Les professionnels de la santé représentent 1,1 % des patients décédés à l’hôpital des suites d’une infection au Covid. Ces chiffres communiqués par Sciensano, ne donnent cependant pas le nombre précis de médecins décédés. Une information jugée “non essentielle” par Sciensano, pour le suivi et la maîtrise de la pandémie.
Entre le 15 mars 2020 et le 18 avril 2021, 67.386 hospitalisations pour cause de Covid ont été enregistrées dans notre pays, dont 2,9 % – soit très exactement 1.954 – concernaient des prestataires de soins. Sciensano n’a pas spécifiquement consigné le nombre de médecins décédés. « Nous savons par contre que 2,9 % des personnes hospitalisées pour Covid sont des prestataires de soins, que 0,8 % des soignants de 18 à 65 ans hospitalisés pour Covid sont décédés et que les professionnels de la santé représentent 1,1 % des patients de 18 à 65 ans décédés à l’hôpital. »
Pas de plus-value
« Nous n’enregistrons pas d’informations détaillées concernant l’activité professionnelle des patients décédés parce que cela ne présente pas de plus-value dans le cadre du suivi et de la maîtrise de l’épidémie », explique un porte-parole de Sciensano lorsque nous l’interrogeons sur l’absence de chiffres plus précis. Cette position semble assez surprenante : si ces données avaient été recueillies d’emblée, elles auraient peut-être permis, par exemple, d’évaluer l’impact du manque d’équipements de protection au début de la pandémie. Les médecins sont tenus de transmettre une foule de données concernant la Covid aux autorités, mais celles-ci ne prennent même pas la peine de dresser le tableau des risques pour leur groupe professionnel !
Cet aspect reste d'ailleurs améliorable à l’échelon international aussi, ne fût-ce que pour parvenir à des chiffres comparables. Comment définit-on par exemple la notion de « travailleur de la santé » ? Amnesty International a fait une tentative en ce sens dans le cadre d’une comparaison internationale : ce groupe recouvre de façon très large les médecins, infirmiers, travailleurs sociaux, techniciens de surface, chauffeurs d’ambulances et personnel facilitaire actifs dans le secteur, ce qui illustre assez la nécessité d’un enregistrement plus précis…
Deux angles d’approche pour l’enregistrement
D’après les informations fournies par Sciensano, la cartographie des risques de la Covid-19 pour les hôpitaux repose sur deux piliers :
1) L’occupation des établissements en patients Covid-19 est enregistrée par le biais de la « Surge Capacity Surveillance », une enquête que les hôpitaux doivent obligatoirement compléter en vertu d’un arrêté royal.
2) Les profils à risque de Covid-19 (maladie grave, décès, etc.) font l’objet d’une seconde enquête, la « Clinical Hospital Surveillance », qui est complétée par les hôpitaux sur base volontaire mais reste représentative. C’est cette seconde enquête qui s’intéresse notamment à la part des professionnels de la santé dans les décès par Covid-19 (qui n’est toutefois qu’un facteur de risque parmi de nombreux autres).
Les deux enquêtes visent à évaluer les risques que le virus peut comporter pour les hôpitaux.
- Quelles sont les tendances en termes de nombre de lits disponibles ? (Surge Capacity Surveillance)
- Quels sont les profils qui se retrouvent plus rapidement à l’hôpital et risquent davantage de décéder de l’infection ? (Clinical Hospital Surveillance)
« Eu égard à la capacité d’accueil limitée des hôpitaux, ce sont ces données cruciales que nous surveillons », explique Sciensano. « Dans ce contexte, la question de savoir si une personne travaille dans le secteur de la santé est évidemment pertinente, puisqu’on veut savoir dans quelle mesure ces professionnels courent un risque ou se retrouvent hors circuit. »
Pas essentiel
« La question de savoir combien de médecins sont décédés des suites d’une infection Covid-19 sort par contre du champ de nos recherches, qui concernent les risques pour la capacité de prise en charge et les risques pour les hôpitaux. En outre, comme l’enquête sur les profils à risque (Clinical Hospital Surveillance) est complétée sur base volontaire, nous ne disposons de toute façon pas de chiffres précis. »
Un enregistrement un peu plus précis en fonction des groupes professionnels impliqués dans le traitement de la covid-19 n'est donc pas "essentiel" pourSciensano. Dont acte.
Notre pays n’a certes pas le monopole d’un tel enregistrement lacunaire, mais cela ne signifie pas pour autant qu’il faille s’y résigner. Amnesty International s’est déjà essayé à une comparaison internationale, avançant en septembre un chiffre d’au moins 7.000 décès Covid parmi les travailleurs de la santé, mais il est fort probable que ces chiffres sous-estiment largement la réalité. C’est au Mexique que l’infection aurait fait le plus de victimes dans ce groupe.
Le personnel de santé et les droits de l’homme
Pour la Belgique, Amnesty concluait qu’il était « essentiel » que « les autorités belges évaluent la gestion de la pandémie et rendent des comptes à ce sujet. C’est aux parlements de faire les premiers pas en ce sens et il est capital que les évaluations soient complètes. La préoccupation centrale doit être de garantir le respect des droits de l’homme au personnel de santé et aux autres professions essentielles, mais aussi aux résidents des maisons de repos et aux autres groupes vulnérables de notre société », a déclaré Wies De Graeve, directeur d’Amnesty International Vlaanderen, lors de la publication du rapport.
De son côté, dès juin 2020, L’Absym réclamait déjà un cadastre des décès. Son président, Philippe Devos estimait que c’est le moindre des hommages à rendre au personnel soignant décédé : "Tous ces gens qui ont fait le sacrifice de leur vie dans l’exercice de leur profession méritent plus qu’une stèle au soldat inconnu. Ils méritent vraiment que leur nombre et leur identité soient connus de manière à leur consacrer un moment de commémoration adéquat" déclarait-il à la RTBF.
Lire aussi: Un professionnel de la santé meurt du Covid-19 toutes les 30 minutes dans le monde
Derniers commentaires
Alain JORION
22 avril 2021Ce qui est sûr , c' est que les planqués de Sciensano ne risquent pas de mourir de la covid dans l' exercice de leurs fonctions. Prompts à inventer des procédures administratives pour compliquer le travail dangereux sur le terrain que les médecins de première ligne effectuent sans broncher ( à tort ! ), ils ne s' exposent que mollement et n' ont donc cure de ceux qui y laissent leur vie ou leur santé. Quand je vois que leur boss prétend être frappé d' un burn out ! Ecoeurant !
Alain Jorion
Christian GERON
20 avril 2021sciensano ......tiens??? ça existe toujours ....
Dr Geron Herve
Stephan SPELEERS
19 avril 2021Un scandale de plus mais qui n'étonnera et ne trompera personne. Nous sommes considérés comme des insignifiants faire-valoir et ce n'est pas neuf . Ils attendrons encore longtemps la transmission de mes données!!!
Dr Speleers
Alain Pierson
19 avril 2021C'est bien la preuve des mensonges et manipulations ded experts de Sieur Vandenbroucke et comparses.