La Chambre a adopté jeudi, majorité contre opposition, le premier volet de la réforme du financement des hôpitaux, un projet évoqué depuis une vingtaine d'années en Belgique. La ministre des Affaires sociales et de la Santé Maggie De Block s'est attaquée au chapitre le plus facile pour lancer cette réforme, celui consacré au financement forfaitaire pour des groupes de patients nécessitant des soins à basse variabilité.
En exécutant cette loi, les autorités ne tiendront plus compte des prestations effectivement réalisées. En accordant un remboursement dont le montant est préalablement déterminé pour l'hospitalisation des patients qui peuvent sui vre un trajet de soins pouvant être facilement standardisés, le gouvernement supprime le stimulant financier qui incitait à réaliser des "prestations inutiles".
On se dirige vers le remplacement d'un honoraire à l'acte par un honoraire forfaitaire pour certaines prises en charge à faible variabilité. Le texte instaure également une certaine flexibilité qui permettra d'évoluer d'un financement basé sur des chiffres historiques vers un financement "evidence based", celui d'une médecine qui répond à des hypothèses scientifiques vérifiées.
Sauf complications, un patient qui relève d'un groupe de patients nécessitant des soins à basse variabilité, saura à l'avance quelle sera l'intervention de l'assurance maladie. Il en va de même pour l'hôpital et pour les prestataires de soins: ceux-ci connaîtront à l'avance ce qu'ils recevront pour le patient concerné.
Bien que la réforme proposée soit radicale, elle ne constitue certainement pas une mesure d'économie, a assuré la ministre libérale. La masse d'honoraires totale continuera d'être octroyée, ce qui ne signifie toutefois pas que les montants globaux prospectifs ne seront qu'indexés à l'avenir. Les montants seront recalculés annuellement. Si la pratique médicale change à l'avenir, le montant prospectif global évoluera dès lors également vers le haut ou vers le bas, en raison de la méthode de calcul décrite.
Les pédiatres se sont inquiétés de la réforme alors qu'en cas d'accouchement, ce sont les mères qui seront "catégorisées" pour le montant forfaitaire. Ils craignent que les nouveaux-nés devant bénéficier de soins particuliers soient systématiquement transférés en service de néonatalogie pour éviter une prise en charge impayable pour l'hôpital.
A cet égard, rien ne changera, a indiqué la ministre. Ce n'est que dans le cas où, à la suite de complications, le bébé reste hospitalisé alors que la mère quitte l'hôpital que des prestations sont facturées au nom du bébé. Or il n'est plus question dans ce dernier cas de soins de basse variabilité, mais de prestations facturées à l'acte. Quant aux examens cliniques réalisés par le pédiatre pour un bébé hospitalisé en maternité alors que sa mère est encore avec lui, le montant global prospectif en comprend deux, ce qui correspond à la pratique actuelle dans la plupart des hôpitaux.
Certains ont également exprimé la crainte d'une diminution de la qualité des soins pour les patients. La ministre a souligné que l'Inami et le SPF Santé publique assureront ensemble un contrôle de la qualité des soins et que, si nécessaire, ils interviendront. Enfin, la ministre a décidé d'autoriser les suppléments d'honoraires de manière comparable à ce qui se pratique pour les autres honoraires. Toutefois, afin de ne pas inciter les prestataires à augmenter le nombre de leurs prestations, la base sur laquelle le calcul pourra se faire sera limitée.
L'opposition a salué la réforme dans ses principes mais regretté un manque de transparence. Il reste beaucoup d'inconnues, a-t-elle fait observer, notamment quant à la liste définitive des groupes de patients concernés. De nombreux éléments doivent encore faire l'objet de procédures d'avis. Ils seront précisés dans l'arrêté royal d'exécution de la loi.
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