Une amende pour les généralistes qui prescrivent trop d'antibiotiques ?

Tous les médecins généralistes ayant prescrit des antibiotiques à leurs patients au cours des cinq dernières années ont reçu cette semaine une lettre de l'Inami, l'organisme d'assurance maladie, dans leur boîte aux lettres. Ce courrier leur indique la fréquence à laquelle ils ont prescrit ces médicaments et s'ils ont respecté les directives en la matière, rapporte samedi De Standaard.

Cette lettre n'est qu'une première étape. Les médecins qui, dans un an, prendront encore trop souvent leur carnet d'ordonnances pour prescrire des antibiotiques devront s'en expliquer. Ceux qui ne pourront pas fournir d'explications valables risquent une sanction officielle, pouvant aller d'un avertissement au remboursement des antibiotiques prescrits à tort. Si la faute est intentionnelle, ces médecins risquent une amende, peut-on lire dans le quotidien flamand.

L'Inami a envoyé début juillet un courrier ( voir modèle ) à tous les médecins généralistes ayant prescrit au moins un antibiotique remboursé par l’assurance soins de santé au cours des 5 dernières années. Il s’agit d’un feedback individuel sur leur comportement de prescription par rapport aux indicateurs de déviation manifeste des bonnes pratiques médicales du CNPQ. Ce feedback concerne leur comportement de prescription avant la publication des indicateurs. Les médecins généralistes n’avaient donc pas encore eu l’occasion d’adapter leur comportement de prescription par rapport aux indicateurs. 
Ce feedback leur permet de se situer par rapport aux indicateurs, ainsi que par rapport aux autres médecins généralistes, et d’adapter leur comportement de prescription si nécessaire. 

Selon des statistiques de 2019, les médecins généralistes belges prescrivent en moyenne des antibiotiques sept fois sur dix personnes examinées.  Selon l’indicateur 1, le pourcentage de patients avec une prescription pour un antibiotique par rapport au nombre total de patients avec une prescription pour une spécialité pharmaceutique doit être de maximum :
• 45 % pour les patients âgés de 14 ans ou moins ;
• 23 % pour les patients âgés de 15 ans ou plus.

Les indicateurs s’adressent uniquement aux médecins détenteur du code de compétence 000, 001, 002, 003, 004, 005, 006, 008 ou 009.

La Belgique est l’un des pays qui consomme le plus d’antibiotiques au sein de l’UE. L’introduction de ces nouveaux indicateurs répond aux recommandations de la Cour des comptes (décembre 2022 -) et aux objectifs fixés par les ministres européens de la santé publique, dont le ministre Frank Vandenbroucke, de réduire substantiellement la consommation humaine d'antibiotiques d'ici 2030 (juin 2023)

Pour les autorités cette mesure est indispensable, car les conséquences de l'utilisation des antibiotiques ne sont pas négligeables : chaque année, plus de 35.000 personnes en Europe meurent d'une infection causée par une bactérie résistante aux antibiotiques. L'impact sanitaire en Europe d'une telle résistance est donc aussi important que celui de la grippe, de la tuberculose et du VIH/sida réunis.

Si l'intention est louable, le GBO/Cartel , dans une récente Flash Info , prévient qu'il "restera vigilant à ce que la promotion de la qualité ne soit pas confondue avec la police de la route ! " De plus, le GBO/Cartel regrette vivement que seule la prescription d’antibiotiques par les médecins généralistes soit évaluée alors que celle des autres prestataires de soin est encore loin d’être mise en oeuvre : tous les prescripteurs (autres spécialistes, dentistes, etc) devraient également participer à ce baromètre antibiotiques. Le syndicat défend une aide à la prescription faite par les pairs, mais refuse que soient mises en place des directives contraignantes.

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Derniers commentaires

  • Jacques SERVATY

    12 juillet 2024

    Être jugé par un organisme qui ne connaît pas le terrain et uniquement par des statistiques ! Médecin généraliste qui a repris du service après 6 ans d’arrêt pour compenser l’arrêt définitif de ts les confrères. Vraiment dégouté et arrêt définitif en vue . Occupé vous de la pénurie…

  • Charles KARIGER

    10 juillet 2024

    Et si l'INAMI (autorité scientifique mondialement respectée) regardait pour une fois la source la plus importante de résistances ?
    .
    Publication officielle : –Filières Avicoles Actualités en aviculture https://www.filieres-avicoles.com
    Avec 471 tonnes d’antibiotiques vendus, l’année 2018 enregistre la plus faible vente d’antibiotiques depuis le début du suivi en 1999. Si les ventes continuent de diminuer, l’exposition globale des animaux a augmenté pour la première fois entre 2017 et 2018. La raison : des médicaments distribués certes en quantité plus faible, mais aux molécules plus actives.
    la diminution des ventes en tonnage ne se traduit pas pour autant par une baisse de l’exposition des animaux aux antibiotiques. L’Anses a d’ailleurs mis au point un nouvel indicateur (ALEA), permettant d’évaluer cette exposition et pondérer les conclusions de la baisse des volumes des ventes. ... ...
    Ainsi, après une forte baisse observée depuis 2011 (-38,4 %), l’exposition globale des animaux a augmenté de 0,7 % entre 2017 et 2018. Une augmentation principalement due à la filière bovine (+8,4 %) alors que la volaille enregistre une basse de 11,3 %.... mais aux molécules plus actives.

    En 2018, le volume total des ventes s’élève à 471 tonnes d’antibiotiques et s’inscrit en baisse de 5,5 % par rapport à l’année 2017 (499 tonnes).
    Des antibiotiques plus actifs

    Cependant, si les ventes d’antibiotiques par voie orale diminuent, l’utilisation des injectables augmente. Or, ces antibiotiques récents sont généralement plus actifs et nécessitent l’administration d’une quantité plus faible de matière active.

    Par conséquent, la diminution des ventes en tonnage ne se traduit pas pour autant par une baisse de l’exposition des animaux aux antibiotiques. L’Anses a d’ailleurs mis au point un nouvel indicateur (ALEA), permettant d’évaluer cette exposition et pondérer les conclusions de la baisse des volumes des ventes. ...Ainsi, après une forte baisse observée depuis 2011 (-38,4 %), l’exposition globale des animaux a augmenté de 0,7 % entre 2017 et 2018. Une augmentation principalement due à la filière bovine (+8,4 %) alors que la volaille enregistre une basse de 11,3 %. ...En revanche, en 2018, le nombre de traitements intramammaires par vache laitière à base de Céphalosporines de dernières générations a augmenté de 2,3% entre 2017 et 2018. Et l’exposition aux Fluoroquinolones qui avait diminué de 87,8 % entre 2013 et 2017, a enregistré une nouvelle hausse en 2018 (14,2 %) pour les bovins, porcs, carnivores domestiques et chevaux, alors qu’elle a diminué pour les volailles.... ... e tonnage à destination des volailles a beaucoup diminué depuis 1999. En 2018, il est d’environ 86 tonnes, soit 8,8 % plus faible que le tonnage en 2017 et 57,3 % plus faible qu’en 2011.
    Depuis 1999, le niveau d’exposition des volailles aux antibiotiques a diminué de 30,7 %. D’après les ALEA par famille en 2018, les volailles sont traitées majoritairement avec des Polypeptides, des Tétracyclines et des Pénicillines, puis avec des Sulfamides et Triméthoprime. .. En 2018, on remarque que dans toutes les filières, la proportion de E. coli non sensibles (souches intermédiaires et résistantes) à l'amoxicilline a diminué par rapport à 2017 alors que celle vis-à-vis de l'association amoxicilline – acide clavulanique a augmenté.
    Source: https://www.filieres-avicoles.com/actualites/des-antibiotiques-moins-vendus-mais-plus-puissants
    Autre question: Quelles sanctions pour les horrrrrribles déviants ("outliers") qui ne prescrivent jamais d'AB ?

  • Jean-Claude LEEUWERCK

    09 juillet 2024

    Certaines Etudes sont au Médecin ce que le réverbère est à l'ivrogne... Elles soutiennnent plus qu'elles n'éclairent... Rien ne nous aura été épargné...

  • Phuong Cao Viêt

    09 juillet 2024

    Les antibiotiques, surtout ceux prescrits à bon escient, sont probablement les médicaments dont le patient peut le moins en faire l'économie. Cela occasionne un biais important, le patient ayant moins tendance à retirer en pharmacie les médicaments prescrits faisant partie de la prévention de la santé par exemple. Il est regrettable que l'inami tente de mettre en avant la narration d'une surprescription d'antibiotiques par les MG.

  • Igne PARMENTIER

    09 juillet 2024

    Durant le covid , les directives conduisaient à soigner l'affection par paracétamol. Les autorités sanitaires , confinées dans leur bureau , ignoraient bien sûr qu'une affection virale peut se compliquer de surinfection bactérienne.
    Si les généraliste avaient eu droit au chapitre, on aurait soigné le covid comme on a toujours soigné les grippes chez les patients fragiles . Et bien des décès auraient été évités.
    Laissez nous travailler en paix , faites confiance à notre expérience et notre vécu de terrain et allez chercher l'argent ailleurs . Nous n'allons pas nous contenter d'imposer les mains ! Et comme le dit un confrère , ci dessus , laisser les pathologies s'aggraver pour finir à l'hôpital ne fera qu'accentuer les déficits sans compter , évidemment, la détresse des patients . La résistance des antibiotiques constitue , bien sûr, un problème de taille mais cette résistance semble davantage provenir de l'utilisation massive d'antibiotiques dans l'agro alimentaire .
    Si vous souhaitez économiser sur la prescription des antibiotiques , supprimez en donc le remboursement !!!
    Igne Parmentier

  • Jean-Louis MARY

    08 juillet 2024

    Cette méthode d’évaluation ne tient absolument pas compte de la réalité de terrain et de la diversité des pratiques en MG.
    C’est hallucinant et ce n’est que le début : après ce sera le tour des anti diabètiques, anthypertenseurs , antidépresseurs…sans compter des DMG qui seront passés au scan sur des demandes en radiologie , biologie etc …
    Pendant ce temps, aucun frein n’est mis en place pour la surconsommation débridée des spécialistes hospitaliers mis sous pression par les gestionnaires pour équilibrer les budgets via les ponctions sur honoraires .
    Quelles sanctions pour les « mauvais prescripteurs » ?
    Les syndicats restent les bras croisés alors que ce qui se passe présage d’un système de santé despotique.
    Apte, on s’étonne de la timidité des jeunes médecins en s’orienter en MG.
    Un bon conseil: n’y aller pas, vous rivez trop tard.

  • Eliane LAMBERT

    08 juillet 2024

    Vous prenez en compte les années Covid où d' autres ont refusé de soigner tout court les patients en refusant de les voir.... Ils ont été renvoyé avec un Dafalgan.. On a traîné jusqu' à ce que on les hospitalise avec de gros problèmes ... Vous oubliez aussi que quand les patients viennent vous voir pour une infection dont ils ne sortent pas, ils ont déjà épuisé toute la panoplie du pharmacien... A réfléchir.. Vous vous trompez de cible... L'hopital est bien plus consommateur d'antibiotiques, d'examens de toute sorte.. La où la propédeutique est remplacee par radios scanner etc.. Là où les jeunes médecins n'examinent plus les patients et prévoient d'office des examens techniques...

  • Virginie DUFOUR

    08 juillet 2024

    Est-ce que l’etude de l’inami est lié à la prescription ou à la délivrance des antibiotiques. Car en effet j’ai aussi l’habitude de prescrire un antibiotique à prendre si pas d’amélioration surtout quand la teleconsultation n’existait pas. Comment savoir sur quoi se base cette étude de l’inami.

  • Philippe TASSART

    08 juillet 2024

    Je voudrais savoir si la statistique est basée sur les AB prescrits ou réellement délivrés. Il m'arrive assez fréquemment de prescrire un AB en expliquant bien au patient de ne le prendre que si sa maladie n'évolue pas bien dans les 5 jours qui suivent (surinfection) ou si des symptômes apparaissent tels ceux d'un sinusite ou autres. Si les stats tiennent compte des prescriptions (ce que je pense) il y aurait donc un biais dans l'étude car une ordonnance n'a jamais induit de résistance.

  • Stéphane RONNEAU

    08 juillet 2024

    Bref, ne prescrivons plus d'antibiotiques et envoyons nos patients infectés à l'hôpital quand la situation deviendra vraiment grave , pas de problème pour nous mais beaucoup plus coûteux en terme de vies humaines et de dépenses....Un baromètre qui ne regarde pas le nombre d'hospitalisations ou de renvoi vers le spécialiste pour infections ayant évolué, n'est qu'un outil de "normalisation" , typiquement : un processus Soviétique.

  • Henri GRYNBERG

    08 juillet 2024

    Majoration des prescriptions 2023 en particulier d’antibiotiques de seconde intention
    Et l’épidémie de mycoplasmes ?
    Et les pneumonies haemophilius?