Une enquête réalisée par un syndicat médical allemand met en lumière la profonde frustration des médecins en formation face à des conditions de travail qu'ils jugent insupportables. Ce mécontentement est tel que plus d'un tiers des participants, soit 36 %, ont envisagé de changer de carrière en raison de ces conditions de travail insatisfaisantes.
L'enquête, publiée par notre confrère Ärzte Zeitung , menée auprès de 500 jeunes médecins, révèle des problèmes récurrents tels que le manque de personnel, une surcharge de travail chronique, des difficultés à obtenir du temps libre, un manque de temps pour la formation continue, et un manque de reconnaissance professionnelle.
Les jeunes médecins dénoncent notamment la gestion arbitraire des heures supplémentaires. Environ 41 % des participants indiquent qu'il leur est difficile de consigner leurs heures supplémentaires dans leur clinique, et 70 % ne peuvent pas respecter les temps de pause légaux prescrits. Lorsqu'ils tentent de faire valoir leurs droits en matière d'heures supplémentaires, ils se heurtent souvent à des refus catégoriques, accompagnés de justifications choquantes, telles que : « Un bon médecin ne fait pas d'heures supplémentaires. » Certains rapportent même des menaces, affirmant que des parties de leur carnet de stage pourraient ne pas être validées s'ils insistent pour faire respecter leurs droits.
Les conditions de formation sont également critiquées pour leur manque de structure et de suivi. Les jeunes médecins se plaignent du manque de temps pour poser des questions ou obtenir des explications, de l'absence de rotation organisée entre les services, et du sentiment d'être « jetés dans le grand bain » sans directive claire. Les décisions dans les hôpitaux semblent souvent être dictées par des impératifs économiques plutôt que par des préoccupations pédagogiques, ce qui contribue à un sentiment d'être submergé dès les premières années de pratique.
La numérisation des hôpitaux, ou plutôt son absence, est un autre point de mécontentement majeur. Près de 70 % des participants se plaignent de devoir effectuer une double documentation, un problème encore très répandu chez leur employeur. Par ailleurs, 92 % des médecins interrogés rapportent des problèmes techniques dans leur travail quotidien, un sur cinq indiquant que ces problèmes surviennent même plusieurs fois par jour. Les outils numériques à leur disposition sont souvent obsolètes et non connectés à Internet, ce qui rend leur travail encore plus difficile. Seuls 10 % des jeunes médecins utilisent des tablettes dans leur pratique quotidienne, tandis que d'autres signalent que des systèmes de reconnaissance vocale, pourtant standards dans d'autres pays, ne sont pas encore généralisés dans les hôpitaux allemands.
Malgré ces nombreux obstacles, il y a quelques aspects positifs à souligner. Près de 90 % des médecins en formation déclarent avoir accès à des jours de formation continue, indépendamment de leurs jours de congé. Parmi eux, 55 % peuvent les prendre sans difficulté, et près de 62 % bénéficient d'un soutien financier de la part de leur employeur pour leur formation continue, bien que les montants varient en fonction des cas. Ce soutien peut aller de 1 000 euros par an à une couverture complète des frais de formation, selon les situations.
En outre, trois quarts des jeunes médecins interrogés affirment que leurs souhaits en matière d'horaires de travail sont pris en compte, et plus de 83 % rapportent une planification fiable de leurs congés. Ces aspects positifs montrent qu'il existe des efforts pour améliorer certaines conditions de travail, mais ils sont largement éclipsés par les nombreux défis quotidiens que ces jeunes médecins doivent affronter.
Cette situation de frustration généralisée pourrait avoir des conséquences importantes sur l'avenir du secteur médical en Allemagne, en particulier si un nombre croissant de jeunes médecins choisissent de quitter la profession, aggravant ainsi la pénurie de personnel déjà existante dans de nombreuses cliniques et hôpitaux