" La revue de médication sous sa forme actuelle est inacceptable" (ABSyM)

"C’est avec surprise que l’ABSyM a appris que l’Association des Pharmaciens Belges (APB) avait obtenu la mise en fonction de la revue de médication" s'étonne vendredi le syndicat dans un communiqué. "Avalisée au Comité de l’assurance malgré les réserves du banc médical, elle n’a été validée ni à la Concertation Médico-Pharmaceutique ni à la Commission Nationale Médico-Mutualiste." Pour l’ABSyM, si la revue de la médication peut contribuer à l’amélioration de la prise en charge médicamenteuse, la procédure actuelle doit être revue et corrigée.

L’organisation d’un traitement complexe chez un patient qui souffre de plusieurs problèmes intriqués nécessite la maîtrise de l’approche clinique, technique, diagnostique et thérapeutique intégrant les dimensions physiques, mentales et sociales de la santé du patient. Celle-ci résulte d'un processus long et complexe au cours duquel interviennent non seulement les médecins généralistes mais aussi les médecins spécialistes.

La particularité de la prescription « off-label » est une réalité qui s'ajoute à la complexité d’un équilibre souvent très fragile. Elle prend en compte de nombreuses notions qui ne sont généralement pas connues du pharmacien. Par ailleurs, l’expertise dont l'APB revendique l’exclusivité en termes de maîtrise des effets secondaires, des contre-indications et des interactions des médicaments entre eux se base en fait sur un logiciel qui lance des alertes lorsqu’ils se présentent. Il se fait que ce logiciel est désormais intégré aussi aux logiciels DMI. Ceci confère au médecin une expertise identique, souligne l’ABSyM.

Risque d’atteinte à la relation médecin/patient

Si au terme d’un entretien entre le pharmacien et le médecin, ce dernier n’est pas d’accord avec les modifications proposées par le pharmacien, et que le pharmacien communique néanmoins les conclusions de sa revue de médication au patient, la relation de confiance entre le patient et le médecin sera mise à mal et le médecin risque de se retrouver en situation conflictuelle avec le patient.

Dès lors, l’ABSyM demande que la procédure de la revue de la médication prévoie explicitement que le patient ne soit pas informé des propositions du pharmacien, mais que seules les modifications du schéma de médication proposées par le pharmacien et validées par le médecin lui soient communiquées.

Quid de la responsabilité civile et pénale du médecin ?

La pression exercée sur le médecin pourrait l'inciter à modifier un traitement qui fonctionne bien établi à l’aune de la balance risques-bénéfices non dans l’intérêt du patient mais par crainte de ce conflit, met en garde l’ABSyM.

Ceci pose clairement un problème de responsabilité civile et pénale. Dans la configuration actuelle, en présence de dommages résultant de la modification d’un traitement proposé par le pharmacien, c’est le médecin qui en endossera l’entière responsabilité. Il est pourtant évident que la responsabilité du pharmacien doit également être engagée. 

A l’inverse, outre le temps que le médecin devra passer à se justifier devant le patient, si le médecin ne se rallie pas aux propositions du pharmacien, au moindre problème, le patient informé des propositions émises par le pharmacien que le médecin n’aura pas suivies attribuera à ce refus la responsabilité des dommages qu’il pourrait subir, même en l’absence de lien avec celui-ci. C’est au médecin qu’incombera la charge de la preuve. Pour l’ABSyM, ce n’est pas acceptable. La responsabilité des modifications du traitement doit être endossée à la fois par le pharmacien et le médecin.

En conclusion, la revue de médication sous sa forme actuelle est inacceptable aux yeux de l’ABSyM. Si la revue de médication doit être maintenue, elle doit être revue et corrigée, en faisant en sorte que le patient ne soit pas au courant des propositions de modifications du schéma de médication proposées par le pharmacien qui n’ont pas été validées par le médecin et que la responsabilité du pharmacien soit également engagée. 

Lire aussi:

> La revue de médication a commencé ce 1er avril en officine

> L’APB prône un schéma de médication informatisé

> Liège: la revue de médication bientôt poussée dans le dos

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Derniers commentaires

  • Jean BELCHE

    13 avril 2023

    Food for thoughts
    https://www.cochrane.org/CD008986/EPOC_what-are-benefits-and-risks-medication-reviews-hospitalised-adults
    We found that medication reviews in hospitalised adult patients likely reduce hospital readmissions and may reduce emergency department contacts. However, medication reviews may have little to no effect on mortality, and it is unclear if medication reviews have an effect on health-related quality of life.

    http://www.minerva-ebm.be/FR/Article/2205
    Actuellement, il n'existe pas encore, en Belgique, de guide de bonne pratique pour l'approche de la polypharmacie chez les personnes âgées. Les résultats positifs de cette étude pourraient stimuler les médecins et les pharmaciens à effectuer une revue médicamenteuse interdisciplinaire en se concentrant sur les problèmes de santé et sur les objectifs de soins personnels du patient pendant une revue médicamenteuse. Cela pourrait contribuer à donner la priorité aux problèmes de santé et à procurer des soins plus ciblés (8), par analogie avec d'autres interventions pour traiter les problèmes de santé chroniques (9,10).

    L'étude a été incluse dans la justification du module récemment révisé « Analyse de la médication » (Medicatiebeoordeling) du guide de bonne pratique multidisciplinaire « Polypharmacie chez les personnes âgées » de la NHG (11). Le groupe cible principal pour une revue médicamenteuse avait été limité dans la révision aux patients de 75 ans et plus qui prenaient au moins dix médicaments par jour (auparavant, cinq médicaments ou plus avec un seul facteur de risque) (7,11). Ce groupe cible pour la revue médicamenteuse n'est cependant pas solidement étayé (11).

    Les seuils à franchir pour la mise en place de la revue médicamenteuse en Belgique sont essentiellement le gros investissement en temps et la charge de travail importante (12). Contrairement aux pharmaciens de l'étude, les pharmaciens belges ne connaissent pas les données cliniques (éléments de soins et résultats sanguins). D'autres obstacles à la mise en œuvre de la revue médicamenteuse mentionnés par les pharmaciens belges sont l'absence de remboursement, la formation à l'exécution de la revue médicamenteuse et à la communication (interprofessionnelle), les applications d'e-Health de soutien pour l'échange interdisciplinaire d'informations et les applications logicielles pour la revue médicamenteuse (12).

  • Marie-Louise ALLEN

    12 avril 2023

    alléluia! Pas assez de médecins- on se demande pourquoi!- donc les pharmas les remplace. Comme pour les vaccins administrés sans aucun examen médical préalable.... Vive la médecine rabotée, le bon sens bafoué, le serment d'Hippocrate ... c'est quoi???
    à pleurer!

  • Donald Vermer

    11 avril 2023

    C'est spécial comme procédure
    Je pense qu'il faut favoriser effectivement une collaboration médecin pharmacien mais sans mettre à mal la relation de confiance entre médecin-patient
    S'il y a partage d'information entre médecin-pharmacien, il y aussi partage de responsabilité , cela me semble évident


    Dr Donald Vermer

  • Paul JONCKHEERE

    11 avril 2023

    Le ministre Fr Vande brouckeest un ancien ideologue qui croit toujours qu’avec quelques idees saugrenues il va solutionner tous les problemes.Seul un medecin pratiquant est capable de donner des solutions pratiques.