Le Green Hospital et la durabilité ont été au cœur de nombreux débats et ateliers organisés lors des deuxièmes Journées de l’architecture en santé (JAS) de Bruxelles. Les autorités régionales, Aviq et Vivalis, ne devraient-elles pas intégrer dans leurs plans de construction des critères de certification de la durabilité pour sélectionner les projets qui vont devoir à l’avenir être financés?
Plusieurs architectes spécialisés ont présenté lors des JAS les meilleures façons de réduire l’empreinte carbone des hôpitaux belges - plus élevée, selon un expert, que celle de nos aéroports - : verdurisation des toitures, utilisation de la géothermie et des panneaux solaires, recyclage des eaux usées, tri sélectif des déchets, réorganisation de la mobilité des travailleurs et des patients…
Lors de la modération du débat «Green Hospital: transition ou révolution?» Aline Hotterbeex (responsable hôpitaux et pôle santé chez Unessa) a résumé de façon lapidaire ce que pensent de nombreux intervenants: «La durabilité c’est comme la qualité, ce n’est pas un coût mais un investissement .
Reste évidemment à convaincre les gestionnaires hospitaliers de cette assertion. Certains le sont déjà. Yves Van Hooland, directeur infrastructures d’Epicura, a présenté le plan Boost du centre hospitalier (lire Le Spécialiste N°218), qui va investir 20 millions d’euros sur 3 ans pour réduire ses coûts énergétiques et assurer la transition écologique.
Régulation économique
Bernard Michaux, directeur adjoint distribution public et social banking chez Belfius, a replacé le débat dans les contextes européens et économiques. Il a insisté sur la qualité de la certification réalisée par des agences spécialisées pour évaluer et améliorer les performances environnementales des bâtiments. «Toutes les certifications n’ont pas la même valeur. Il faut vérifier le niveau d’indépendance des certificateurs, la qualité de la transparence et du processus de vérification des preuves et sa fréquence… Tout cela permet d’éviter des scandales liées au «greenwashing»… Chez Belfius, nous avons analysé 50 à 60 certifications… Il faut également viser l’excellence au niveau la certification», conseille Bernard Michaux.
Le banquier regrette qu’actuellement le deuxième Plan de construction hospitalier de l’Aviq et le plan de construction de la Cocom (Vivalis) ne contiennent pas d’informations sur les niveaux de certification que les hôpitaux devront atteindre. «C’est assez paradoxal. On dit aux hôpitaux d’être «durables», mais on ne leur dit pas comment ils doivent atteindre ces objectifs.»
Bernard Michaux a souligné que les banques utilisent depuis de nombreuses années le reporting au niveau de la durabilité. «Cela représente un important travail de récolte de données. Aujourd’hui, nous sommes confrontés au Pacte vert, le fameux Green Deal européen, qui a pour objectif la fin des émissions nettes de gaz à effet de serre d’ici à 2050 et la réduction de ces émissions d’au moins 55 % d’ici à 2030. Des directives et une taxonomie sont mises en place pour atteindre ces objectifs. Les banques sont fort attentives à ces nouvelles règles qui vont devoir être appliquées pour qualifier un produit d’investissement de «green». Ces directives vont être traduites dans le droit belge dans le courant du mois de juillet. Cette législation va impacter les entreprises qui ont un chiffre d’affaires supérieur à 40 millions d’euros, un total bilantaire de plus de 20 millions d’euros et plus de 250 ETP. Cela veut donc dire que toutes les institutions hospitalières vont devoir entrer dans ce système, à partir de 2026. A côté du rapport financier qui est réalisé par les hôpitaux, il faudra désomais un rapport non-financier qui va intégrer tous les éléments de durabilité, d’émission de CO2… Des efforts conséquents vont devoir être réalisés par les institutions de soins. Quel sera la politique de notre banque? Actuellement, rien n’est arrêté. Mais la question à se poser est quel sera l’accès aux capitaux pour les hôpitaux qui auront un profil vert et ceux qui ne l’auront pas? Même si l’accès aux soins de santé reste un enjeu capital dont tout citoyen doit pouvoir bénéficier.»
Construit-on trop d’hôpitaux?
Au-delà des considérations sur la durabilité, le directeur adjoint, a jeté un pavé dans la mare face aux nombreux gestionnaires hospitaliers, architectes et entrepreneurs présents dans la salle: «Avant de parler de rénovation et de reconstruction, voire de rénostruction des infrastructures hospitalières, il faudrait se poser la question de savoir si tous les hôpitaux sont nécessaires? A Gand, deux hôpitaux, un général et un universitaire, ont des projets de construction faramineux. On parle de budget s’élevant à 500 millions pour l’un et 1,5 milliard pour l’autre. Ils sont situés à 500 m l’un de l’autre… Ils vont reconstruire à un dimensionnement qui ne sera pas optimal… sauf si on intègre ces projets dans un ensemble cohérent. Le dialogue entre les gestionnaires est important pour définir l’offre de soins et, au final, l’accessibilité pour les patients.»