Le corps médical n’éprouve pas de difficultés à s’informer/se former sur les aspects «juridico-pratiques» de l’euthanasie. Les formations ne manquent pas, qui détaillent quand et à quelles conditions y procéder – ni même qui expliquent comment opérer. La Société Balint belge aborde l’acte sous un angle moins couru: celui de la mise à l’épreuve de la relation thérapeutique.
«L’euthanasie revient régulièrement dans l’actualité. Les professionnels reçoivent des informations ‘techniques’. Nous avons choisi, pour notre journée d’étude, de nous interroger sur une autre dimension: ce que l’euthanasie change dans les rapports avec le patient», indique le Dr Michèle Parée, coordinatrice de l’événement.
Bien sûr, pour planter le décor, la Société Balint repartira de la loi de 2002 et de ce qu’elle permet. De ce qu’elle évite aussi, en imposant de poser et reposer la question de sa décision au candidat à l’euthanasie. «Car un malade voit avec les yeux d’aujourd’hui ce qu’il pourrait être demain. Parfois, les attentes changent», fait remarquer le Dr Parée. Mais la journée se concentrera «surtout sur la façon d’inscrire l’euthanasie dans la relation thérapeutique».
Bousculé dans son idéal
Le soignant peut tant avoir affaire à des gens jeunes, en bonne forme, qui anticipent leur souhait ‘si un jour…’ qu’à des personnes réellement confrontées à la survenue d’une maladie grave, situe la coordinatrice. «L’euthanasie surgit alors dans le discours de ces patients, mais aussi dans notre arsenal de soins. Nous allons examiner comment cette demande change la donne dans la relation, vu du côté des professionnels. Comment ceux-ci vivent-ils la situation? Ne sont-ils pas ‘bousculés’ dans leur idéal de soins? N’objectent-ils pas que leur rôle est de soigner et non de donner la mort? La demande d’euthanasie peut ébranler des choses fondamentales dans l’esprit des soignants. Si c’est une épreuve de dignité chez le patient, ça peut aussi être, chez eux, une mise à l’épreuve de la vocation.»
La généraliste ajoute, pour en avoir déjà discuté avec des pairs, que chez certains, l’euthanasie ne fait simplement pas partie des options envisageables. En tout cas, les témoignages convergent pour dire qu’elle ne deviendra jamais un acte anodin. Même si dans les dossiers, au rayon du projet thérapeutique, les médecins sont invités à consigner les volontés du patient, «on ne peut en cochant quelques cases évacuer tout le côté bouleversant de la demande. Les cases, les rails sur lesquels on se place, cela permet de tenir à distance ses propres émotions, et c’est humain. Mais tout ça n’enlève rien au fait que c’est une expérience d’un genre très ‘bousculant’.»
La journée d’étude est fixée au samedi 18 novembre et se déroulera à Namur. La Société Balint belge a convié à la tribune des orateurs comme Me Jacqueline Herremans, présidente de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité, le Dr Damas, chef du service des soins intensifs au CHU de Liège et médecin pratiquant des euthanasies, ou encore le Dr Corine van Oost, médecin en soins palliatifs à la Clinique du Bois de la Pierre, à Wavre. «Tous commenceront leur intervention par une vignette clinique ou une histoire particulière vécue.»