Réseau hospitalier, prévention, urgences, ... A moins d’un an du déménagement du Grand Hôpital de Charleroi, Gauthier Saelens, directeur général de l’institution fait le point sur plusieurs dossiers .
Un mot sur le réseau hospitalier carolo ?
« Sur le plan médical, tout se passe bien. Nous avons échoué (avec l'ISPPC) au niveau du rapprochement. Aujourd'hui, il n’y a pas d’urgence. Un jour, peut-être les planètes vont s’aligner. Actuellement, dans les réseaux hospitaliers à travers le pays, il y a juste un cadre. A l’intérieur des réseaux, cela n’avance pas beaucoup. A notre niveau, nous sommes en réseau avec la Clinique Notre-Dame de Grâce à Gosselies et en sommes ravis. L’agrément du réseau Hospitalier Charleroi Métropole consolide le partenariat construit de longue date entre le GHdC et la CNDG. Nous allons déjà plus loin que ce qu’on nous impose. »
L’hôpital peut faire de la prévention autrement ?
« Je pense notamment à Valence où la région a donné un budget global pour prendre en charge la population et les hôpitaux doivent tout gérer y compris la prévention. Les hôpitaux se sont lancés massivement dans la prévention parce qu’ils avaient tout intérêt à ce que le patient n’arrive pas à l’hôpital. Après, on peut évidemment s’étonner de voir, sur un plan philosophique, que le pouvoir politique se décharge complètement de la santé sur le secteur hospitalier. »
Au sujet de la prévention, votre travail avec les généralistes est indispensable...
«Les contacts avec les généralistes sont importants pour nous. La direction médicale y est très attentive. Il s’agit de contacts réguliers, structurés. Nous sommes attentifs aussi au contact avec la FAGC qui est une fédération très bien organisée mais aussi avec Cegeno qui sont les médecins généralistes de Namur Ouest. Parfois, nous entendons des reproches et des difficultés, mais le plus important, c’est d’être à l’écoute et de garder un bon dialogue. Nous sommes aussi attentifs à ce que le généraliste entende les difficultés de l’hôpital. »
Sensible à la question des gardes et des urgences ?
« On croit toujours que l’hôpital fait tout pour avoir un maximum d’urgences, mais c’est un service très coûteux d’autant plus avec un personnel en pénurie. Nous n’avons pas intérêt à ce que tous les patients se rendent aux urgences. »
Comment supportez-vous la charge sur vos urgences ?
« Cela reste une grande porte d’entrée pour tous les hôpitaux. C’est un rôle de l’hôpital qui est un lien qui fonctionne 24 h sur 24 et qui rassemble plusieurs disciplines pour prendre en charge immédiatement un patient. Toutefois, les patients ne doivent pas prendre l’habitude de venir à l’hôpital pour être pris en charge pour une pathologie qui pourrait être vue par un généraliste voire même par un autre professionnel de la santé. Il faut donc refaire passer ces messages à la population. J’ai évidemment conscience que, dans les grandes villes, les urgences sont parfois le réceptacle ultime des situations liées à la violence de rue, à la détresse mentale, aux problématiques d’alcool, de drogues, de misère sociale...»
Un mot sur le réseau santé wallon ?
« Nous en sommes très contents. C’est une réussite. Il doit évidemment continuer à évoluer. Il faudrait aussi sans doute une volonté fédérale. On pourrait aussi viser un niveau européen. »
La proximité de l’aéroport vous amène des patients étrangers fortunés ?
« J’ai quelques doutes sur la rentabilité d’une telle activité qui en plus perturbe le fonctionnement de l’hôpital durant certaines périodes. Ce n’est pas notre ambition. Nous n’allons pas démarcher dans des missions économiques. Je reste dubitatif sur le tourisme médical. Évidemment, si certains viennent, nous les accueillerons, mais notre priorité est d’offrir le meilleur aux patients qui habitent à proximité, avant tout. »
Comment peut-on mieux aider les infirmières au quotidien ?
« Pour les soins infirmiers, il faut redorer le blason des infirmières. Ce n’est plus, je pense, une question d’argent à une exception près : la question des sursalaires de nuit et de week-end. Là il y a quelque chose à faire. Dans les autres secteurs, les sursalaires sont beaucoup plus élevés. À côté de cela, ce métier magnifique mérite une attention plus large au niveau de la richesse de ce métier dans la vie de l’hôpital. C’est un métier qui a du sens, qui fait du lien, qui est social et scientifique ; c’est un métier de proximité, où il y a de la formation et de la progression. Nous devons casser la spirale négative. »
Quels sont les points forts de votre institution ?
« Nos coeurs de cibles : les pathologies oncologiques qui impliquent beaucoup de disciplines (onco, chirurgie thoracique, gastro, pneumo, chirurgie viscérale,...). Nous avons aussi le Pôle mère-enfant, le secteur cardio vasculaire et le secteur digestif. Nous pouvons aussi compter sur le secteur ostéo-locomoteur, au riche passé, parce que nous avions des hôpitaux qui venaient de l’industrie et qui prenaient en charge des ouvriers blessés...Même chose pour l’IMTR et les brûlés qui venaient de l’industrie qui sont, aujourd'hui, complétés par des brûlés domestiques, des pathologies dermatologiques graves, des victimes d’attentats, ... »
Vous tenez aussi compte de l’évolution démographique ?
« Le secteur de la gériatrie compte une équipe compétente et 5 unités de soins avec une équipe de gériatres au complet. Nous travaillons aussi sur l’ortho-gériatrie. Nous avons une volonté de garder la personne à domicile. Nous voulons baser le développement du site de Notre Dame sur cet aspect. Nous sommes convaincus que cela améliore la santé des patients en travaillant aussi avec sa famille. Nous le faisons aussi en oncologie avec notre Maison de Mieux-être. »
Le bien-être des médecins et des patients est une priorité ?
« La réflexion sur la santé positive est importante. Nous développons des formations internes. Nous avons des groupes de travail. Nous sommes dans une période où l’on diffuse les concepts dans l’institution. Il faut prendre le temps de changer les mentalités, de les faire évoluer. Nous travaillons aux liens du patient avec tous les acteurs de soins sur le terrain. Un de mes adjoints a pour mission de développer les collaborations avec l’aval hospitalier.»
Votre philosophe se porte bien ?
« Oui, très bien. Nous avons eu des contacts avec d’autres hôpitaux qui nous interrogent en Flandre comme en Wallonie sur notre démarche à la suite de l’engagement d’un philosophe, Jérôme Bouvy. Cela suscite des réflexions curieuses et intéressées. Il accomplit un travail de fond important. »
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