Le rapport d'évaluation de l'étude pilote "télédermatologie" concernant le développement d'une méthode permettant un avis dermatologique via des consultations à distance a été présenté à la médico-mut lundi. Une proposition d'une approche pour la poursuite de la mise en œuvre de la télé-expertise au sein de l'assurance obligatoire soins de santé a également été discutée.
Même si la Belgique avance lentement en matière de télédermatologie par rapport à d’autres pays, elle semble cette fois avoir pris la bonne direction après la dernière réunion de Médicomut de lundi. En effet, le groupe de travail CTM sur la télémédecine va à présent pouvoir faire rédiger un modèle de nomenclature avec une estimation budgétaire pour que l’application de la télédermatologie puisse entrer en vigueur en 2023.
Les différents acteurs de la Médicomut ont pu prendre connaissance du rapport à propos de l' étude pilote sur la télédermatologie en Belgique.
La collecte des données pour l'étude a commencé en février 2021 et s'est terminée le 30 novembre 2021. À ce moment, 2181 demandes avaient été envoyées par des médecins généralistes et 1635 réponses envoyées par des dermatologues.
Ces demandes ont été envoyées par 320 médecins généralistes différents et répondues par 43 dermatologues différents
47 % des médecins généralistes utilisant le système de télédermatologie étaient des femmes, 26 % des hommes. La plupart des médecins généralistes qui ont demandé une télé-expertise provenaient des provinces de Flandre occidentale (15 %), de Flandre orientale (14 %) et d'Anvers (14 %). La plupart des médecins généralistes qui ont utilisé l'application étaient néerlandophones (56 %). Le nombre médian de télé-expertises par généraliste était de 3, avec un minimum de 1 et un maximum de 45 demandes par généraliste
La majorité des dermatologues qui ont rempli le questionnaire étaient des femmes (71 %). Relativement plus de femmes que d'hommes ont envoyé le questionnaire par rapport à la répartition des hommes (45 %) et des femmes (55 %) participant à l'étude. L'âge moyen des dermatologues était de 46 ans. Le rapport entre les répondants néerlandophones et francophones était de 71 % contre 29 %.
Le temps de réponse médian était de 24 heures. 54 % des demandes ont reçu une réponse dans les 48 heures, comme prévu. 73 % des demandes ont reçu une réponse dans un délai d'une semaine et 77 % dans un délai de deux semaines (dans le cas de plusieurs demandes identiques, la date de la première demande a été retenue pour calculer le délai de réponse) . 18 % des demandes sont restées sans réponse.
Le système doit répondre aux besoins
Les médecins généralistes, les dermatologues et les patients sont en général très satisfaits du système de télédermatologie, même si les avis des médecins généralistes et des dermatologues divergent sur certains points.
Presque tous les médecins généralistes (98 %) ont trouvé que le système de télédermatologie était une option à utiliser pour le diagnostic et le traitement des problèmes de peau urgents. Concernant les dermatologues, il ne s'agissait que de 62 % des dermatologues interrogés.
Les dermatologues trouvent-ils possible d'identifier d'éventuels problèmes (pré)malins lors d'une télé- expertise ? 21 % des dermatologues ont déclaré qu'ils n'envisagent jamais comme une option le fait de recourir à la télé- expertise en cas de suspicion de malignité. Parmi les médecins généralistes interrogés, ce chiffre était de 10 %.
Que retenir ? Il y a encore trop de problèmes techniques qui doivent absolument être éliminés ! Il faudrait aussi un meilleur système d'avertissement de l'existence d'une demande (faite à un dermatologue par un généraliste) et que le système soit configurable en fonction des besoins et du flux de travail des dermatologues. "Aujourd’hui, ce n’est pas le cas, mais il serait bon qu’il y ait une indication qu’une réponse a été donnée à une demande...Cet aspect est important parce qu’il y a encore aujourd’hui près de 20% de non-réponses à la suite d’un manque de suivi en retour pour le prescripteur. Par ailleurs, il est intéressant de constater que près de 20% des contacts télédermatologie sont devenus des consultations." ajoute un des intervenants de la réunion.
Une rémunération pour le généraliste aussi
Le rapport conseille aussi de mettre en place une formation des médecins généralistes aux informations cliniques pertinentes pour le dermatologue et à une identification correcte du problème qui est rencontré.
De leur côté, les généralistes demandent des procédures moins lourdes et adaptées au flux de leur travail. Ils souhaitent aussi évoquer la question de la rémunération. « Tout dépend de ce dont on parle. Si le généraliste donne du temps pour discuter avec le dermatologue et lui donne des informations, il faut prévoir une rémunération. Le médecin voit un patient et prend un cliché, cet acte n’est pas juste une lettre de référence à un dermatologue » nous dit un intervenant.
Lors de l’essai pilote les expertises à distance étaient facturées électroniquement et via le régime du tiers payant par le dermatologue via la prestation « 103390 - Avis dermatologique à distance ».
Le remboursement par l’assurance obligatoire soins de santé pour cette prestation s’élevait à 22,33 EUR. Aucun supplément ne pouvait être demandé pour la prestation 103390. Ceci valait aussi bien pour les dermatologues conventionnés que pour ceux non conventionnés. Si une consultation physique avait lieu après une télé-expertise, il n’était pas interdit de facturer des suppléments sur les prestations de l’article 2 de la nomenclature.
Pour Luc Herry, président de l’Absym, au niveau de la rémunération du généraliste, cela dépend des actes à poser : « Si l’on part du principe que la rémunération est de 22,33 euros pour le dermatologue, le généraliste peut être rémunéré pour une seconde consultation présentielle quand il expose la situation à son patient ou par le prix d’une consultation téléphonique quand il transmet les résultats ou donne un avis à son patient.”
A présent, le groupe de travail du CTM sur la télémédecine va donc élaborer un cadre global et générique pour la télémédecine, tel que repris dans l’Accord national médico-mutualiste 2022-2023. Le système doit être applicable à toutes les disciplines, comme l’ophtalmologie, et tenir compte des enseignements tirés du projet pilote de télédermatologie avec une entrée en vigueur au 1er janvier 2023...si tout va bien !
> Découvrir l'intégralité du rapport
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