France: une mobilisation historique des médecins libéraux ... mais ensuite ?

Le 14 février 2023, des milliers de médecins ont manifesté dans les rues de Paris entre la place Vauban et la place du Panthéon. Ils ont exprimé leur mécontentement face aux orientations récentes choisies par le gouvernement pour la médecine de ville. Les syndicats représentatifs tels que MG France, CSMF, FMF, UFML, SML,  le collectif des médecins pour demain ... et l'Ordre des médecins avaient  appelés les médecins  à participer à la manifestation. Entre 4 500 (selon la police) et 10 000 (selon les organisateurs) médecins ont participé à cette manifestation historique. Bien que quelques médecins hospitaliers se soient joints à la manifestation, la plupart des participants étaient des praticiens de ville.

En plus des revendications habituelles de la profession telles que la hausse des tarifs, la défense de la liberté d’installation, la surcharge administrative, les participants à la manifestation, jeunes et moins jeunes, ont exprimé leur inquiétude quant à l'avenir de leur profession. Ils ont déploré le fait qu'ils soient de plus en plus considérés comme "des médecins substituables", ce qui leur enlève tout le plaisir de pratiquer leur métier.

Le principal mot d’ordre de la manifestation était le rejet de la proposition de loi Rist  ( du nom de la députée et rhumatologue du Loiret , Stéphanie Rist ) adoptée à l’unanimité en première lecture par l’Assemblée nationale en janvier. Cette proposition de loi prévoit de permettre l’accès direct aux infirmiers en pratique avancée (IPA), aux kinésithérapeutes et aux orthophonistes, et ouvre le droit à la primo-prescription aux IPA. Les manifestants ont accusé le gouvernement de vouloir régler le problème de la pénurie de médecins en inventant une recette miracle qui implique coercition et dérégulation.

Malgré la forte mobilisation des médecins, le Sénat a adopté la loi Rist, mais avec plusieurs amendements. L'accès direct aux paramédicaux et la primo-prescription pour les IPA ont été encadrés et ne seront possibles que dans le cadre d'un exercice coordonné par un médecin. Les sénateurs ont également supprimé toute référence à un "engagement territorial" ou à une "responsabilité collective" des médecins. De plus, ils ont adopté un amendement permettant de sanctionner les patients qui ne se présentent pas à leur rendez-vous médical sans raison valable.

Le ministre de la Santé, François Braun, a déclaré comprendre l'inquiétude des médecins, mais a défendu la loi Rist en soulignant qu'elle permettrait de donner plus de temps de soins aux médecins, et que son objectif en tant que ministre était de couvrir les besoins de santé des Français. L'ancien médecin urgentiste a soutenu la suggestion de la CNAM ( l'équivalent de notre Inami ) visant à augmenter de 1,50 euros le prix de la consultation (de 25€ à 26,50€ ) qu'il considère comme une mesure non méprisante et qui pourrait être augmentée au cours des négociations conventionnelles toujours en cours (selon ses commentaires, "30 euros ne sont pas déraisonnables"), à condition que les médecins s'engagent à répondre aux besoins de la population, a-t-il souligné.

Pour rester conventionnés, les médecins généralistes vont devoir , entre autres, accepter plus de patient : 1 900 en "file active"c'est à dire ceux qui consultent au moins une fois dans l'année. "J'en ai 1 200 et ne peux pas les voir tous correctement", alerte Fancy Geller sur France 3, je suis déjà à 50h semaine, la seule façon de pouvoir voir plus de patients, c'est de réduire la durée des consultations."

La situation des médecins en France reste donc tendue, et de nombreux praticiens craignent pour leur avenir et pour la qualité des soins qu'ils peuvent fournir à leurs patients. La suite des événements dépendra en grande partie des négociations et des discussions entre les différents acteurs impliqués dans la santé en France.

Lire aussi: France: les médecins descendent pour la troisième fois dans la rue ce 14 février

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