« Il y a de bonne choses dans le rapport du KCE mais on aurait pu consulter les gynécologues de terrain. Ces experts ne pratiquent pas le sujet dont ils parlent. » selon Jacques de Toeuf, président honoraire de l’ABSyM
Surconsommation ou sous-consommation de soins lors des neuf mois de grossesse ? Le Centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE) entend résoudre la question en mettant en place un trajet de soins grossesse et des consultations de "conseil prénatal personnalisé" (CPP) qui permettrait un accompagnement sur mesure pour chaque grossesse afin d'éviter le sous-suivi et le sur-suivi médical. Le KCE vient de dévoiler un rapport à ce sujet. Pour Jaques De Toeuf, « il y a évidemment de bonnes choses dans ce rapport mais on n’a pas tenu compte de l’avis des gynécologues. On aura pu les consulter. »
Qui sont les experts ?
A la lecture de ce rapport, il est interpellé par les experts qui y ont participé : « Ils ne pratiquent pas le sujet dont ils parlent. Je suis surpris de voir la liste des experts externes qui ont été consultés : on voit surtout des membres ONE/K&G, des accoucheuses, des kinés, des épidémiologistes périnataux des écoles de santé publique, un expert de l’inami, un seul gynéco, aucun professionnel médecin qui accouche....c’est biaisé ! Cette volonté de systématisation rédigée par des experts en chambre ne tient pas compte de la réalité de terrain. Il y a des bonnes idées, mais il suffit de faire les bonnes recommandations aux gynécologues et sage-femmes. Enfin, on constate un biais linguistique dans ce rapport. La problématique de l’accouchement au Luxembourg n’est pas la même qu’à Anvers.»
Le coordinateur ? Le Gynéco !
Pour lui, « le rapport est composé de choses utiles comme le coordinateur du plan de soins de grossesses. Il faut évidemment que quelqu’un s’occupe du suivi de la grossesse...mais cela peut être le gynécologue comme il le fait déjà pour l’instant. Pourquoi réinventer la roue ? Le plan de soins personnalisé est une très belle idée mais ce qu’il propose c’est déjà ce qui est proposé par un gynécologue dès les premiers jours de la grossesse. »
A la lecture de ce rapport, il fait une proposition simple : « Ne compliquons pas tout. Il faudrait plutôt envoyer une brochure aux gynécos et aux sages-femmes de Belgique où l’on évoque la mise en place de trois consultations où l’on va vérifier avec la feuille de route la santé des femmes enceintes. Ce qui, soit dit en passant, est certainement déjà fait actuellement par la majorité des gynécologues. »
Compliquer la vie de la patiente
Pour lui, il y a un aspect dangereux à avoir « des coordinateurs qui ne soient pas les gynécologues qui font des accouchements. Pourquoi créer ce parcours de soins particulier qui va compliquer la relation de la patiente qui aura encore un intervenant en plus dans une période qui est déjà particulière pour elle. Et si elle a un souci ? Elle parle d’abord à son coordinateur ou à son gynécologue ? Soyons sérieux, gardons un trajet de soins le plus simplifié. »
Pas de question d’accessibilité
Il se veut rassurant sur un autre aspect : « Cela ne changerait rien à l’accessibilité financière ou à l’accès au dossier médical partagé. Par ailleurs, le médecin généraliste a aussi accès au dossier de son patient et peut assurer le suivi de sa patiente. Pour l’anecdote, il y a encore des généralistes qui font des accouchements en Flandre notamment. Il y a même encore un qui fait une centaine d’accouchement par an. »
Enfin, il condamne le procès fait au gynécologue. « Ce rapport semble dire que les gynécologues travaillent mal, mais ce n’est pas le cas. Il n’y a pas de raison de payer un forfait en plus. Je revendique l’idéologie qui est celle de la médecine à l’acte. »
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