Onze millions d'euros vont être investis pour assurer un meilleur suivi des mères vulnérables pendant et après leur grossesse, a annoncé le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke samedi. Ce nouveau trajet de soins, basé sur les recommandations du Centre fédéral d'expertise (KCE), sera mis en œuvre sur le terrain à partir du 1er avril 2024, en collaboration avec les entités fédérées.
Le ministre a chargé l'assurance soins de santé et indemnités (Inami) d'élaborer un trajet multidisciplinaire de soins périnatals, prêtant une attention particulière aux femmes vulnérables. "Il s'agit d'investir dans des soins de qualité et appropriés à l'approche de l'accouchement, mais aussi dans les mois qui suivent, aussi bien pour les soins de l'enfant que pour les soins aux parents", souligne le ministre.
En Belgique, environ 4% des femmes ne bénéficient pas du nombre minimum recommandé de consultations prénatales et 3% n'ont pas de contact avec un prestataire de soins pendant les 20 premières semaines de grossesse, selon M. Vandenbroucke. Certaines études parlent par ailleurs de 20 à 25% des mères souffrant de problèmes de santé mentale, pendant la grossesse ou après l'accouchement.
Ce nouveau trajet de soins sera mis en place selon une approche à trois niveaux. D'abord, l'Inami veillera proactivement à identifier et approcher les mères en situation de vulnérabilité. Ensuite, un prestataire de soins leur proposera une approche multidisciplinaire sur mesure, et assurera un suivi régulier à domicile. Enfin, un coordinateur de soins sera assigné à chaque femme concernée.
La prochaine étape sera de finaliser la concertation avec les entités fédérées sur la manière dont ce trajet de soins sera intégré dans une approche globale de la vulnérabilité des mères, sur les moyens que les communautés elles-mêmes déploieront à cet effet et sur la manière dont les aspects pratiques tels que l'échange de données seront organisés.
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Pierre Rousseau
11 décembre 2023Le Communiqué de Presse de Frank Vandenbroucke du 4 décembre 2023 annonce un investissement de 11 millions d’euros pour le suivi des mères vulnérables pendant et après la grossesse. L’annonce de cette bonne nouvelle insiste à juste titre sur l’importance des 1000 premiers jours de vie de l’enfant. Il est bien établi que le stress de la femme enceinte induit dans le cerveau du fœtus des altérations épigénétiques qui sont associées à des risques de maladies physiques (obésité, diabète, maladies cardio-vasculaires), de déficits cognitifs, de comportements violents et de maladies psychiatriques dans le cours de la vie de l’enfant. (Van den Berghe et al., 2020. DOI: 10.1016/j.neubiorev.2017.07.003 ). Le Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE) ne propose cependant aucun outil qui permette le repérage du stress prénatal chez les 20 à 25 % de femmes enceintes qui souffrent de problèmes de santé mentale alors qu’un tel outil existe et qu’il est largement utilisé à l’échelle mondiale.
Cet outil, l’Edinburgh Postnatal Depression Scale (EPDS), a été mis au point il y a plus de 25 ans pour le dépistage de la dépression postnatale et validé depuis lors pour être utilisé en prénatal. Des chercheurs australiens l’ont récemment utilisé pour repérer et traiter les différentes formes de stress prénatal : dépression, troubles anxieux, état de stress post-traumatique, maladies psychiatriques, en le proposant systématiquement lors de l’inscription en consultation prénatale. Les résultats montrent que la passation de l’EPDS demande peu de temps, qu’elle est bien acceptée, qu’elle permet à de nombreuses femmes enceintes de prendre conscience de leur état émotionnel, de prendre elles-mêmes des dispositions pour s’en sortir et d’accepter le transfert éventuel vers des professionnels spécialisés, les psychiatres notamment (Khanlari et al., 2019. DOI: 10.1186/s12884-019-2378-4 ).
En conclusion, une recherche devrait être entreprise en Belgique pour vérifier la faisabilité d la passation systématique de l’EPDS lors de la première consultation prénatale.
Docteur Pierre ROUSSEAU ; Gynécologue-obstétricien ; Pierre.rousseau@umons.ac.be