La pénurie d’infirmières et, dans certaines disciplines, de médecins met les hôpitaux sous pression. Est-ce que la formation des réseaux hospitaliers a un caractère attractif pour les professionnels parce que ce sont des structures de taille importante qui favorise la mobilité interne? Trois personnalités du secteur hospitalier ont fait, lors d’une table ronde organisée par Le Spécialiste, et soutenue par MSD, le point sur ce sujet.
Francis de Drée (directeur général adjoint de l’Hôpital universitaire de Bruxelles): Non, je ne le pense pas aujourd’hui. Ce n’est parfois même pas l’image de l’hôpital qui attire les futurs travailleurs mais plutôt le service ou l’unité de soins où ils vont travailler. Je serais très étonné qu’un employé choisisse tel ou tel hôpital parce qu’il fait partie d’un réseau particulier. Ce critère n’entre pas dans le choix d’un emploi. Par contre, de nombreux travailleurs veulent s’engager dans un hôpital qui a un sens et qui répond à un réel besoin de la population. Ce sont des éléments qui parlent aux membres du personnel et qui les font rester dans l’institution ou à ceux qui veulent y travailler. L’élément de taille joue tout de même, entre autres vis-à-vis des critères de pénibilité liée aux horaires tardifs, à la garde… mais ce n’est pas spécifique au réseau. C’est déjà le cas avec l’Hôpital universitaire de Bruxelles (HUB).
Benoît Debande (directeur général administratif et financier du Chirec): «Faciliter la vie» est une demande récurrente du travailleur: il y a-t-il une crèche, des moyens de transport, la possibilité de faire du télétravail… Il est aussi plus difficile de fidéliser les travailleurs que par le passé. Après trois ans, les jeunes veulent aller voir ailleurs.
Mais le réseau n’apporte-t-il pas cette mobilité?
Benoît Debande: Non, l’approche est beaucoup plus pragmatique. Quelle est la ligne de métro, de train…? Voilà les questions que les travailleurs se posent. En un an, le nombre de contrats établis par les ressources humaines du Chirec a doublé pour le même nombre de travailleurs. Il y a beaucoup plus de gens qui sont engagés et qui partent. Ce qui pose un problème par rapport à la continuité des soins dans les unités. Il faut garder des professionnels expérimentés dans nos hôpitaux. D’autant plus que les soins se spécialisent de plus en plus et que cette spécialisation requiert du personnel qualifié.
Francis de Drée: Au niveau de la pénibilité pour les médecins, le réseau peut être une solution, mais il faut une gouvernance qui précise comment les médecins travaillent ensemble, surtout dans les réseaux où des médecins sont indépendants et d’autres salariés. La dynamique de l’entraide joyeuse peut fonctionner à court terme mais doit nécessairement être remplacée par un système défini et équilibré sur le moyen-long terme. Il faut régler les statuts, la gouvernance médicale, créer un conseil médical unique, comme nous venons de le faire à l’HUB .
Dirk De Ridder (directeur de la qualité UZ Leuven, cofondateur de FlaQuM (Flanders Quality Model)): En termes de mise en réseau et de disponibilité du personnel, il est légalement impossible, par exemple, de déplacer les infirmières d'un campus à l'autre dans l'horaire de travail. Mieux vaudrait alors leur donner un contrat au niveau du réseau, ce qui ne se fait actuellement nulle part pour eux. En revanche, les premiers réseaux recrutent déjà des médecins au niveau du réseau. Ceux-ci sont alors spécifiquement chargés, par exemple, de faire des consultations d'endocrinologie deux jours par semaine au campus 1 et deux jours par semaine au campus 2. C'est un premier pas. Mais même là, la législation continue de freiner le mouvement.