Après les hôpitaux flamands et académiques, ce sont les comptes des hôpitaux bruxellois qui inquiètent le secteur hospitalier. 6 hôpitaux bruxellois sur 10 est en mauvaise posture. Gibbis réclame plus de mesures rapides.
Selon une analyse de Gibbis, la fédération des institutions de soins bruxelloises, 60% des hôpitaux généraux bruxellois sont dans le rouge et les autres ne génèrent qu’une très faible marge. «Une situation préoccupante qui met les hôpitaux généraux bruxellois en mauvaise posture pour continuer à assurer des soins de qualité pour tous. Nous demandons que des mesures soient prises à court terme au niveau de l’indexation plus rapide des moyens financiers, le coût de l’énergie, la pénurie du personnel, la cybersécurité et les pensions statutaires », alerte la fédération.
Les chiffres sont édifiants : 60 % des hôpitaux généraux bruxellois ont clôturé l’année 2022 dans le rouge contre 30 % en 2021. Globalement, le secteur affiche une perte de 14 millions d’euros alors qu’il générait encore un bénéfice de 7,6 millions d’euros en 2021.
«Il est grand temps de prendre soin de la santé financière des hôpitaux et de nos soignants si nous voulons préserver la qualité de la prise en charge des patients tout en laissant aux hôpitaux un peu de souffle pour innover et développer les soins de demain», alerte Dieter Goemaere, Chief Economist chez Gibbis.
5 mesures rapides
Pour faire face à cette situation critique, Gibbis demande :
1. Une indexation correcte des honoraires des prestataires
La fédération bruxelloise demande que l’indexation des honoraires puisse être correctement anticipée. Actuellement, cette indexation se fait avec un an et demi de retard, ce qui pèse lourdement sur les finances des hôpitaux.
Elle demande d’octroyer une partie de l’indexation (4 %) prévue au 1er janvier 2024 dès le 1er octobre 2023 et de revoir le système d’indexation pour qu’il suive au plus près l’évolution réelle de l’inflation.
2. Une aide adaptée pour faire face aux coûts de l’énergie.
« L’aide octroyée au premier semestre 2023 doit être prolongée et renforcée. L’année dernière, le gouvernement fédéral a décidé d’octroyer une compensation de 80 millions d’euros aux hôpitaux généraux belges pour les surcouts énergétiques exceptionnels du premier semestre 2023. L’évaluation des surcouts réels de 2023 a été fait (enquête réalisée par les fédérations hospitalières) et s’élève à 367 millions d’euros soit un montant largement supérieur au 80 millions octroyés à titre de compensation», indique la fédération qui demande qu’un budget exceptionnel supplémentaire de 287 millions soit octroyé pour compenser effectivement le surcoût de 2023.
Et de réclamer également une injection structurelle à partir de 2024 pour compenser les prix énergétiques plus élevés. Enfin, Gibbis demande aussi une réduction structurelle de la TVA de 21% à 6% pour le secteur des soins de santé pour le gaz naturel ainsi que pour l’électricité.
3. Une aide face à la pénurie de personnel soignant
Ce n’est pas nouveau, le secteur fait face à une pénurie de personnel soignant. A court terme, la fédération veut un financement structurel des aides administratives et logistiques dans les unités de soins et un investissement dans les innovations à valeur ajoutée prouvée pour soulager le personnel soignant dans son quotidien. 41 millions d’euros doivent être débloqués pour ces actions.
4. Un soutien en matière de cybersécurité et implémentation des normes NIS2
Gibbis demande des budgets pour l'implémentation des normes NIS-2 - qui doivent être transposées avant octobre 2024 en Belgique - afin de garantir la sécurité des données de santé et protéger les hôpitaux contre les cyberattaques qui compromettent gravement le partage sécurisé des informations et la continuité des soins. « Ceci nécessitera selon le Conseil fédéral des établissements hospitaliers un investissement structurel estimé à 130 millions d'euros, ainsi qu'un investissement ponctuel de 39,5 millions d'euros», avance la fédération.
5. Une solution globale pour les pensions du personnel statutaire
« Dans les institutions publiques, les pensions pour le personnel statutarisé doivent être couvertes par un nombre de plus en plus restreint de statutaires au travail », remarque la fédération. « Les hôpitaux publics et les CPAS qui les gèrent ne sont plus à même de porter les charges de cotisation qui augmentent. Une solution globale doit être trouvée par l’autorité fédérale pour tous les pouvoirs locaux. » Coût de cette injection budgétaire : 203 millions d’euros.
Rappelons que les hôpitaux flamands ont récemment tirés la sonnette d’alarme dans la presse en annonçant un déficit de 30 millions d’euros en 2022 pour leurs 47 institutions. Celles-ci avaient cependant bien résisté aux différentes crises en 2021 en réalisant encore un bénéfice global de 150 millions.
En avril 2023, le Pr Pierre Gillet, président de la Conférence des hôpitaux académiques de Belgique, annonçait dans notre journal un déficit estimé à entre 100 et 200 millions d’euros.
Une certitude : la prochaine étude Maha de Belfius, qui analyse les comptes des hôpitaux généraux, va être cette année décryptée à fond par tous les gestionnaires du secteur hospitalier.