Le CHU de Liège met la touche finale à un outil scientifiquement validé, qui aide le patient confronté à des symptômes inattendus à définir si son cas relève de l’urgence ou de la médecine générale. Ce système d’auto-évaluation, baptisé Odissée, s’inspire des algorithmes de feu-le tri Salomon. Il devrait être lancé, sous forme de site et d’appli pour smartphone, en mars.
Odissée est l’acronyme d’«Outil décisionnel et informatif des structures de soins efficientes existantes». Cette plateforme web, mise au point par des urgentistes, des MG et des infirmiers, éclaire les patients en situation aiguë qui ne savent pas comment réagir ni où trouver l’aide adéquate. « Cela leur évitera d’aller glaner des conseils peu fiables sur le net », commente le Dr Allison Gilbert. Cette assistante de dernière année en médecine d’urgence travaille, depuis septembre, à une thèse de doctorat qui intègre e.a. la conception de l’application. Elle exerce dans l’équipe des urgences du CHU, qui est donc à l’initiative de ce projet développé en collaboration avec le Dr Edmond Brasseur.
Conseillé en 1 à 10 questions
L’appli est un « produit dérivé », vulgarisé, du protocole de tri téléphonique Salomon conçu par le CHU. Durant cinq ans, il a servi à réguler les appels nocturnes aux MG liégeois, avant le (récent) avènement local du 1733. Odissée, derrière laquelle il n’y a aucun médecin « physique », a été testée à ce jour par un demi-millier de patients. L’utilisateur se voit proposer une palette de 18 icônes qui symbolisent de grands « tiroirs » de situations : problèmes cardio-respiratoires, urinaires, cutanés, post-opératoires, température, traumatisme, inconscience, douleurs, malaise… Il clique sur ce qui cadre le mieux avec ce qu’il éprouve, répond à quelques questions binaires (oui/non) et reçoit en retour l’une des quatre suggestions suivantes : appeler immédiatement le 112, se rendre aux urgences pour une mise au point hospitalière, appeler de suite son MG (ou le médecin de garde) ou fixer un rendez-vous chez son médecin dans les jours qui suivent.
Odissée est qualifiée de simple d’utilisation par les testeurs, affirme le CHU. « Si le problème est grave, les premiers items soumis au patient sont déterminants : en 1 ou 2 questions, le conseil d’appeler le 112 tombe. Dans les cas moins urgents, il y a davantage de questions pour cerner la situation - jusque 10 parfois », détaille le Dr Gilbert.
Plusieurs études ont été effectuées pour vérifier la fiabilité du système. « Une étude préalable de faisabilité sur 400 patients, évaluant la sensibilité et la spécificité de nos algorithmes, a montré qu’ils offraient une sécurité tout à fait correcte. Des volontaires ont également ‘joué’ des scénarios théoriques de situations aiguës, et les résultats donnés par l’appli ont été comparés avec les résultats attendus par des experts », énumère le Dr Gilbert. « C’était également concluant ». Une étude « grandeur nature » est en cours aux urgences, où un médecin vérifie si l’orientation suggérée par Odissée est conforme à la réalité de ce qu’ont les patients.
Pas conçue pour le suivi
Le CHU souligne néanmoins que, « même robuste, [l’appli] ne peut garantir la réponse à l’ensemble des situations cliniques de soins non programmables ». Elle ne pose pas de diagnostic et ne remplace évidemment pas une consultation !
Il n’y a pas non plus de croisement entre les infos que les utilisateurs y encodent sur leurs symptômes ou pathologies et le contenu du DPI ou les données disponibles sur le Réseau santé wallon. « Dans l’appli, il y a des questions sur les antécédents. Mais elle n’est pas capable, ni conçue d’ailleurs, pour aller ‘rechercher’ des données ailleurs et faire du suivi de patient. Ce n’est pas le but. »
Odissée arrive au bout de sa phase de validation. Etape suivante : son ouverture au grand public, sous forme de site web et d’appli pour smartphone et tablette. Louis Maraite, directeur de la communication au CHU, nourrit l’espoir de pouvoir annoncer la bonne nouvelle le jour du printemps. Le service sera gratuit et, vu sa forme, disponible H24.
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