Pour ce gynécologue liégeois, « La pléthore est une réalité dans certaines spécialités médicales, mais il faut pouvoir discuter sur des chiffres objectifs ». Il travaille avec le Collège des gynécologues francophones une cartographie des gynécologues en place en Belgique en trois tranches d'âge.
Gynécologue, le Dr Pino Cusumano, a réagi ce week-end sur le compte twitter du Spécialiste à un débat sur la pénurie des médecins. Que pense-t-il du numerus clausus, y a-t-il trop de médecins ? Pas assez ? Membre du comité technique médical de l’Inami, il siège sur le banc de l’Absym.
Le 4 décembre dernier, le Collège des gynécologues francophones avait une demi-journée de travail sur la défense professionnelle : « Ce jour-là, j’ai accepté de travailler sur la planification médicale. Le problème, c’est que tout le monde parle en chiffre de pénurie du nombre de médecins, mais les discussions ne reposent sur aucun élément objectif.»
Un cadastre détaillé
Lors de cette réunion, il a fait une proposition : « Nous avons demandé à Benoît Collin de pouvoir faire une cartographie des gynécologues en place en Belgique en trois tranches d’âges : 30-40 ans, 40-50 ans et 50 ans plus...mais aussi quels sont leur nombre de patient, leur nombre d’accouchement, les échographies et leur nombre d’interventions chirurgicales...Ce cadastre sera réalisé de manière anonyme. Nous voulons montrer de manière objective que la pléthore est une réalité dans certaines spécialités médicales »
Pas contre les jeunes médecins en formation
Son travail, il veut le mener pour le bien des jeunes médecins en formation aussi : «Je ne veux pas de tension avec les médecins en formation. Je suis tout à fait d’accord sur le fait qu’ils sont traités comme des vaches à lait. En plus, quand on va les mettre sur le marché, ils n’auront peut-être pas assez de travail. Moi, je veux les aider avec une cartographie claire. Par ailleurs, j’ai été très surpris que des assistants me disent qu’ils pensent que nous avons des agendas complets à 6 mois. Je peux vous dire que tous les gynécologues n’ont pas des agendas qui débordent, loin de là. »
Même pas 40 accouchements par an
Mais quand un gynécologue a-t-il assez de travail ? « Un gynécologue est très occupé, s’il fait 100 accouchements par an, mais je peux vous dire que dans les grands centres urbains, il y a des gynécologues que ne font même pas 40 accouchements par an. C’est-à-dire ce que l’on demande à une sage-femme pour avoir son diplôme. Il n’y a donc pas de pénurie.»
Pour lui, le phénomène est le même dans d’autres professions : « Il y a des chirurgiens qui cherchent du travail, certains font moins de 10 interventions par semaine. C’est pour cela qu’il faut réellement une cartographie des activités pour voir de manière précise qui fait quoi et à quelle fréquence.»
Il sait que le métier est en évolution : « J’ai conscience que certains médecins ne veulent plus travailler autant qu’avant. C’est leur choix. »
Forfaitariser la pratique médicale
Il souligne aussi que des freins existent aujourd'hui à la mise sur pied d'une cartographie généralisée: « certains organismes assureurs ne veulent pas jouer le jeu des cartographies parce qu’ils veulent forfaitariser la pratique médicale. Ils vont peut-être y arriver parce que c’est ce que cherchent certains jeunes. Toutefois, quand ces jeunes auront fait 11 ans d’étude pour être salariés, ils risquent d’être très déçus. »
Renouer le dialogue
Le dossier de la planification médical reste complexe. Les divergences de vues sont liés à un problème générationnel car les informations entre la jeune et l'ancienne génération ne sont pas les mêmes. Il est primordial de rétablir le dialogue et que les jeunes et les anciens puisse autour d'une table discuter sereinement mais sur des bases réelles , d'où l'importance d'une cartographie de l'activité et non pas une cartographie du nombre!
Les spécialistes doivent reconnaître qu'il faut à tout prix inverser la proportion de médecin généraliste / spécialiste,
car ils sont probablement ceux qui sont le plus défavorisé par le numerus clausus dans sa forme actuelle.
Il faut renouer le dialogue sur des bases concrètes. Les associations de médecins en formation et les représentants de la défense professionnels doivent se mettre autour d'une table, avec comme arbitrage L’INAMI et ses bases de données qui pourront nous fournir des chiffres qui correspondent à la réalité du terrain et permettre un dialogue qui doit être à tout prix constructif.
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