12 co-praticiens de l'insolvabilité pour accompagner les confrères en faillite

La conservation des archives médicales pendant de longs délais (30 ou 50 ans selon les cas) est une obligation morale, déontologique et tout simplement légale. Mais il y a des circonstances dans lesquelles cette conservation est mise en péril, notamment en cas de faillite d’un cabinet médical. La loi a imposé aux professions libérales la mise sur pied d’une fonction de « co-praticien de l'insolvabilité ». L’Ordre des Médecins y est impliqué.

Il arrive que des médecins ou des sociétés de médecins fassent faillite. « Le Conseil National s’en préoccupe », dit le Pr Christian Melot, vice-président francophone de l’Ordre National, « parce que des dossiers médicaux ou une documentation médicale spécifique peuvent se retrouver dans les archives du failli. Ces documents ne peuvent pas disparaître dans la faillite. Il faut préserver la confidentialité de ces dossiers et les extraire de l’ensemble pour les mettre en sécurité ». C’est pourquoi l’Ordre a instauré la fonction de « co-praticien de l’insolvabilité » ou de « co-curateur ». 

Il s’agit de médecins volontaires qui se proposent pour cette fonction. Ils se portent volontaires auprès de leur Ordre provincial ou de l’Ordre national. La liste de ces médecins volontaires est transmise aux parquets.  Les co-curateurs sont choisis dans cette liste et nommés par le juge pour exercer ce rôle. Une fois désignés, ils sont contactés par le Greffe ou directement par le curateur. Cela signifie qu’ils viennent seconder le curateur, nommé lui aussi par le juge et qu’ls ont pour mission de trouver et préserver les dossiers médicaux. Le succès remporté par cette formule est variable selon les endroits. Bruxelles fait figure d’exception avec pas moins de 27 candidats. Mais pour les autres provinces, le nombre de volontaires reste de deux ou trois. Pour être précis, signalons qu’il y en a 1 à Anvers, 2 en Brabant néerlandophone et à Liège, 3 en Flandre orientale ainsi qu’en Hainaut. Et il reste des provinces où personne ne semble intéressé. Parmi ces volontaires, 12 sont actuellement en activité. Une liste des co-praticiens de l’insolvabilité est disponible sur le site du SPF Justice mais elle ne compte que actuellement 18 noms. L’Ordre a fait récemment un nouvel appel aux volontaires et a reçu de nouvelles candidatures, ce qui explique la différence entre les chiffres cités plus haut et ceux de la liste officielle, qui doit être remise à jour.

On peut comprendre qu’il n’y ait pas énormément de volontaires car la fonction n’est pas nécessairement simple à exercer. Il arrive que les documents à rechercher se trouvent dans les endroits les plus inattendus. « On a connu le cas d’une société dirigée par un non-médecin », dit le Pr Melot, « et cette personne rangeait les archives de sa société dans un garage à distance du lieu d’exercice ». Il n’était donc pas évident de le savoir ni de retrouver les documents à préserver. Cela revient dans certains cas à chercher une aiguille dans une botte de foin.

Dans un autre cas, il s’agissait d’un médecin décédé après sa faillite : il a fallu explorer tous ses dossiers informatisés et recontacter les patients pour transmettre ces dossiers au médecin qui allait prendre la suite. Et si le patient ne désignait pas de nouveau médecin traitant, c’était à l’Ordre d’archiver le dossier. Il faut parfois y passer beaucoup de temps. Une autre difficulté encore est d’ordre organisationnel. Il arrive que le co-curateur soit convoqué par le juge à se rendre sur place avec lui ou avec un commissaire, à un moment où il donne ses consultations ou visite ses patients. Il faut alors faire fi de son activité professionnelle pour répondre à la convocation car ce genre d’affaire exige une priorité absolue. Enfin il n’y a pas de concertation sur les honoraires. Le juge est sensé fixer la part des honoraires de la curatelle qui reviendra au médecin co-curateur. Dans la réalité, ce n’est pas toujours le cas. Certains médecins qui avaient accepté de remplir une mission de co-curateur se sont parfois plaints de ne recevoir que la portion congrue pour une prestation non négligeable, voire de n’avoir rien reçu du tout.

> Lire aussi: 150 faillites de cabinets médicaux depuis 2018

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Derniers commentaires

  • Charles KARIGER

    12 juin 2023

    Deux poids, deux mesures...

    L'article 2276bis du Code civil impose aux avocats de conserver les pièces du dossier pendant cinq ans. Après ce délai, nous ne sommes plus responsable de la conservation des pièces.

    En général, nos dossiers sont archivés lorsque la mission est achevée et nos archives sont détruites cinq ans plus tard.

    Si notre mission constitue spécialement et principalement en un dépôt de pièce, notre responsabilité est éteinte après dix années.

    Les documents qui nous sont remis, même les documents originaux, ne sont restitués que sur demande expresse. A défaut, ils sont archivés avec les autres éléments du dossier.

    Il en va de même de tout document destinés au client ou à la gestion de son dossier et qui nous sont remis en vue d'être intégré au dossier.

    Il en résulte que si le client veut récupérer les pièces de son dossier, il doit en aviser son avocat de préférence à la clôture du dossier et sans attendre plus de cinq ans.


    Ex bono et aequo ?