Les métiers de la santé sont en souffrance. Ce n’est pas une surprise. Le Forem vient de rendre publique son étude des métiers en pénurie en Wallonie. Médecins, pharmaciens et infirmiers y occupent, hélas, une place peu enviable. Et dans plus d’un cas, le rapport prévoit encore une aggravation de la situation dans le futur proche.
Cela fait longtemps que la profession médicale est en pénurie, ce qui amène le Forem à parler de pénurie structurelle. Le Forem, qui reconnaît être « loin de constituer le premier recruteur pour la profession » remarque que « les conditions de travail semblent être un facteur supplémentaire de la pénurie ». De nombreux avis d’experts et de commissions, y compris de la commission de planification, convergent vers ce constat, en particulier à propos des médecins généralistes, mais pas seulement. La psychiatrie, la gynécologie et la pédiatrie sont également évoquées par le rapport. Non seulement la densité des médecins en activité reste stable et en-dessous de la moyenne européenne mais encore assiste-t-on à un vieillissement du corps médical belge. Face à cela « le vieillissement de la population des travailleurs, une volonté de respecter les normes standards en matière d’heures prestées et la gestion de l’accès à la profession dans le cadre de l’Inami (qui jusqu’à aujourd’hui encore génèrent une gestion à flux tendu des ressources en personnel) font poindre une aggravation dans les années à venir. » Cette tendance avait déjà été dénoncée par le Forem dès 2013 dans un recueil intitulé « Métiers d’avenir. Etat des lieux du secteur de la santé ».
Le Forem rappelle aussi que cette situation a poussé nombre d’employeurs du secteur à faire appel à du personnel étranger. Autre conséquence connue : les pratiques ont évolué vers le développement du travail en réseau et vers une collaboration accrue avec les autres acteurs de la chaine des soins.
« Le métier des pharmaciens », dit encore le rapport, « entre cette année dans la liste des métiers en pénurie en Wallonie. Peu de candidats sont inscrits dans la réserve de main d’œuvre du Forem et le nombre des personnes formées sortant des études est restreint. » Les propositions d’emploi connues du Forem proviennent principalement du commerce, de l’industrie chimique et pharmaceutique, ainsi que du secteur de la santé. Elles ne semblent donc pas intégrer les pharmaciens indépendants exerçant en officine. Mais dans les secteurs d’entreprises cités, l’expérience est un élément important du recrutement, ce qui restreint le nombre des candidats pris en considération. De plus, dit le rapport, « la tension semble renforcée par le vieillissement de la population des travailleurs. » Signalons au passage que le métier d’aide-pharmacien ne figure pas dans la liste des professions en pénurie pour 2023.
Le manque d’infirmier.e.s est bien connu également et la pénurie est, elle aussi, qualifiée de structurelle en raison de sa durée déjà longue. Le Forem rappelle qu’en 2020 déjà, le KCE signalait déjà que la norme de sécurité internationalement acceptée n’était plus respectée depuis plusieurs années en Belgique. Et de conclure que « un réalignement sur cette norme risque d’accroître la tenson déjà existante. » Le cas des infirmier.e.s en chef est encore plus aigu. La tension ne fait que s’accroître et il est de plus en plus difficile de recruter des professionnels de ce niveau. Comme causes, le rapport cite le niveau de responsabilité, la qualification et l’expérience exigées, ainsi que les conditions de travail. Ici encore, le vieillissement est un facteur d’aggravation de la pénurie.
L’aide-soignant est chargé d’assister l’infirmier dans les soins et l’éducation du patient et son suivi, notamment au niveau psychologique. L’exercice de cette profession est soumis à un visa délivré par le SPF Santé publique. C’est aujourd’hui un métier en pénurie malgré une réserve apparemment suffisante. Mais l’allongement de la durée de vie et l’augmentation du groupe des personnes entrant dans le quatrième âge engendrent une hausse des besoins. Ceux-ci vont également évoluer en qualité, devant la technicité croissante des soins infirmiers.
La fréquence de plus en plus grande des affections liées à l’âge exigera aussi de nouvelles connaissances. Une partie des profils professionnels risque donc de ne plus répondre aux besoins à venir. Plusieurs autres professions du secteur de la santé sont en situation critique mais pas (encore ?) en pénurie : ambulancier, ergothérapeute, logopède, technologue de laboratoire.
> Consulter le rapport complet du Forem