Si elles sont rares, les "morts maternelles" existent toujours en France, et le suicide en est devenu la première cause, selon une étude publiée mercredi par l'Inserm et Santé publique France. La recherche n'inclut pas la période de la pandémie de Covid.
Environ 90 femmes décèdent annuellement d'une cause liée à la grossesse ou à l'accouchement, soit selon une tous les quatre jours en moyenne, selon cette étude.
Entre 2016 et 2018, 272 morts maternelles ont été recensées, sur la période entre la conception jusqu'à un an après la fin de la grossesse. Dans la moyenne européenne, le ratio de mortalité maternelle (11,8 décès pour 100.000 naissances vivantes) n'a pas évolué par rapport aux enquêtes précédentes.
Mais, cette fois, le suicide - avec d'autres causes psychiatriques - ressort comme la première cause de mortalité maternelle (17%), devant les maladies cardiovasculaires (14%).
"C'était la deuxième cause, ça devient la première: ce n'est pas une modification de tendance radicale mais une confirmation accrue du poids des suicides", a déclaré à l'AFP Catherine-Deneux Tharaux, directrice de recherche à l'Inserm.
Depuis une dizaine d'années, les hémorragies obstétricales ne sont plus prépondérantes, "une bonne nouvelle", souligne la spécialiste d'épidémiologie périnatale. Réduite de moitié en 15 ans, la mortalité due à ces saignements excessifs pendant l'accouchement ou dans les 24 heures suivantes stagne désormais, dans le haut de la fourchette des pays européens.
Au-delà de 2018, "la mortalité maternelle va augmenter à cause de la pandémie de Covid, notamment car les femmes enceintes étaient plus à risque de formes graves", selon Catherine-Deneux Tharaux.
Pour ces décès, de fortes inégalités, territoriales et socio-démographiques persistent. Le risque est ainsi multiplié par deux en Outremer, comparé à la métropole - l'écart était supérieur auparavant.
Pour les femmes migrantes, la mortalité est en moyenne deux fois celle des natives de France. Et les femmes socialement vulnérables sont 1,5 fois plus représentées parmi les décès maternels.
L'âge augmente aussi le risque, "de façon marquée" après 35 ans, tout comme l'obésité, avec deux fois plus de morts maternelles chez des femmes obèses.
"Une amélioration est possible, car plus de la moitié des décès maternels sont considérés comme probablement ou possiblement évitables, et, dans deux tiers des cas, les soins dispensés n'ont pas été optimaux", souligne l'étude.
Pour éviter des suicides, "les facteurs de risque, personnels et familiaux, de dépression périnatale doivent être connus des professionnels (...) et recherchés tout au long du suivi de la grossesse et du postpartum", recommandent les experts.
Dans le monde, une femme meurt toutes les deux minutes de complications liées à la grossesse ou à l'accouchement (jusqu'à 42 jours après), selon des estimations en 2023 d'organismes des Nations unies.