Face à la pression croissante sur les services d'urgence en Belgique, trois chercheurs belges ont réalisé le premier baromètre national de l’adoption de l’intelligence artificielle (IA) en médecine d'urgence. Ce projet, mené par Mme Valentine Péters, la Dr Allison Gilbert et le Pr Giovanni Briganti, met en lumière les perceptions, les attentes et les craintes des professionnels de l’urgence face à cette technologie.
Trois chercheurs belges ont entrepris une étude approfondie sur l’intégration de l’IA dans les soins urgents, son adoption et ses perspectives sur le territoire belge. Mme Valentine Péters, infirmière en soins intensifs et aide médicale urgente, la Dr Allison Gilbert, médecin urgentiste et chercheuse postdoctorale en IA et santé digitale, et le Pr Giovanni Briganti, chef de service du Département de Médecine Computationnelle et Neuropsychiatrie de l’université de Mons, ont collaboré pour explorer les conceptions et craintes des professionnels de l’urgence envers l’IA en Belgique. Leurs résultats, constituant le premier baromètre national de l’adoption de l’IA dans les soins urgents, sont désormais disponibles en ligne (voir FlipBook et PDF ci-dessous)
Un intérêt croissant
Cette étude met en lumière l’intérêt croissant des professionnels de la santé pour l’intelligence artificielle, bien que son utilisation dans la pratique soit encore limitée. Selon les résultats du baromètre, 78,81% des professionnels interrogés manifestent un intérêt marqué pour l’IA. Cependant, seulement 25,95% utilisent actuellement des outils d’IA dans leur pratique quotidienne, notamment des programmes d’assistance à l’interprétation d’examens d’imagerie (45,05%) et à la prise de décision pour les électrocardiogrammes (11,71%)
Confiance en l'IA pour différentes tâches
L'étude montre que la confiance des professionnels varie selon les tâches attribuées à l'IA. Si 74,05% des participants lui font confiance pour des tâches administratives, ce chiffre baisse pour des décisions cliniques plus complexes : 45,95% pour le choix du vecteur de l’aide médicale urgente (AMU) et 44,76% pour évaluer le niveau de gravité d'une urgence. La confiance chute encore pour la réalisation de gestes techniques, avec seulement 26,43% d’opinions favorables. L’IA reste également perçue avec prudence pour l'orientation des patients (38,81%) et la détection de l’urgence dans les appels au 112 (44,29%)
Bénéfices de l'IA dans le domaine des urgences
Malgré ces réticences, les professionnels reconnaissent des avantages clairs. Le monitoring vital et la détection d'anomalies sont cités par 66,90% des répondants, tandis que 62,38% estiment que l'IA pourrait libérer du temps pour des tâches à plus forte valeur ajoutée. Elle est également perçue comme un atout pour la gestion des flux (60,71%) et la réduction des erreurs médicales (50,48%)
Ces résultats montrent que l’IA pourrait contribuer à désengorger les services d’urgence en optimisant la gestion des ressources, tout en permettant aux professionnels de santé de se concentrer sur des tâches à plus forte valeur ajoutée.
Le Professeur Patrick Van de Voorde, président de la Belgian Society of Emergency and Disaster Medicine, souligne que " l’IA fait partie des innovations futures qui transformeront les services d’urgence."
Les principaux risques perçus
Cependant, cette technologie soulève également des inquiétudes parmi les professionnels. Le baromètre révèle que si 78,81% des répondants se montrent intéressés par l’IA, beaucoup demeurent méfiants. Les principaux risques perçus incluent la perte de la pensée réflexive et une déshumanisation du travail, avec 81,16% des participants craignant que l’usage excessif de l’IA ne compromette la qualité des soins humains.
L'importance de la formation
L’étude souligne aussi l’importance de la formation pour surmonter ces appréhensions. Actuellement, peu de professionnels ont reçu une formation spécifique, ce qui freine l’adoption de l’IA.Près de 47,14% des participants expriment un désir de formation, signalant une ouverture vers l’apprentissage et l’acceptation de ces nouvelles technologies.
Les chercheurs insistent également sur la nécessité d’un cadre réglementaire clair et de la sécurisation des données pour renforcer la confiance des professionnels envers l’IA. En effet, 69,52% des participants jugent que la protection des données est un enjeu crucial. Ce besoin de sécurité, associé à une meilleure transparence des algorithmes utilisés, est vu comme une condition sine qua non pour garantir l’adoption efficace de l’IA dans le domaine des urgences.
Finalement, si l’IA est perçue comme un outil potentiellement révolutionnaire pour accélérer les diagnostics et optimiser les interventions, son intégration réussie dépendra de l’acceptation et de la préparation des professionnels de santé. Grâce aux contributions de divers spécialistes du domaine de l’urgence, cette étude offre une vision claire des opportunités et des défis liés à l’introduction de l’IA dans les services d’urgence en Belgique.
> Consultez l'essentiel des résultats ( FlipBook ) ( PDF )
> Découvrir l'intégralité du travail de recherche
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