À la veille de la Journée mondiale de la prévention du suicide, ce 10 septembre, une étude publiée fin août révèle un chiffre inquiétant : le taux de suicide chez les femmes médecins est 76 % plus élevé que dans la population générale.
Une récente étude publiée dans le *British Medical Journal* fin août par des chercheurs de l’Université de Vienne révèle un chiffre alarmant : les femmes médecins présentent un taux de suicide supérieur de 76 % à celui de la population générale. Cette méta-analyse, qui s'appuie sur 39 enquêtes menées dans 20 pays différents, montre une disparité frappante entre les sexes dans la profession, malgré une tendance mondiale à la baisse du suicide.
En 2019, le suicide a provoqué plus de 700 000 décès dans le monde, représentant plus d’un décès sur 100. Le taux global de suicide ajusté selon l’âge était estimé à 9 pour 100 000 habitants, mais ce chiffre varie considérablement entre pays, avec des taux allant de moins de 2 à plus de 80 pour 100 000. Si, globalement, le suicide a diminué de 36 % depuis 2000, certains pays comme les États-Unis ou le Brésil ont, au contraire, vu une hausse similaire.
Une profession à haut risque, surtout pour les femmes
Les hommes médecins affichent un taux de suicide relativement stable par rapport à la population générale. Toutefois, ce taux reste 81 % plus élevé que celui des autres professions au statut socio-économique similaire. Pour les femmes médecins, le constat est encore plus préoccupant. L’étude révèle un taux de suicide bien plus élevé que celui des autres femmes dans la population.
Historiquement, la médecine a toujours été une profession associée à un risque accru de suicide. Dès 1903, un éditorial du *JAMA* soulignait que les médecins aux États-Unis avaient un risque de suicide plus élevé que la population générale. Depuis, de nombreuses recherches ont confirmé ce constat. Une méta-analyse de 2004 indiquait déjà que les femmes médecins avaient un ratio de mortalité par suicide particulièrement élevé. « Ces données ne font que confirmer ce que l’on sait depuis des décennies : la pression dans cette profession est immense, et les femmes en paient un lourd tribut », note l’un des auteurs de l’étude.
Des explications complexes
Les causes de cette surreprésentation du suicide chez les femmes médecins sont difficiles à déterminer avec certitude. Les chercheurs suggèrent que l'augmentation de la présence féminine dans un domaine historiquement dominé par les hommes pourrait jouer un rôle. "Certaines données indiquent que la répartition des sexes dans une profession influence la disponibilité du soutien sur le lieu de travail ainsi que le bien-être émotionnel, avec des niveaux de soutien plus élevés dans les professions mixtes que dans celles majoritairement masculines", expliquent-ils.
Par ailleurs, la pandémie de Covid-19 a exacerbé les facteurs de risque. « La pandémie a mis à rude épreuve les médecins, augmentant les cas de dépression et d’épuisement professionnel, deux facteurs clés du suicide », explique l'étude.
Renforcer la prévention, une urgence
Les chercheurs insistent sur l’importance de renforcer les mesures de prévention, surtout pour les femmes. « Nous devons impérativement améliorer les dispositifs de soutien psychologique dans le milieu médical, et plus encore pour les femmes, dont la santé mentale est trop souvent négligée », concluent-ils. Si le taux de suicide diminue globalement dans le monde, il est clair que certaines catégories de la population restent à risque.
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