Adam Castillejo, connu sous le nom de « London Patient », est la deuxième personne au monde à avoir été guérie du VIH. Lors du colloque BREACH Spring dont le thème était « HIV Cure », nous avons eu l’occasion de le rencontrer pour une interview exclusive.
Les cas de guérison du VIH sont rares. En tout, six ont été dénombrés de par le monde, toujours suite à une greffe de moelle osseuse. Le cas de M. Adam Castillejo ne fait pas exception. Pour mémoire, il a été contaminé en 2003, puis a développé un lymphome de stade 4 en 2012. Son cas a nécessité une greffe de moelle, mais vu son statut de personne vivant avec le VIH (PVVIH), aucune équipe médicale ne désirait le prendre en charge. Il a été placé dans une maison de repos et de soins jusqu’à ce que le Professeur Ravi Gupta (Cambridge, Royaume-Uni) connaisse son cas et décide de le traiter.
Adam, Vénézuélien d’origine, devait bénéficier de cette greffe de moelle osseuse, mais un donneur compatible n’a pas été facile à trouver. Finalement, il a pu bénéficier d’une greffe de moelle d’un donneur présentant une double délétion Delta-32. Celle-ci empêche le VIH de pénétrer dans les lymphocytes. En effet, les médecins ne voulaient pas seulement le guérir de son cancer, mais aussi du VIH. Le virus est alors incapable de se reproduire. En 2017, il arrête de prendre ses traitements antirétroviraux et en 2019, il est déclaré guéri du terrible virus.
Comment vous sentez-vous en tant que personne guérie du VIH ?
Je suis le même, mais en même temps, je sais que je suis privilégié et que j’ai un nouvel objectif dans ma vie : celui d’être porteur d’espoir. C’est pour cela que je témoigne à visage découvert.
N’avez-vous plus peur de la stigmatisation ?
Vous savez, la stigmatisation existe toujours vis-à-vis de moi, mais elle a évolué. J’ai été stigmatisé en tant que PVVIH, comme toutes les personnes qui vivent avec ce virus. Avec le cancer, les gens ont éprouvé beaucoup de compassion pour moi. Mentalement, c’est très conflictuel et compliqué. Aujourd’hui, certains PVVIH me rejettent, car n’étant plus séropositif, ils estiment que je ne fais plus partie de leur communauté. Cependant, je me considère comme une personne survivante au VIH.
Pensez-vous qu’un traitement curatif contre le VIH soit possible ?
C’est un des objectifs que je poursuis en témoignant. Mais il existe des barrières. Les gens ont parfois peur d’être guéris du VIH, car ils s’identifient à cette maladie désormais. […] J’ai mené une petite enquête au cours de mes voyages en demandant aux PVVIH de différents pays/continents s’ils désiraient être totalement guéris. Globalement, en Europe, en Amérique du Nord et en Australie, la réponse est « non, mais peut-être que oui », car ces PVVIH bénéficient d’un traitement efficace. En revanche, en Afrique, en Amérique du Sud et en Asie, les personnes que j’ai rencontrées voudraient en être débarrassées définitivement.
Quel est le message que vous voudriez donner aux professionnels de la santé par rapport à votre situation ?
Je pense qu’il est important d’être transparent par rapport à la guérison du VIH. Quand un patient pose une question à ce sujet, la plupart hésitent à répondre. Moi, je leur dirai : il n’y a pas encore de traitement totalement curatif aujourd’hui, mais il faut être réaliste tout en restant positif, car beaucoup de chercheurs travaillent sur ce sujet. Il est important de préserver la confiance des PVVIH à ce sujet. Il s’agit d’une approche holistique, complexe : soyons réalistes, mais en même temps, nous pouvons aussi donner de l’espoir.