Lors du webinaire organisé par le GBS-VBS au sujet de la réforme des hôpitaux, le Pr Johan Kips est revenu sur un certain nombre de dossiers prioritaires. Un arrêté royal devrait par exemple prochainement venir clarifier les missions respectives des réseaux locorégionaux et suprarégionaux. En ce qui concerne les centres de prise en charge de l’AVC, on attend encore l’avis du Conseil d’État. La biologie clinique et l’imagerie médicale, elles, devraient être réformées à la vitesse grand V.
Rattaché au cabinet des Affaires sociales et de la Santé publique, le Pr Johan Kips s’est arrêté samedi dernier sur la note de Frank Vandenbroucke concernant les réformes du financement hospitalier et de la nomenclature. Nous nous bornerons ici à évoquer deux des cinq grandes lignes de son exposé, celles qui concernent la réforme du paysage hospitalier et la réforme du financement des établissements de soins.
Les raisons qui sous-tendent ces velléités de réformes sont bien connues : le système tel qu’il existe à l’heure actuelle est trop complexe et manque de transparence, les suppléments doivent disparaître et la sécurité tarifaire doit être améliorée. Dans la foulée, il faudrait aussi rectifier les relations pas toujours évidentes entre les médecins et les directions d’établissements, la concurrence devrait céder la place à plus de collaboration et il faudrait parvenir à un système qui incite moins à la surconsommation.
La réforme du paysage hospitalier
Sur ce plan, la priorité est de clarifier les définitions respectives des réseaux locorégionaux et suprarégionaux, a analysé le Professeur Kips, tout en soulignant qu’un AR à ce sujet était en préparation. Chaque hôpital locorégional devra remplir toutes les fonctions locorégionales, en tenant compte d’un temps de transfert maximal pour certaines interventions – on peut citer ici l’exemple des maternités et des recherches déjà réalisées dans ce domaine par le KCE.
Le transfert des soins complexes vers un nombre limité de centres de référence aussi a été initié (cf. les opérations de l’œsophage ou du pancréas + l’extension aux cancers de l’ovaire et de la tête et du cou). La finalisation des centres de niveau S2 pour la prise en charge de l’AVC fait également partie des objectifs, mais on attend encore sur ce point un avis du Conseil d’État. Le concept des centres de traumatologie majeure, lui, attend toujours sa définition concrète.
Ce nouveau paysage hospitalier se doublera d’une réglementation simplifiée pour la TVA, et les laboratoires d’anatomopathologie et leurs services devront être intégrés aux réseaux. Les critères d’agrément globaux devront être soigneusement analysés pour lever les éventuels obstacles à la réforme, et Johan Kips espère que l’évolution vers les DRG pourra également en faciliter certains aspects.
La réforme du financement
Le Professeur Kips souligne que l’hôpital n’est pas un élément isolé et qu’il est important que les soins intégrés, les hôpitaux et la première ligne s’articulent en un tout cohérent. Pour concrétiser cet objectif d’une manière bien lisible, les réseaux devront être inscrits dans une cartographie qui devrait être disponible d’ici la fin de l’année afin de clarifier la position de chacun par rapport au tout, mais aussi dans l’optique d’une conférence interministérielle prévue à ce point dans le temps.
L’objectif sera aussi de passer d’une vision rétrospective du financement à une approche plus prospective et de veiller à ce que la transparence en devienne une composante intrinsèque. Le système reposera sur des forfaits « all-in » par pathologie/DRG qui comprendront aussi certains éléments non strictement médicaux tels que l’encadrement infirmier, les médicaments, les frais de fonctionnement et les dispositifs médicaux. À plus long terme, les facteurs pré- et posthospitalisation devraient également y trouver leur place.
En ce qui concerne le timing, Johan Kips plaide pour une réforme accélérée de la biologie clinique et de l’imagerie. Pour la première, il est surtout question ici des forfaits par DRG et de l’adaptation des lettres-clés. Pour la seconde (appareillage lourd), la réforme se concentrera avant tout sur la subdivision des honoraires en deux parties, l’une couvrant les frais de fonctionnement et de l’appareillage, l’autre les frais médicaux au sens strict. Le Professeur Kips est par ailleurs bien conscient que les prestataires qui prescrivent les examens devront également être impliqués dans cette refonte du système.
En même temps, un mécanisme de responsabilisation sera nécessaire en cas de dépassement budgétaire ; cet aspect est actuellement à l’étude au niveau du KCE. Les éléments non directement liés aux soins devront aussi être plus clairement définis .
Rapport entre médecins et gestionnaires
Le modèle de gouvernance médecins-administrateurs devra également être affiné. La question se pose par exemple de savoir ce que doivent exactement couvrir les honoraires. Des accords sont nécessaires pour la gestion conjointe et le fonctionnement basé sur les recettes des prestations médicales. À plus long terme, Johan Kips pense à un système reposant davantage sur le financement de trajectoires cliniques et sur des paiements groupés. « Dans cette optique, le forfait par DRG serait le maillon fondamental d’une chaîne all-in par pathologie. Les trajets de soins diabète, covid long, soins périnataux, etc. seront développés davantage et l’hospitalisation de jour sera stimulée en mettant l’accent sur les technologies innovantes – je pense par exemple ici aux avancées enregistrées en l’espace de quelques décennies pour le placement des prothèses de hanche, qui nécessitait autrefois 10 jours d’hospitalisation et peut aujourd’hui se faire à l’hôpital de jour. »
Cette tendance s’accompagnera d’une révision du profil des lits hospitaliers (moins de lits aigus, plus de lits chroniques).
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