Les émoticônes sont-elles juste des pictogrammes amusants ou pourraient-elles devenir un outil de communication efficace pour les médecins et leurs patients ? Des chercheurs de l’University College of London, du Massachusetts General Hospital et de la faculté de médecine d’Harvard se sont penchés sur la question. Leurs résultats ont été récemment publiés dans la revue JAMA.
C’est en 2010 que les émoticônes ont été officiellement introduites dans le lexique Unicode, le standard informatique auquel se conforment la majorité des systèmes de traitement de texte. Dix ans plus tard, ils y étaient déjà au nombre de 3521, dont une trentaine peuvent – d’après les investigateurs – être considérés comme pertinents pour le domaine de la médecine.
« On pourrait facilement se dire qu’il n’y a que les ados qui communiquent par pictogrammes, mais les émoticônes sont une série de représentations numériques qui fonctionnent sur différentes plateformes, des téléphones portables aux ordinateurs de bureau en passant par les tablettes, et ce qu’elles utilisent Windows, Apple iOS ou Android. En plus, elles présentent l’avantage d’être standardisées, universelles et familières et d’être de plus en plus souvent utilisées dans des cadres aussi bien informels que professionnels. Elles peuvent aider le patient à communiquer des symptômes, préoccupations et autres informations cliniquement pertinentes, mais aussi être utilisées dans l’autre sens pour lui donner des instructions », commentent les chercheurs.
Avantages et inconvénients
Si les émoticônes peuvent offrir un complément utile aux moyens de communication traditionnels, elles ont aussi leurs limites, à commencer par le fossé numérique qui exclut presque d’office les personnes ayant moins accès à la technologie – comprenez, bien souvent, les patients d’un certain âge. Depuis la pandémie, en particulier, bien des médecins ont été confrontés à des patients qui ont dû utiliser pour la toute première fois les possibilités de la télémédecine et pour qui cette évolution était loin d’être une évidence. S’ajoute à cela que tout le monde n’est pas non plus parfaitement familiarisé avec les émoticônes et leur signification. Chez les prestataires aussi, il semble y avoir quelques obstacles à surmonter : des études laissent entendre que 72 % des travailleurs de la santé sont initialement réticents à utiliser cet outil.
« Il est clair que, dans un avenir proche, les émoticônes vont trouver leur place dans les échanges courants à l’échelon global. Les pictogrammes médicaux n’en sont toutefois encore qu’à leurs premiers balbutiements, et c’est l’occasion rêvée pour la communauté médicale de contribuer à donner proactivement forme au déploiement de ce nouveau mode de communication », estiment les chercheurs.
« La communauté médicale devrait essayer de parvenir à un consensus sur l’iconographie la plus utile pour le patient et pour la profession, dans le but d’améliorer l’accessibilité et la qualité des soins et de l’information de santé en cette ère numérique », concluent-ils.