Le Gouvernement a versé aux hôpitaux il y a plus d’un mois un milliard : c’est une avance de trésorerie. Une deuxième avance de 500 millions est accordée , et une autre de 500 millions promise en octobre. Les médecins sont à tort convaincus qu’ils devront rembourser cette avance en fin d’année. Des gestionnaires instrumentent cette peur en proposant au CM d’abandonner à leur profit la part qui revient aux honoraires. Soyons clairs : il y a fort peu de risque que le remboursement doive être exigé.
Un éventuel « remboursement » par les hôpitaux ou les prestataires hospitaliers indépendants (dont le médecins) ne sera mis en œuvre que si leur budget sectoriel est dépassé. Au vu de la perte majeure d’activité pendant un trimestre, il semble que la reprise d’activité ne comblera pas la perte, et qu’il n’y aura pas lieu d’actionner le mécanisme de remboursement.
La répartition du milliard laisse peu de moyens pour les honoraires. En cascade, le gestionnaire reçoit une compensation pour le BMF la convention INAMI garantissant le paiement des charges au niveau de celles de 2018 indexées. Il reçoit en outre, comme bénéficiaire de premier rang, prélevé sur la part « honoraires » (= 70% du milliard), la couverture de toutes les charges normalement payées par les prestataires (le prélèvement classique sur honoraires). Un plafond est imposé : pas plus de 65% des montants 2018 ne peut être attribué. Donc 35% de la part « honoraires purs » resteront dans les caisses du gestionnaire, sans aucune justification. Véritable holdup !
Le rôle que le Conseil médical a à endosser est capital. Comme je l’ai écrit dans une tribune précédente publiée dans Le Spécialiste , ce sera à lui de concevoir le modèle de distribution vers les médecins de la part du milliard, soit autour de 400 millions (~40% du total). La circulaire INAMI décrit les priorités d’affectation : d’abord les médecins qui ont travaillé « COVID » sans nomenclature, ensuite les candidats spécialistes (rémunération de base et heures supplémentaires), enfin les médecins qui auront été quasi totalement privés de revenus.
Tous les travaux révèlent des attitudes – habitudes – confiscatoires des gestionnaires sur les honoraires. Les prélèvements ne sont absolument plus justifiés par une contrepartie réelle, sont augmentés sauvagement par ajustement des pourcentages de rétrocession (les frais exprimés en % sont légaux, cependant ils ne correspondent quasi jamais à des frais réels qui seuls peuvent être mis à charge), les suppléments d’honoraires sont confisqués. Tout cela se produit en gardant un semblant de respect des règles d’avis du Conseil médical, les membres de celui-ci faisant l’objet d’un chantage insupportable à la survie de l’institution, de leur service, et même de menaces de licenciement.
Des médecins indépendants rémunérés au forfait ne sont plus payés, ou seulement la moitié, ou moins, que ce qui est pourtant écrit dans leur contrat individuel.
Des spécialistes sont quasi contraints de travailler dans d’autres services de l’institution, en dehors de leur domaine de connaissance, de leur spécialité.
Il devient urgent de rétablir un équilibre relationnel entre gestionnaires et médecins.
Exigeons la publication d’un arrêté royal pris en exécution de l’article 155 de la loi sur les hôpitaux, précisant la nature des frais qui peuvent être mis à charge des honoraires. Exigeons le respect de l’article 151 qui limite ces frais à ceux non couverts par le BMF : les frais mis à charge ne peuvent être que réels, identifiables, et non couverts par ailleurs. Donc il faut interdire le prélèvement en % de la recette, % qui n’est plus en rien, je le répète, la traduction de la réalité des frais.
Il faut limiter les abus commis sous couvert de l’article 155, §4, qui permet de faire glisser des charges injustifiées sous le chapeau de « mesures visant à améliorer l’image de l’hôpital » !
Les changements doivent rendre impossible et interdire tous les prélèvements abusifs des honoraires, en sorte que la recette des médecins ne serve plus de variable d’ajustement du budget de l’hôpital. Le BMF couvre les frais de l’hôpital. Il faudra l’augmenter. Mais le système de pourcentage des honoraires pour masquer les insuffisances de l’Etat dans le financement hospitalier doit disparaître. D’autant que ce petit jeu a été utilisé jadis aussi pour maintenir en survie artificielle des lits / services / institutions en quantité excédentaire (non justifiés, vides). Et qu’on ne vienne pas me dire que ces lits ont été utiles pendant la crise COVID : au plus fort de celle-ci beaucoup de lit étaient vides, et des hôpitaux ont pensé mettre leur personnel soignant au chômage technique !
Comme pour les autres professions de soins, un plan de relance et de revalorisation doit être proposé, sur la période 2020-2021. Tous les médecins en ont pris plein la gueule, en ambulatoire comme dans les hôpitaux, que ce soit sur le plan des risques pris, sur le plan financier, et sur le plan psychologique.
Depuis X années, la chute des revenus de la plupart des médecins s’aggrave, contrairement à ce qui est proclamé urbi et orbi. Le COVID a été un accélérateur.
Le maintien de l’adhésion des prestataires au système des accords sociaux est indissociable de cette revalorisation.
Derniers commentaires
Freddy GORET
12 juin 2020Déjà proposé dans certains hôpitaux publiques mais REFUSE sans justification et en général par les hôpitaux ayant à leur tête des politiciens souvent socialistes mais pas tous
Jacques MAIRESSE
12 juin 2020pourquoi ne pas envisager une comptabilité interne sur base des frais réels comme cela se pratique dans quelques hôpitaux...