Les premières femmes chirurgiennes ont dû faire face au machisme de leurs collègues masculins. Près de 30 ans après la création de la Medical Women's Association of Belgium (MWAB), on peut se poser la question : la profession est-elle encore un bastion masculin ?
À l'UZ Gent, il y a quelques dizaines d’années, Ilse Kerremans, chirurgienne pédiatrique, a été l'une des premières femmes à se frayer un chemin dans ce milieu "J'étais alors supervisée par le professeur Lacquet, qui était patriarcal et peu disponible pour les candidates, mais quand j’ai postulé, il a répondu : Oui, vous pouvez essayer ... Cela n’était même pas rémunéré en 1973."
Aux Pays-Bas, sa collègue Germaine Vos-Deckers, chirurgienne en formation de 1990 à 1996 et maintenant chirurgienne à Zevenaar, a témoigné dans De Volkskrant: « Les hommes ont vu qu’on ne pouvait plus tenir les femmes à l’écart. Il y avait beaucoup de collègues prêts à tirer sur elles si les choses tournaient mal. Ils pensaient par définition qu’une femme ne pouvait pas devenir chirurgien. »
Elle se souvient comment elle a d'abord essayé de s'adapter au comportement masculin et de faire les mêmes blagues. « C’était ridicule », admet-elle. À un moment donné, elle a laissé tomber le masque et s’est résolue à sa propre féminité. « A partir de là, la tempête s’est calmée. C’est celui qui avait du mal avec le fait que je sois une femme qui avait un problème, pas moi », analyse-t-elle maintenant.
Ilse Kerremans comprendra plus tard qu'en tant que femme, elle avait des aptitudes différentes, et qu'elle pouvait les développer en chirurgie : pour forger une relation durable avec le patient, son approche affectueuse était un plus. « Mais au début, j'ai eu du mal, surtout quand les patients me demandaient, après avoir été bien examinés : Et le docteur il vient quand ? »
Nathalie Roche, chirurgienne plasticienne à l’UZ Gent, tourne ces aptitudes féminines à l’avantage du patient : « Vous êtes moins susceptible de mourir lors d'une intervention menée par une chirurgienne, cela est dû au fait que les femmes communiquent mieux et travaillent mieux en équipe, qu'elles sont plus calmes et jugent avec plus de précision. Les femmes se jettent moins comme un poulet sans tête dans une opération, elles examinent d'abord toutes les options et en discutent les détails avec leurs collègues. Elles se comportent donc moins en macho. » (1)
Le Dr Kerremans précise « Maintenant que je mets les choses en perspective, les chirurgiens qui pensent encore que la qualité de leur travail dépend du nombre de décibels qu'ils émettent, sont en voie d’extinction. À l'époque, j'ai d'abord laissé mes collègues masculins s'épuiser quand ils devenaient agressifs, mais je ne me suis pas laissée faire. Si vous ne vous laissez pas impressionner, ça se règle vite. Le problème était surtout que je n'avais pas vraiment de modèle féminin. »
Même si le milieu se féminise, une étude américaine récente montre que les comportements machistes perdurent.
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