Gynécologues : la pléthore va se poursuivre

Voici un an, le gynécologue liégeois, le Dr Pino Cusumano évoquait dans Le Spécialiste la question du travail autour d’un « cadastre des gynécologues. » : « Nous avions demandé à Benoît Collin de pouvoir faire une cartographie des gynécologues en place en Belgique en trois tranches d’âges : 30-40 ans, 40-50 ans et 50 ans plus...mais aussi quels sont leur nombre de patients, leur nombre d’accouchements, les échographies et leur nombre d’interventions chirurgicales... Nous voulions montrer de manière objective que la pléthore est une réalité dans certaines spécialités médicales et pour cela, nous devions nous baser sur des chiffres objectifs. » disait-il à l'époque.

Membre du comité technique médical de l’Inami, il siège sur le banc de l’Absym. Alors que le travail de cadastre se poursuit, il peut déjà confirmer que « la pléthore existe bien même s'il n’y a pas encore de cadastre. » 

Une meilleure compréhension de la réalité de terrain

Pour lui, un premier élément a déjà été atteint grâce au travail mené actuellement pour les gynécologues et pour tous les médecins : « Enfin, le cadastre pour l'ensemble des médecins se rapproche plus de la réalité du terrain. Les données sont plus objectives. On remarque par exemple, que sur le terrain  (médecins hommes ou femmes), plus personne ne veut accomplir un temps plein. Depuis le début de l’année, la commission de planification a introduit un facteur 0/20, c’est-à-dire que les médecins "font à peu près toutes et tous un 4/5e temps en théorie dans la méthode de calcul." A cela, il convient d'ajouter la fin de la double cohorte. Tout cela a amené à une augmentation du nombre de médecins possible par Régions. »

Meilleur rapport généraliste/spécialiste

Par ailleurs, il précise que « la correction du rapport spécialiste/généraliste a aussi permis un rééquilibrage indispensable. » Enfin, l’activité réelle des médecins a aussi été mieux analysée notamment en ce qui concerne les médecins qui gardaient un numéro Inami à vie : « La commission de planification exige un nombre de contacts patient qui est quasi la moitié de celui que l’on exige au niveau de l’accréditation où il faut 1200 à 1300 contacts-patients par an. Il faut signer même un document sur l’honneur à ce niveau. »

Malgré tout, selon lui, « Il existe toujours des différences régionales, ou à l’intérieur même de la Wallonie, parce qu’une fois que l’on a défini le nombre de médecins par région, ensuite, ce sont les Collèges des Doyens des Facultés de médecine qui se répartissent les postes. Par après dans chaque université, le Doyen avec ces chefs de service décide la répartition des nombres. Mais cela ne correspond pas nécessairement au besoin du terrain. »

Gynécologie: une question de société

Au niveau de la gynécologique, il n’y a pas de solution miracle selon lui. La spécialité se heurte à la réalité de la vie de la société : « Les gynécologues sont en surnombre depuis des années. On ne va pas récupérer cette situation en 4-5 ans. On ne le rattrapera même jamais au vu de ce qui est en train de se profiler dans notre société." 

Selon lui, les évolutions du mode de vie ont un impact direct sur la Spécialité : "Il y a tout d’abord une chute de notre natalité...qui ne s’améliore pas malgré ce que l’on a pu imaginer avec la crise du covid et le confinement : une baisse de 10% au niveau européen. Ce n’est pas rien. Par ailleurs, nous sommes effrayés de voir le nombre de jeunes femmes qui ont à peine trente ans et qui nous demandent une ligature « sans enfant ». Il ne s’agit pas de femmes défavorisées, mais ce sont des femmes qui font des choix de société (inflation, changement climatique, incertitude de la vie...) . Enfin, il y a un report de natalité qui est basé sur le carriérisme féminin qui est tout à fait légitime. »

Des gynécologues en dessous de 40 accouchements

Tous ces aspects amènent la pléthore gynécologique à se poursuivre.  « Certains Obstétriciens en Belgique réalisent à peine les 40 accouchements par an que l’on exige pour être sages-femmes (profession qui en France passe à 6 ans cet année). Un gynécologue est très occupé, s’il fait 100 accouchements par an. Evidemment, si un gynécologue ne fait pas le nombre demandé, il est plus difficile pour lui de venir critiquer le travail des sages-femmes. Je peux vous dire que tous les gynécologues n’ont pas des agendas qui débordent, loin de là. »

Actuellement donc, la cartographie n’est toujours pas une réalité notamment parce que tous les acteurs ne la souhaitent pas comme par exemple certains organismes assureurs qui veulent forfaitariser la pratique médicale. Le débat est donc toujours sur la table pour l'année en cours, mais on l'a compris, les enjeux sont bien plus complexes qu'une simple addition de chiffres. L'impact des modes de vie de la société actuelle touche pleinement la spécialité.

Lire aussi: Dr Pino Cusumano: «Nous travaillons sur un cadastre des gynécologues»

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Derniers commentaires

  • Danielo ABBATE

    11 aout 2023

    Il me semble que pour avoir un rendez-vous c’est très difficile…? Si pléthore pourquoi ces délais ?