Lors du Colloque qui fêtait les 10 ans du MoDeS sur le thème « Quel temps pour demain ? » Stéphan Mercier, directeur général du CHU Helora, a évoqué de nombreux sujets majeurs pour l’avenir des hôpitaux dont l'hospitalisation à domicile.
Il a ainsi souligné l’importance d’avoir une vision à long terme dans certains dossiers. En effet, il n’a pas manqué de s’étonner de la manière dont la question financière de l’hospitalisation à domicile n’est pas abordée avec une approche globale pour le portefeuille de tous les acteurs concernés. « Aujourd’hui, il y a une tendance sociétale lourde pour le développement de l’hospitalisation à domicile pour que le patient se retrouve dans son lieu de vie et qu’il se sente mieux. Je le comprends. Toutefois, économiquement, il ne faut pas avoir fait Harvard ou une grande école d’économie pour se rendre compte qu’envoyer des professionnels vers les patients coûte infiniment plus cher qu’envoyer des patients vers des professionnels. »
Des coûts différents
Il s’étonne que cette question ne soit pas abordée avec plus de vigilance et d’approfondissement par les autorités : « Cette question est complètement masquée. Intellectuellement et économiquement, les chiffres ne sont pas regardés avec justesse puisqu’on garde le coût à l’hôpital... comme un coût moyen. On dit par exemple, une journée d’hôpital cela coûte 500 euros. Ce discours n’est pas juste. Une journée d’hôpital, cela ne coûte pas 500 euros pour un patient. Cela coûte 500 euros en moyenne. En effet, un patient de chirurgie cardiaque coûte 5000 euros, un patient en gériatrie représente 300 euros. » (chiffres fictifs)
Par sa démonstration, il entend anticiper une réalité économique implacable qui pourrait avoir inévitablement des répercussions pour le patient et les finances publiques et hospitalières : « Concrètement, au fur et à mesure que l’on va "sortir" des hôpitaux les patients que l’on peut "sortir" médicalement et sur le plan fonctionnel, le prix moyen de l’hôpital va monter. C’est mécanique et inéluctable ! »
Des hôpitaux plus chers
Il est surpris que cette question ne soit pas abordée d’autant plus qu’il entend déjà la petite musique qui va suivre cette réalité de terrain : « Les autorités ou les patients vont venir nous dire que l’hôpital est de plus en plus cher. Ce ne sera pas la faute des gestionnaires hospitaliers, des médecins ou de l’explosion de coûts imprévus... mais tout simplement parce que l’hospitalisation à domicile est mise en place par les autorités sans avoir une vue globale et réfléchie à long terme à propos de son impact financier »
Même s’il a déjà presque tout vu et tout vécu au cours de sa riche carrière à la tête des hôpitaux dans le secteur, il s’étonne encore de ce genre d'approche qui manque d’anticipation : « Je ne comprends pas pourquoi, à ce stade, des éléments aussi basiques que cela, ne sont pas pris en compte et mis sur la table. »
Il précise que son discours n’entend pas remettre en cause la tendance sociale de déplacer le professionnel de santé vers le patient. « Je demande, de manière urgente, de mieux objectiver le coût final parce que ce dernier va être devoir être répercuté, à un moment ou à un autre, sur le patient ou sur les finances de l’hôpital. »
Les autorités et les différents gestionnaires fédéraux ou régionaux ne pourront pas dire qu’ils n’ont pas été prévenus. Un débat qui entre pleinement au coeur de l’actualité électorale et des différents liens à mettre en place entre la première et la seconde ligne...et de l’avenir des institutions hospitalières.