Une vaste enquête menée par le quotidien flamand Het Laatste Nieuws, dont les résultats ont été publiés ce week-end, met une nouvelle fois en lumière les failles du système de soins de santé en Belgique. Celles-ci entraînent une hausse des coûts pour les patients, avec des suppléments pouvant atteindre plusieurs milliers d’euros. La question des réformes est relancée, alors que le secteur y travaille déjà. En réaction, le ministre Frank Vandenbroucke souligne que les hôpitaux doivent miser sur la qualité plutôt que sur le chiffre d’affaires.
Pour son enquête, le quotidien a interrogé des patients, des économistes de la santé, les mutualités et le Centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE). Il a également sollicité 40 hôpitaux ou groupes hospitaliers à Bruxelles et en Flandre sur leurs tarifs et leur situation financière. Dix-sept d’entre eux ont répondu, ce qui appelle à une certaine prudence dans l’interprétation des résultats.
Des coûts en hausse pour les patients
En raison du sous-financement de nombreux hôpitaux, les coûts des traitements, des parkings et des services de cafétéria augmentent. Selon Het Laatste Nieuws, stationner une journée dans un hôpital flamand coûte en moyenne un peu plus de 9 euros, avec certaines exceptions notables. À l’AZ Glorieux de Renaix, le tarif atteint 25 euros. À l’AZ Sint-Vincentius de Deinze et à l’AZ Delta de Torhout, le parking reste gratuit pour l’instant, mais devrait devenir payant à terme.
Les patients doivent aussi assumer davantage de frais en raison de l’augmentation du nombre de médecins déconventionnés et des suppléments d’honoraires. Selon le baromètre hospitalier, ceux-ci ont versé en 2023 jusqu’à 133 millions d’euros pour des suppléments de chambre individuelle, soit 18 millions de plus qu’en 2022.
Des tarifs inégaux
Les hôpitaux appliquent des prix variables pour certains matériaux et facturent parfois des coûts déjà couverts par l’État, ce qui peut conduire les patients à payer deux fois. Les suppléments de chambre accentuent encore cette disparité : selon le journal, le choix d’une chambre individuelle peut multiplier la facture par huit par rapport à une chambre partagée.
Une surconsommation médicale
Selon le quotidien flamand, certains médecins prescrivent davantage d’examens et d’interventions que nécessaire, en raison du modèle de financement basé sur l’acte. Het Laatste Nieuws cite notamment la forte augmentation des opérations du bas du dos. Le comportement des patients est aussi mis en cause : certains consultent plusieurs médecins dans l’espoir d’obtenir un arrêt de travail.
En réaction, Frank Vandenbroucke insiste sur la nécessité pour les hôpitaux de privilégier la qualité à la rentabilité. Une réforme du financement est en préparation afin de mieux protéger les patients et de limiter les suppléments excessifs. Le ministre souligne que cette réforme devrait également alléger la pression sur les médecins, qui ne seraient plus contraints de reverser une partie de leurs revenus aux hôpitaux.
Le gouvernement investit 4 milliards d’euros supplémentaires dans les soins de santé, mais veut en même temps rationaliser l’utilisation des ressources, précise encore Vandenbroucke dans Het Laatste Nieuws. En l’absence de réforme, le risque d’un système de soins de santé à deux vitesses n’est pas à exclure.
Avec la hausse généralisée des coûts, l’un des principes fondamentaux du système de santé est menacé, avertit l’économiste de la santé Dominique Vandijck dans le journal. « Tout le monde doit avoir accès aux meilleurs soins possibles. Les considérations financières ne devraient pas constituer un obstacle aux soins essentiels », prévient-il, évoquant le risque d’une « médecine de village », une expression qu’il qualifie lui-même de marquée.
Selon lui, la multiplication des suppléments d’honoraires complique la situation pour les patients en difficulté financière, qui ne savent plus à quoi s’attendre. « Ils reportent ou renoncent aux soins. La maladie s’aggrave et, à long terme, cela coûte encore plus cher à la société », conclut-il dans Het Laatste Nieuws.