Dépenses pharmaceutiques : une hausse bénéfique ou préoccupante ?

L'augmentation des dépenses pharmaceutiques est-elle bénéfique ? Cette question, par ailleurs controversée, était le point de départ du symposium annuel du GBS organisé ce 2 février. En soi, le thème a donné lieu à une série d'exposés intéressants sur la fixation des prix des médicaments, présentés par divers spécialistes. La deuxième partie du colloque a permis à plusieurs représentants des autorités de clarifier certains points.

« Nous devons examiner cette question sous différents angles », nous a expliqué Stan Politis, président du Groupement belge des spécialistes (GBS). « L'augmentation prétendue des dépenses pharmaceutiques est évoquée afin de tenir les médecins responsables à hauteur de 16 millions d'euros si le volume de médicaments prescrits ne diminue pas », rappelle le Dr Politis. « Or, nous sommes face à nos patients, c'est notre première responsabilité. En tant que prescripteurs, nous sommes tenus responsables du volume, mais pour la fixation des prix, cette responsabilité incombe à l'industrie pharmaceutique. Pourtant, les choses ne sont pas si simples. En oncologie ou en immunothérapie, par exemple, il n'est pas possible, en tant que médecin, de modifier simplement le volume de prescription. »

L'un des facteurs influençant la fixation des prix est le seuil que les décideurs sont prêts à payer par QALY gagnée. Ces seuils peuvent varier considérablement. Par exemple, 50 000 à 150 000 dollars par QALY aux États-Unis, 20 000 à 30 000 livres sterling par QALY au Royaume-Uni et 45 000 à 50 000 euros par QALY en Belgique/Europe, a souligné Philip Remans (Genk Rheumatism Centre, ZOL). Notre pays n'hésite pas non plus à fixer des seuils administratifs pour les médicaments coûteux.

Nous devons également veiller à ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Les essais cliniques apportent de nombreux avantages sociétaux. Par exemple, nous pouvons traiter nos patients à moindre coût et avec une qualité optimale, tandis que les essais cliniques sont également attrayants pour l'industrie pharmaceutique et permettent aux experts belges de devenir des leaders d'opinion clés. C'est donc une triple victoire qui permet à notre pays de se démarquer au niveau international.

« L'industrie pharmaceutique emploie de nombreuses personnes dans notre pays. Pensons aussi au rôle de l'Institut de Médecine Tropicale, qui fait travailler un bon nombre de chercheurs et qui, en même temps, donne à notre pays une réputation internationale grâce à son expertise. Bref, un écosystème qu'il faut préserver à tout prix », estime Stan Politis.

L'éthique

Quelles solutions doit-on trouver si le mot d'ordre est « économisez » ? Le problème s'intensifie car nous devons faire des choix éthiques en raison de l'évolution thérapeutique qui propose des médicaments personnalisés coûteux. « D'un côté, nous évoluons vers une médecine personnalisée, nécessaire pour des traitements de précision, et de l'autre, vers une médecine de population. La Belgique peut trouver des solutions parce qu'elle est forte pour tester les profils génétiques afin de vérifier si la prescription d'un certain médicament est légitime », souligne Stan Politis. «

Toutefois, il faut se méfier des projets visant à centraliser davantage les huit centres reconnus par le biais de la convention sur les maladies rares. « La question se pose de savoir si les médecins non universitaires peuvent également être impliqués dans ce processus : aujourd'hui, ils sont laissés de côté précisément parce qu'il s'agit de maladies rares. »

Cet aspect éthique a également été soulevé par Wim Pinxten (éthique médicale UHasselt). « Dans la budgétisation pharmaceutique, il faut mettre en balance la valeur intrinsèque et la valeur économique d'un médicament, tout comme, par exemple, une œuvre d'art acquiert une valeur sur la base de critères différents. Lors de cette évaluation et de la prescription, il ne faut pas perdre de vue la valeur de la relation médecin-patient. Fixer des limites aux dépenses n'est pas une question médicale ou économique, mais avant tout une question sociale (et éthique) », a-t-il souligné, mais il a insisté sur une tarification juste et transparente, qui est essentielle pour des dépenses sociales responsables.

Pour le Pr Laurent Servais (Centre neuromusculaire d'Oxford, Université de Liège), « le point de départ est extrêmement important : dans quelle mesure pouvons-nous améliorer le point de vue et la qualité de vie du patient ? »

Le Pr Neven (UZ Leuven) a souligné que le rôle des cliniciens est absolument essentiel pour améliorer le rapport coût-bénéfice des médicaments oncologiques innovants. En novembre 2023, le Comité de l'assurance a approuvé la convention sur le suivi à long terme des adolescents et jeunes adultes atteints de cancer. « Son financement est entièrement greffé sur six institutions universitaires. Cela va à l'encontre du financement flamand, axé sur la personne », estime-t-il.

Données chiffrées

Les autorités ont également eu leur mot à dire dans cette discussion passionnante entre scientifiques. Pedro Facon a dû se dire qu'il valait mieux exposer son point de vue en s'appuyant sur des données chiffrées. Il a réfuté l'idée que les dépenses pharmaceutiques augmentent : « Au fil des ans, le budget pharmaceutique n'a pas pris une part plus importante dans le gâteau total. Au contraire, en tenant compte des remboursements, le budget net est aujourd'hui en baisse. De 17,2 % du budget global en 2015, il est passé à 15,7 % en 2024. » L’administrateur général adjoint de l’Inami attribue cela en partie au fait que l'ajustement à l'inflation ne s'applique pas aux budgets pharmaceutiques, alors que les honoraires et les salaires du personnel suivent l'évolution de l’index. Par ailleurs, ce n'est pas l'Inami qui décide du remboursement, mais la CRM (Commission de remboursement des médicaments), dont l'avis a généralement du poids. Toutefois, le ministre compétent peut exceptionnellement s'écarter de l'avis de la CRM.

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