En 2022, 49 hôpitaux généraux sur 86 ont présenté un résultat d’exploitation dans le rouge. Un hôpital sur deux est dans la tourmente. Parmi ceux qui affichent encore un bénéfice, 24 arrivent seulement à un résultat d’exploitation ordinaire de moins de 1% du chiffre d'affaires. « Un résultat que nous ne considérons pas comme durable. Les hôpitaux généraux sont dans les difficultés jusqu'au cou», alertent les auteurs de l’étude Maha 2022.
Dire que les résultats de l’étude Maha 2022 étaient très attendus cette année est un euphémisme. Après les cris d’alarme des fédérations hospitalières annonçant qu’un tiers des hôpitaux flamands et wallons (membres d’Unessa) et 60% des hôpitaux bruxellois présentent un déficit pour 2022, le secteur hospitalier et les autorités attendaient d’en avoir la confirmation par les experts de Belfius.
C’est chose faite. Comme chaque année, Belfius Strategic Research a analysé les chiffres de 2022 de 86 hôpitaux généraux. Cette division a également réalisé une première estimation des chiffres semestriels jusqu’au mois de juin 2023 inclus après avoir effectué une enquête à laquelle trois quarts des hôpitaux ont participé.
« En 2022, le résultat d’exploitation ordinaire des hôpitaux généraux recule de 328 millions et enregistre une perte de -181 millions d’euros. Tant la Flandre, la Wallonie que Bruxelles en prennent un coup. Il ne faut pas chercher la raison très loin. Malgré la forte hausse du chiffre d'affaires global du secteur (+6,6%) - induit par l'augmentation du Budget des Moyens Financiers (BMF +10,4%) et la hausse des revenus pharmaceutiques (+ 8,9%) -, les coûts ont augmenté encore plus, soit 8% », expliquent les rapporteurs.
Faible progression des honoraires médicaux
La faible progression des honoraires des médecins (+1,6% en 2022) a évidemment un impact important sur la progression du chiffre d’affaires des hôpitaux. Le BMF 2022 a été revu à la hausse pour faire face aux 5 indexations salariales qui ont été accordées en 2022. Pour 2023, le BMF devrait également être renforcé (+7,5%), en raison des augmentations salariales. Soulignons que les dépenses liées aux frais de personnel ont enregistré une hausse historique en 2022 (+14,5%). Cette année, ces frais devraient encore augmenter de 9,4%.
«L’augmentation modeste des honoraires reflète le fait que l'activité des hôpitaux reste plus faible qu'avant le Covid et qu’en plus, les honoraires des médecins n'ont subi qu’une indexation limitée. Comme toujours, les honoraires des médecins sont adaptés au coût de la vie avec un décalage d’un an, ce qui a joué de mauvais tours aux finances des hôpitaux lors de l’inflation galopante de l'an dernier, de telle sorte que le chiffre d'affaires ne suivait pas tout à fait les coûts. En effet, une partie du personnel – lors des consultations et dans les services médico-techniques, par exemple – est payé partir des contributions des médecins », précisent les auteurs de l’étude Maha. Ceux-ci estiment que les honoraires des médecins pourraient s’accroître de 7,9% en 2023, grâce à l’application de l’indexation et à la croissance limitée de l'activité.
Explosion des coûts de l’énergie
En 2022, les hôpitaux ont dû faire face à une hausse importante du coût de l’énergie (+62%) et des produits alimentaires (+ 17 %). « Les coûts plus élevés de l’énergie continueront à peser en 2023 étant donné que les prix ont été fixés à l’avance sur la base des attentes quant aux prix futurs. Nous estimons que le coût de l’énergie augmentera de pas moins de 77% cette année par rapport à 2022, soit 169 millions d’euros. Pour le premier semestre de 2023, les autorités ont prévu une enveloppe énergétique supplémentaire de 72 millions conjointement pour les hôpitaux généraux et universitaires. Cela n'adoucit que partiellement la douleur », relativisent les experts.
La solvabilité sous pression
Pour la première fois en dix ans, les fonds propres sont sous pression, tant en Flandre, en Wallonie qu’à Bruxelles. Cela est dû au fait qu’un résultat négatif entame les fonds propres. « Le recul combiné de la liquidité et de la solvabilité constitue un signal d'alarme pour les hôpitaux généraux », peut-on lire dans le rapport, dont la conclusion est sans appel : « En dépit de toutes les mesures supplémentaires adoptées par les autorités, notamment pour soutenir le secteur pendant le Covid, les hôpitaux généraux sont dans les difficultés jusqu'au cou. Le nombre d’hôpitaux qui tournent à perte ou qui se trouvent dans la zone de danger augmente. La pénurie aiguë de personnel perdure. De nouvelles réformes restent nécessaires pour redresser le financement des hôpitaux. »
> Découvrir l'essentiel du rapport de l'étude MAHA
Plus d’informations et de réactions sur les résultats de l’étude Maha dans Le Spécialiste du 23 novembre.
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