Le monde occidental réuni en Normandie fête aujourd’hui le 80e anniversaire d’un événement majeur qui a déterminé son avenir jusqu’à aujourd’hui encore : le débarquement de Normandie en juin 1944. Ce fut le début de la « Bataille de Normandie ». On ne dira jamais assez l’importance de la médecine dans cette opération d’envergure. Des médecins militaires belges y ont participé.
Amener des dizaines de milliers d’hommes sur le théâtre des combats suppose bien évidemment que l’on puisse apporter une assistance chirurgicale aux nombreuses victimes de blessures. Rien qu’au jour J, on estime que plus de 5 000 soldats alliés furent blessés. Et pour la bataille de Normandie qui s’ensuivit, le nombre de blessés dans le même camp s’élève, d’après les rapports, à 153 000. On imagine aisément l’ampleur de la logistique médicale que cela a rendu nécessaire.
Les réflexions concernant la prise en charge sur le champ de bataille évoluaient depuis la guerre de Crimée. Un des pionniers des progrès en la matière fut le Dr Antoine Depage, qui appliqua ses principes à l’hôpital militaire « L’Océan » à La Panne. Le principe était qu’il fallait donner les soins d’urgence le plus près possible du front pour assurer la survie de la victime, avant de la ramener vers l’arrière où des interventions plus importantes pouvaient ensuite être réalisées. Ces interventions plus importantes se faisaient dans des hôpitaux de première ou de seconde ligne, situés hors de portée des tirs d’artillerie de l’ennemi. Les premiers de ces hôpitaux étaient de moindre ampleur que les seconds et plus proches du front sans être sous le feu. Ce mouvement d’idées progressa encore avec la guerre d’Espagne, sous l’influence des chirurgiens qui y avaient opéré. Ce furent les Anglais qui, pendant la Seconde Guerre mondiale, mirent au point les « Field Surgical Units (FSU) ». Dès le début, mais surtout après la retraite de Dunkerque, les chirurgiens militaires d’Outre-Manche se sont rendu compte que la guerre était devenue une guerre de mouvement et que les unités médicales n’étaient plus assez mobiles pour assurer efficacement leur mission sur le champ de bataille.
Les FSU étaient des stations chirurgicales légères qui pouvaient opérer au plus près des combats. Sous la férule du capitaine médecin Alfred Dumont, une première FSU belge, la « First Belgian Field Surgical Unit » fut créée et fit partie de la fameuse Brigade Piron, qui participa à la campagne de libération à partir de l’Angleterre. Le médecin anesthésiste de cette FSU était le sous-lieutenant Reinhold, qui fut après la guerre professeur d’anesthésiologie à l’ULB. Rapidement, une unité de transfusion lui fut adjointe, dirigée par le sous-lieutenant médecin Linz. Un staff de chauffeurs faisait également partie de l’unité. Les médecins militaires belges furent ainsi à pied d’œuvre conjointement avec les médecins britanniques, qui disposaient eux-mêmes d’autres FSU. Ils ont soigné tous les blessés du secteur et leur compétence et leur efficacité furent reconnues. Ils ont notamment participé aux débuts de l’utilisation de la pénicilline, à peine arrivée sur le champ de bataille et qui a sauvé de nombreuses vies dans la lutte contre les infections.