposant des économies immédiates comme par exemple en radiologie et en biologie clinique. Il s’agit là encore de décision unilatérale qui bafoue la concertation. Je crains qu’il le fasse pour d’autres spécialisations aussi. »

Vous parliez de Médicomut, ne doit-elle pas évoluer dans son animation ?

«Actuellement, nous avons peu de femmes investies dans la Médicomut dans le domaine médical. Avec les moyens modernes de communication pour les réunions à distance, on doit pouvoir organiser autrement ces réunions à des heures raisonnables. D’autant que les médecins en activité n’ont pas beaucoup de temps. La Médicomut pourrait être rénovée dans son organisation tant pour les femmes-médecins que pour les hommes-médecins qui ne veulent plus de ces réunions interminables. »

Que pensez-vous du débat de ce début de semaine par la mauvaise maitrise du néerlandais ou du français par les futurs médecins chez nous?

« Oui la maîtrise de la langue est importante. Mais l’élément central c’est le recrutement actif de médecins étrangers en raison des pénuries. Je continue à plaider pour une remise en question complète du numérus clausus actuel. C’est surréaliste d’imposer des quotas stricts aux jeunes belges qui veulent se lancer en médecine pendant qu’on donne sans restriction des numéros Inami à des étrangers qui ne parlent pas nos langues nationales. Les malades et les besoins ne vont pas diminuer dans les années qui viennent. On va avoir besoin de plus de médecins et de plus d’infirmiers, c’est une évidence.  Et le taux de renouvellement des jeunes reste inférieur aux médecins qui partent à la pension. Un vrai plan d’attractivité et de rétention des soignants est vital... sans oublier une réforme fiscale pour augmenter le salaire poche. »

Face à ces défis, vous pensez que l’AI va pouvoir aider les médecins ?

« Oui, c’est une aide pour les médecins dans le suivi de la santé au quotidien (prévention des attitudes saines...) mais aussi sur les dépistages radiologiques pour trouver des éléments précis sans oublier dans la formation/apprentissage des médecins...ou dans l’aide au suivi des patients chroniques. »

Un autre dossier vous interpelle actuellement . Le contrôle des pratiques illégales de médecine ?

« Aujourd’hui pour gérer les centaines de dossiers de pratiques illégales de médecins, il n’y a que deux temps plein à l’administration. C’est insuffisant pour protéger les patients. » 

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Derniers commentaires

  • Benoit Collin

    25 aout 2023

    Une réflexion est en cours notamment en médicomut pour moderniser l'organisation des travaux mais ce n'est pas l'INAMI, le ministre ou le gouvernement qui désignent les représentants notamment ici des médecins et qui peuvent donc tendre vers une représentation plus équilibrée en genre, en âge, en diversité médicale. Mais c'est bien la volonté notamment par des horaires plus compatibles.
    Les mesures en imagerie ou en biologie font partie de l'accord actuel ou/et on été concertées dans tous les organes prévus.
    La concertation fait partie de l'ADN de notre système de sécurité sociale comme la gestion paritaire mais cela suppose aussi que chaque partenaire prenne ses responsabilité dans la gestion concertée du secteur au-delà de la défense de ses seuls intérêts. Equilibre difficile mais essentiel au maintien d'une gestion concertée et paritaire, même si le dernier mot revient aux responsables politiques sous le controle du parlement.
    Notre systéme d'assurance santé est au service des assurés pour leur offrir une couverture des frais de santé et des prestations de qualité. Parfois cela demande des mesures de protection comme par exemple en imagerie pour leur permettre d'accéder à des examens nécessaires sans devoir payer des suppléments par manque de prestataires conventionnés. Que cela ne plaise pas à certains prestataires n'empêche pas le bien fondé des mesures de protection et d'accessibilité. L'INAMI va lancer prochainement une vaste concertation pour sur le conventionnement et donc la protection des patients mais sans tabou pour analyser ce qui peut améliorer ou au contraire ce qui aujourd'hui éloigne certains prestataires du conventionnement.

  • HERVE GODISCAL

    24 aout 2023

    c'est incompréhensible qu'il y ait tant de candidats belges au concours et un taux de réussite consternant.
    Par contre c'est encore tout aussi in compréhensible la légèreté avec laquelle sont admis les étrangers de tout bord sur base de je ne sais quelles équivalences ou formations conformes à des directives européennes obscures.
    On parle d'humanités médicales mais sur le terrain pédagogique actuel du secondaire supérieur et des candidatures et du master le niveau est dramatique.