Il n'est pas toujours facile d'être le premier, mais certainement pas non plus d'être le dernier : la Belgique est l’un des derniers pays de l’Union européenne à avoir légalisé le titre professionnel particulier d’infectiologue clinique en mai 2020.
Plusieurs années auparavant, des appels avaient été lancés non seulement par la profession, mais aussi par des organismes tels que l'ECDC (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies), en faveur d'un agrément officiel et d'un titre professionnel. L'un des principaux objectifs était de renforcer l'offre d'infectiologues cliniques bien formés et de mieux répondre à la question de la résistance aux antimicrobiens dans le contexte belge. Parallèlement à l’agrément de l'infectiologie clinique, le titre professionnel spécial de microbiologie médicale a été créé.
Jusqu'en 2020, il n'y avait donc officiellement pas d'infectiologues en Belgique. Il y avait bien sûr des médecins qui traitaient et suivaient des personnes atteintes de maladies infectieuses, mais il n'existait pas d’agrément ni de filière de formation officiels. D'une part, les critères d’agrément fixés permettent aux médecins qui travaillent déjà dans le domaine des maladies infectieuses, de demander l’agrément d’infectiologue clinique, grâce aux des mesures dites transitoires. En principe, le titre professionnel particulier et la formation sont accessibles à toute personne ayant déjà obtenu un autre agrément de « niveau 2 » y compris la médecine générale. En pratique, cela concerne principalement les pédiatres et les internistes de tous les sous-domaines. Les pneumologues, les hématologues, les néphrologues, les intensivistes,... qui exercent une partie significative de leur activité professionnelle dans le domaine de l'infectiologie clinique, peuvent être agréés après une évaluation de l'expérience et des compétences pertinentes par les commissions d’agrément spécifiques (NL/FR). À cette fin, il est important d'être cliniquement actif dans un large spectre de maladies infectieuses, en d'autres termes d'avoir des connaissances et une expertise transversales à l'échelle de l'hôpital, au-delà des infections spécifiques de sa propre spécialité de base. Entre-temps, plus de 120 spécialistes ont été agréés rétroactivement en Belgique.
D'autre part, l’agrément a également ouvert la possibilité de créer une formation en infectiologie clinique. Après avoir terminé votre formation (niveau 2), par exemple en tant qu'interniste général, pédiatre ou pneumologue, vous pouvez suivre une formation complémentaire en infectiologie clinique. La formation dans cette sous-spécialité dure quatre ans, mais un nombre important d'exigences en matière de stage sont généralement satisfaites pendant la formation de base (par exemple, les stages cliniques obligatoires en soins intensifs ou dans certains services de médecine interne). Ainsi, dans la pratique, la formation dure généralement 24 mois, y compris les stages dans le service de microbiologie et dans un centre de référence pour le VIH/SIDA. Actuellement 16 jeunes fellows de différentes disciplines suivent la formation d'infectiologue clinique en Belgique.
Que fait l'infectiologue dans la pratique ?
Le champ d'activité peut varier en fonction du cadre spécifique de l'emploi, par exemple un service académique ou universitaire de maladies infectieuses, ou une association plus large d'internistes ou de pédiatres, ou encore des instituts spécifiques comme l'Institut Tropical d'Anvers.
L'un des principaux piliers de l'activité concerne le diagnostic et le traitement d'infections plus complexes telles que les infections de matériels prothétiques et des articulations, les infections chez les patients immunodéprimés ou transplantés, et les infections postopératoires graves, par exemple en chirurgie digestive, cardiaque ou en neurochirurgie. En ce sens, les infectiologues cliniciens sont omni-déployables dans la plupart des services cliniques pour des consultations sur des problèmes infectieux plus complexes. Un domaine spécifique englobe les soins liés au VIH, y compris la PEP/PrEP (prophylaxie post- et pré-exposition) proposée dans les centres de référence, et les conseils avant et après le voyage, y compris le diagnostic et le traitement des maladies tropicales, peuvent également faire partie du domaine principal de l'infectiologue dans certains centres.
Depuis la pandémie de COVID et son impact majeur sur la société, un public plus large a pris conscience de l’importance fondamentale de la contribution et de l'expertise des infectiologues dans le domaine de la gestion des épidémies, à la fois dans les hôpitaux, les autres institutions de soins et dans la politique (inter)nationale. Dans ce cadre, il convient de noter que les infectiologues sont également très impliqués dans la politique rationnelle en matière d'antibiotiques, à la fois dans le contexte hospitalier (groupe de gestion d’antibiotiques) et à l'extérieur de celui-ci, par le biais de la gestion des soins primaires, par exemple (Projet HOST). Cela permet de mieux lutter contre la pandémie de résistance aux antimicrobiens.
Obstacles multiples au développement de la spécialité en Belgique
La nécessité d'établir une union professionnelle découle en grande partie de la persistance de multiples difficultés dans le développement de la spécialité en Belgique. L'un des principaux obstacles est l'absence de rémunération décente, car le manque de performance technique rend la nomenclature de la plupart des infectiologues cliniques dérisoire. Cela nuit à l'attractivité de la profession, tant auprès des jeunes futurs collègues que des directions d'hôpitaux. La révision de la nomenclature et la réévaluation des prestations « intellectuelles », ainsi qu'une utilisation plus judicieuse des taux forfaitaires, pourraient permettre d’améliorer significativement la situation à l'avenir. Nous souhaitons également mieux défendre les intérêts des infectiologues cliniques dans certains dossiers spécifiques, tels que l'accord sur l'hospitalisation à domicile ou le cadre de la gestion des épidémies, comme l'épidémie de variole du singe.
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